C’est avec une douleur immense que nous apprenons le décès de Keyssi Bousso, autrefois Administrateur du Grand Théâtre National de Dakar. Keyssi fut bien plus qu’un grand homme de culture : il fut un homme de valeur, d’une générosité sans mesure. Dès l’annonce de son décès, une image m’est revenue en mémoire : l’immense projet culturel pour lequel il m’avait sollicité et m’avait offert son écoute et sa collaboration. Ce rêve, parti d’un simple danseur ambitieux, s’est, par la force des choses, mué en l’un des plus grands événements de danse jamais organisés au Sénégal au cours des deux dernières décennies.
Oui, l’arrivée du Ballet Béjart de Lausanne, sous l’ère Keyssi Bousso, a marqué un tournant dans l’histoire du Grand Théâtre National de Dakar. Pour deux dates seulement, la salle a affiché complet, alors même que les billets brillaient par leur prestige et que le pays tout entier, avide de culture, ne voulait rien manquer de cet incontournable. Il me revient en mémoire, ce moment où le directeur général, Keyssi Bousso, avait le torse bombé et proclamait avec une conviction sans faille : « Ils n’y croyaient pas, mais nous l’avons fait ».
Dans les coulisses, Keyssi m’avait honoré en me confiant la direction de toute la communication de cet événement phare. J’ai même eu l’insigne privilège de présenter ce projet à Son Excellence le Président Macky Sall, lors d’une audience privée à laquelle avait pris part, ses collaborateurs les plus proches. Le Président avait, par son engagement personnel, mis tout son poids en faveur de la réussite de ce spectacle inédit.
Keyssi est parti pour l’éternité. Toutefois, l’histoire retiendra que celui qui était, au-delà de son rôle administratif, un danseur qui a affûté ses armes aux côtés de la légende Germaine ACOGNY (tous deux sortis de la Mudra Afrique fondée par Maurice Béjart), laisse derrière lui un héritage, une vision et une ambition pour la scène culturelle sénégalaise.
Mais au-delà de ces considérations, comment ne pas saluer la générosité de cet homme qui n’avait jamais appris à dire non ? Tellement ancré dans son terroir, le Fouta, que ses racines envahissaient les locaux du théâtre pour y tendre la main à longueur de journée. En tant que Maire de Doumga Lao (dans nord du Sénégal), il portait aussi un devoir citoyen et culturel à accomplir, et il l’a accompli avec brio.
Keyssi a accompli sa mission sur terre. Qu’Allah, le Tout-Puissant, lui ouvre grandement les portes du Paradis.
Adieu, artiste et homme d’exception.
Gilles Arsène TCHEDJI
Journaliste-Ancien Chef du Desk Culture Le Quotidien