Des photos d’Abdoul Aziz Bathily sont exposées au Musée de la photographie de Saint-Louis jusqu’à fin septembre. L’ancien formateur au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) participe, avec dix autres photographes, à l’exposition « Gardiens de la mémoire. Les photographes de Saint-Louis de 1940 à nos jours ».
SAINT-LOUIS – Abdoul Aziz Bathily, affectueusement appelé Pa Bathily par ses étudiants, est né en 1942 à Saint-Louis du Sénégal. Photographe et ancien formateur au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (CESTI), il a participé à la formation de plusieurs générations de pensionnaires de cet établissement. Son histoire avec l’objectif commence en 1959. Le jeune Abdoul Aziz, alors âgé de 17 ans, s’intéresse à la photographie à travers des revues et des catalogues qu’il achetait et consultait à l’époque. Il est particulièrement attiré par les images d’appareils photo et cette illustration qui disait : « Un appareil qui obéit aux doigts et à l’œil. »
« D’abord à l’œil, parce qu’il fallait mettre l’appareil à l’œil, au viseur, et aux doigts, parce que c’est le doigt qui déclenche », nous dit-il en souriant. Rêvant jour et nuit de cet outil, il se résolut à demander à son oncle en France, qu’il n’avait jamais rencontré, de lui envoyer un appareil photo du nom de « Brony Flash », un appareil qui ne le quittera plus jamais et qui est actuellement exposé au Musée de la photographie de Saint-Louis.
Son merveilleux cadeau en bandoulière, Abdoul Aziz Bathily commence à photographier tout ce qui l’entoure. Mais cela ne suffisait pas. Il fallait bien plus pour vivre pleinement sa passion. Il se décide alors à suivre une formation en photographie, mais à cette époque, il n’existait pas encore d’école offrant cette formation au Sénégal. Il suit donc des cours par correspondance à l’Institut européen d’électronique et d’informatique (Eurelec).
Amour de la photographie
« J’ai suivi le premier cours, qui était un cours de photographie, et qui devait durer dix mois. J’ai fait ce cours avec du matériel qu’on nous a envoyé par correspondance », confie-t-il. Après ces cours par correspondance, Abdoul Aziz Bathily se forme à la Maison des jeunes Ousmane Tiané Sarr, qui dispose d’un laboratoire photo. Il intègre ensuite le laboratoire Joseph Reich, logé à l’époque sur la rue André Lebon, à l’avenue Serigne Babacar Sy (au nord de l’île de Saint-Louis), et tenu par des Libano-Syriens. La carrière de photographe de Pa Bathily démarre en 1971, lorsqu’il intègre le ministère de l’Information et l’Agence Delta Presse de Dakar, puis l’agence Renaudot. « C’est de là que j’ai appris que le Cesti venait d’ouvrir un laboratoire. Immédiatement, je m’y suis présenté, par l’intermédiaire d’un grand frère, conseiller à la présidence sous le régime de Senghor. Il s’appelait Ibrahima Dème, paix à son âme. Il était un grand journaliste que tout le monde connaissait », explique M. Bathily.
De 1974 à 2013, Abdoul Aziz Bathily forme plusieurs générations d’étudiants en photojournalisme. Il leur enseigne la photographie à travers des leçons théoriques et la pratique sur le terrain. Ses étudiants lui vouent une grande affection, en raison de son professionnalisme, de sa gentillesse et de l’amour de la photographie qu’il leur transmettait. Il les formait à devenir des Pdg (Photographes de Génie).
Malgré son talent, le formateur n’a pas cessé de se former. Il fait des stages au Canada et dans des journaux locaux, tout en suivant des sessions de renforcement de capacités au Sénégal et un peu partout en Afrique.
Passion pour la Linguère de Saint-Louis
Au Cesti, M. Bathily a collaboré avec tous les directeurs de cette école d’excellence en journalisme, de Georges Galipeau à Mamadou Ndiaye, en passant par Babacar Sine, Birahim Moussa Guèye, Oumar Diagne, Eugénie Rokhaya Aw, Ibrahima Sarr et Kousson Traoré.
Le Cesti a célébré ses 60 ans d’existence, et Abdoul Aziz Bathily y a enseigné pendant près de 40 ans. L’école lui a rendu hommage avec un trophée lors de la cérémonie de sortie de la 52e promotion, qui s’est tenue le jeudi 22 mai 2025. En bon Cestien, il répète cette phrase emblématique : « Cestien un jour, Cestien pour toujours. » Aujourd’hui à la retraite, Pa Bathily se considère comme un « soldat de réserve » de cette école de journalisme. « Un soldat de réserve, ça veut dire quelqu’un qui est à la retraite, mais qui reste et qui répond régulièrement à chaque fois qu’on a besoin de lui », précise-t-il.
L’histoire de Pa Bathily ne s’arrête pas à la photographie et au Cesti. À Saint-Louis, il est un fervent supporteur du club de football emblématique « la Linguère de Saint-Louis », mais pas seulement. Ancien athlète spécialisé dans la course de fond, il est devenu arbitre de football et a atteint le grade d’arbitre de ligue. Il est également membre actif du club et intègre le comité directeur de la Linguère en 1969. Il n’a jamais quitté ce club depuis. « Je n’ai jamais quitté le comité directeur de la Linguère. Même quand je n’étais pas à Saint-Louis, j’étais membre du comité directeur de l’instance qui contrôle l’exécution des tâches du bureau exécutif », fait-il comprendre.
Lors des 50 ans du club, il a été honoré en tant que doyen et fait membre d’honneur. Passionné de photographie, l’ancien formateur au Cesti a immortalisé tous les temps forts du club. Sa collection de photos retrace les grands moments du club lors de compétitions nationales et locales, et est exposée actuellement au Musée de la photographie de Saint-Louis. Aujourd’hui âgé de 83 ans, Pa Bathily continue de vivre sa passion pour la photographie. En tant que membre de l’Union nationale des photojournalistes, il recommande aux jeunes générations d’être éthiques et professionnelles. « Une image peut détruire, une image peut avoir un grand pouvoir. Il y a ce qu’il faut montrer et ce qu’il faut refuser de montrer », insiste-t-il.
Jeanne SAGNA (correspondante)