Dans le Boundou, on raconte que Baba Maal, lead vocal du groupe musical sénégalais Daandé Leñol (la voix du peuple en langue pulaar), a séjourné dans cette contrée. Son passage remarqué dans cette zone où la température frôle les 35e degré Celsius reste encore gravé dans la mémoire collective. Les Boundoukais se rappellent toujours et encore. « Nous partagions la même concession en ces temps. Baba Maal était très cordial et jovial », témoigne Moussa Mboum, son vieux compagnon dans la zone. Mieux, renchérit Aïssata Niang, « Baba Maal a appris le Yéla dans le Boundou ». D’ailleurs, poursuit-elle, il a logé dans la maison familiale pendant près de deux mois. Ma maman Lama Binta Seck lui a appris les codes de ce genre musical originale. Aujourd’hui, il est l’un des grands ambassadeurs de cette musique traditionnelle, qui a fini de gagner le cœur de milliers de mélomanes à travers l’Afrique et le monde.
« Le Yéla est originaire de Sendébou dans le Boundou des profondeurs, adoube Issagha Modi Seck. Ce sont nos ancêtres qui l’ont exporté un peu partout au Sénégal. Beaucoup d’artistes de renom comme Baba Maal ont visité le Boundou, où ils ont été bercés aux gnoses et mélodies du Yéla ». Et l’une des particularités du Yéla, ajoute-t-il, c’est sa magie capable de vous transporter, vous transcender et vous faire voyager, au-delà du réel et du visible. « En vérité, traditionnellement, le Yella a ce pouvoir de chasser le mal, les capacités de vaincre l’adversité et la manie de célébrer la bravoure », conclut l’enseignant à la retraite. Pour sauver ce patrimoine culturel du Boundou et éviter sa disparition dans l’espace musical sénégalais, une association des jeunes griots du Yéla a vu le jour. Elle est conduite par Aïssata Niang et Cie. Mais faute d’accompagnement, cette organisation d’artistes peine à retrouver sa voix. « Nous avons un problème d’encadrement, de soutien financier et matériel. Nous participons rarement aux festivals nationaux. Nous voulons acquérir de nouveaux matériels, s’ouvrir aux nouvelles sonorités mélodieuses pour mieux s’adapter à l’air du temps. Nous sollicitons ainsi l’appui des gouvernants pour pouvoir véritablement vivre de notre art ». Ça aussi, c’est une autre voix du Yéla, qui sera probablement entendu par l’autorité…
Par Ibrahima Khaliloullah NDIAYE et Ibrahima KANDE (Textes) et Mbacké BA (Photos)