Dans la cour du Cem John F. Kennedy, enseignants, élèves et autorités académiques ont observé un moment de recueillement à la mémoire des Tirailleurs sénégalais. Conformément aux directives du ministère de l’Éducation nationale, l’établissement a mobilisé ses clubs et ses encadreurs pour offrir une cérémonie riche en enseignements, où mémoire historique et transmission des valeurs citoyennes se sont entremêlées.
L’événement, tenu dans le cadre de la Journée nationale des Tirailleurs sénégalais, célébrée hier, lundi 1er décembre, a été marqué par la traditionnelle levée des couleurs montrant l’attachement et le dévouement à la chère patrie. L’aspect pédagogique n’a pas été aussi négligé. Théâtre, poèmes, sketchs et productions artistiques ont permis de revenir sur les sacrifices consentis par ces soldats revenus de la guerre mondiale. Pour lutter contre l’oubli, un film d’Ousmane Sembène retraçant le drame de Thiaroye a été projeté, suivi d’un exposé interactif du professeur d’histoire-géographie Mamadou Diao Bâ. Revenant sur l’enrôlement des tirailleurs, le contexte colonial, les revendications, la bravoure et le traitement indigne qui leur a été infligé, le Pr Bâ a rappelé la nécessité de préserver toute cette histoire. Selon lui, la mémoire du massacre de Thiaroye doit être préservée. « Nous avons un devoir de reconnaissance et de vérité, car ces martyrs ont balisé la libération de nos pays », a déclaré M. Bâ.
Il a par ailleurs plaidé pour que la leçon sur Thiaroye soit intégrée dans les programmes du CI jusqu’en Terminale afin de renforcer l’éducation civique et historique. Des valeurs à transmettre Mamadou Diao Bâ estime que l’engagement des élèves confirme l’importance de cette démarche pédagogique initiée par les autorités éducatives. « Le cours les a captivés. Thiaroye est un moment dramatique de l’histoire politique de l’Afrique, et il doit éclairer la conscience citoyenne des jeunes », a indiqué M. Bâ. Venu assister à la cérémonie, l’Inspecteur d’académie de Dakar, Cheikh Faye, a salué l’engagement du Cem Kennedy, qu’il qualifie de modèle d’établissement. Il a chaleureusement félicité la principale de l’établissement pour son leadership. « Votre établissement est notre école de rêve. Il montre que celle-ci ne transmet pas seulement des savoirs, mais aussi des valeurs, du civisme, de la citoyenneté et de la solidarité », a fait savoir M. Faye. Les élèves se sont pleinement approprié la commémoration. La présidente du gouvernement scolaire, Ndèye Codou Mabi Cissé, a rappelé avec émotion que si nous parlons de Thiaroye aujourd’hui, c’est pour valoriser le courage, le respect et la dignité.
« Des valeurs à ne jamais oublier », note l’élève. Selon elle, les tirailleurs sénégalais ont montré un immense engagement et il est de notre devoir de garder leur mémoire vivante. Fayol Gassama Barry, un autre membre du gouvernement scolaire appelle à un devoir de vérité historique. « Il est temps que la France collabore avec l’État du Sénégal pour nous aider à accéder aux archives. Le nombre de morts reste encore controversé », a soutenu Mlle Barry. La cérémonie a aussi mis en lumière, un symbole, « L’arbre des valeurs » présenté par Rokhayatou Zahra Sagna, pour souligner les qualités incarnées par les tirailleurs.
…démarrer dès le préscolaire…
Pour la première fois, l’école s’est impliquée activement dans la commémoration du massacre des tirailleurs sénégalais à Thiaroye. Partout à travers le pays, l’évènement a fait l’actualité dans les écoles. À travers le cours « La grande classe », les professeurs d’histoire ont rappelé aux élèves le contexte historique et les causes principales du massacre de Thiaroye. Au lycée sergent Malamine Camara des Parcelles assainies, dès les premières heures de la matinée, cette leçon a été vécue dans une atmosphère empreinte de tristesse. Les élèves, encadrés par leurs professeurs, ont fait revivre l’histoire de « Thiaroye 44 » à travers des sketches, des slam, entre autres. Une approche qui consiste à voir si les élèves ont bien compris le contexte, le sens de l’évènement ainsi que les causes véritables de la mutinerie des soldats d’Afrique.
Coumba Niang, proviseure du lycée sergent Malamine Camara, elle-même professeure d’histoire, estime que la commémoration d’un tel évènement est un devoir, une œuvre de mémoire pour donner ces héros en exemple à notre jeunesse. « Leur sacrifice ne peut pas rester vain, tant il enseigne des valeurs essentielles comme la dignité. Ces Africains ont eu le courage de réclamer justice et égalité », a affirmé Mme Niang. Elle a plaidé pour que cette partie de l’histoire du continent soit enseignée dès le préscolaire. « Toutes les écoles du pays doivent commémorer Thiaroye 44 pour que ce crime odieux ne soit plus jamais oublié. Thiaroye n’est pas seulement une page sombre. C’est aussi un symbole de résistance, de solidarité africaine et de lutte pour la justice », a rappelé la proviseure du lycée sergent Malamine Camara.
Prenant la parole au nom de ses camarades, Awa Faye, la présidente du gouvernement scolaire, a exprimé toute sa fierté et sa reconnaissance à l’endroit du ministre de l’Éducation nationale et surtout du Président de la République, Bassirou Diomaye Faye, pour avoir intégré cet évènement dans le système éducatif. « Par cet acte, le Président de la République veut faire de ce drame qui est le massacre des tirailleurs sénégalais, un élément de conscience collective, pour que l’histoire ne soit plus ignorée ou refoulée, mais enseignée et reconnue », a-t-elle indiqué.
Daouda DIOUF et Pape Coly NGOME

