El Bachir Sow, plume historique du Soleil et légende du journalisme au Sénégal, a rendu son dernier souffle ce samedi, dans un calme profond, chez lui, à la Cité Soleil de Dalifort. Il avait 73 ans.
Le dernier entretien avec El Bachir remonte au début du mois de janvier. Le directoire du Soleil m’avait chargé de le contacter pour voir s’il pouvait animer une chronique « Santé » dans les pages du quotidien national. « La chronique, c’est un rendez-vous. À respecter. Avec mon âge, ça va être difficile… Je n’ai plus cette vivacité d’esprit. Transmets tout de même mes remerciements et salutations au nouveau directeur du Soleil », m’avait-il gentiment dit pour décliner l’offre.
Ainsi était l’homme. Bienveillant et courtois. Passionné de journalisme. Mais surtout amoureux des bons articles : fouillés et bien rédigés. L’ami par excellence : celui avec qui l’on passe du bon temps et sur qui l’on peut compter. Tous ceux qui l’ont connu au travail peuvent témoigner de l’exceptionnel journaliste qu’il était : disponible, et surtout généreux, encourageant les autres à entreprendre par eux-mêmes, à réussir par eux-mêmes. « Bachir était un immense professionnel, un homme rigoureux, juste, sincère, sobre et aimable. C’était un bonheur de travailler et de vivre avec lui », a témoigné Amadou Fall, retraité du Soleil.
5ᵉ promotion du CESTI
El Bachir est issu de la 5ᵉ promotion (1974-1977) du CESTI (École de journalisme de l’UCAD), section presse écrite. Une promotion qu’il partage avec de grands noms de la presse sénégalaise : Abdallah Faye, Mamadou Amath, Aliou Diongue, Momar Seyni Ndiaye, Chérif Sèye et Marcelle Sène. À sa sortie du CESTI en 1977, il intègre Le Politicien, un journal satirique fondé par un autre journaliste, feu Mame Less Dia. Mais El Bachir a vite compris que « ce n’était pas ça ». Il démissionne un an après pour rejoindre le quotidien national qui voulait lancer Zone 2, un hebdomadaire mi-culturel, mi-sportif.
« Momar Seyni Ndiaye, mon ami de promotion, avait dit à Serigne Aly Cissé, qui pilotait le dossier, de me prendre, estimant que je pouvais beaucoup apporter au nouveau projet. » C’était en février 1979. El Bachir est recruté et, quelque temps après le départ de son patron, il devient chef du service Culture de Zone 2. Dans son équipe, un certain Abdoulaye Bamba Diallo. Cheikh Fall, lui, s’occupe du volet Sport. Mais le projet connaît des difficultés, obligeant le président-directeur général, Bara Diouf, à l’arrêter. En revanche, l’aventure continue pour El Bachir et ses confrères. Tous sont reversés au journal Le Soleil.
C’était le début d’une belle et riche carrière pour le Kaolackois. Entreprenant mais surtout brillant, El Bachir s’est vite fait remarquer par son talent, gagnant ainsi la confiance de ses supérieurs. Sans surprise, il gravit tous les échelons, occupant tous les postes : chef du service Nation, chef du service Étranger, rédacteur en chef délégué, rédacteur en chef, deux fois directeur des rédactions avant de devenir le premier coordonnateur de la rédaction du Soleil sous Cheikh Thiam. Il aura servi au moins 34 ans au Soleil et au service de la nation.
Spécialiste en Santé et Population
Mais El Bachir, spécialiste en Santé et Population, c’est aussi une remarquable expérience sous-régionale. Il a travaillé au département Études et Recherche en Population et Développement Durable, dénommé CERPOD, dans le cadre du projet CILSS (Comité inter-État de lutte contre la sécheresse au Sahel).
Sa disparition, samedi, laisse un grand vide et plonge le monde de la presse dans une immense douleur. El Bachir repose désormais au cimetière de Hann, juste à côté du bureau qu’il a occupé pendant plus de trente ans. À écrire des articles et à encadrer de jeunes journalistes. Signant ainsi un bail éternel avec le quotidien national.
Abdoulaye DIALLO
Le témoignage de Mamadou Kassé
Oh, quelle triste nouvelle ! El Bachir Sow, mon ami d’enfance, mon voisin et fidèle compagnon, est parti, nous laissant dans la douleur et la consternation.
El Bachir n’était pas un simple collègue. Il fut un frère de cour et de jardin avec qui j’ai fait mes premiers pas dans nos maisons respectives. C’est sous les lampadaires que nous apprenions nos premières leçons avant de nous initier aux tours de quartier, sortes de cross-country dans les nuits kollackoises.
« Él Bachir », son nom d’auteur, avait supplanté son nom propre, Elhadji Bassirou Sow, par la finesse de sa plume et la profondeur de sa pensée. Pionnier dans la mise en réseau des journalistes pour renforcer leurs capacités, El Bachir aura marqué de son empreinte la presse spécialisée, en particulier dans les questions sociales et démographiques.
Alité depuis quelques semaines, une indisponibilité m’empêche d’être présent aux côtés de la famille, de Marie Correa, sa chère épouse, de ses enfants et des amis du Soleil et de la presse pour lui dire adieu, cher ami.
En union de prière avec tous les proches, je prie Allah de l’accueillir au Paradis.
Mamadou Kassé, ton frère BADOU