Khadija Fall n’est pas à l’écran, mais c’est elle que l’on entend. Chaque mot, chaque phrase est choisie avec soin par celle qui a fait de sa voix son gagne-pain. Dans le métier depuis cinq ans, la voix-off a profité de la Journée mondiale de la voix, célébrée chaque 16 avril, pour revenir, de vive voix, sur sa profession.
La jeune femme, qui travaille au Bureau d’Information et de Communication Gouvernementale (BIC-Gouv), laisse facilement deviner sa vocation. Khadija Fall donne le ton d’entrée de jeu : il suffit d’un mot pour reconnaître LA voix qui se cache derrière les spots et autres publicités institutionnelles. Le sourire contagieux, la voix gracieuse, c’est avec enthousiasme que cette « parleuse professionnelle » nous reçoit au BIC-Gouv. Où qu’elle passe, la voix-off subjugue, son sourire aux lèvres. Mais ce n’est pas sa bonhomie qui marque en premier : c’est sa voix.
La trentenaire au teint d’ébène est celle qui vous chuchote l’histoire à l’oreille. Quand Khadija Fall parle, le silence devient sonore. Sous son voile, elle possède cette capacité de charmer dès les premières minutes de l’interview. Et pourtant, rien ne la prédestinait à une carrière de voix-off.
L’histoire que raconte Khadija Fall suit une rythmique où la fausse note n’a pas sa place. Tout semble en harmonie pour celle qui, après le baccalauréat, a suivi des études en télécommunications technico-commerciales. Elle enchaîne alors les postes dans l’administration, en tant que commerciale puis assistante de direction. Khadija suit le rythme de sa profession, mais un détail cloche : ce travail de bureau ne l’enchante pas. C’est au détour d’une conversation avec un ami que celui-ci lui souffle l’idée de la voix-off. Bam ! L’ancienne commerciale voit dans cette reconversion une opportunité de laisser s’exprimer « ce don qu’elle n’avait jamais remarqué », haut et fort.
Les tons d’une vocation
« Je m’ennuyais trop dans les bureaux. La voix-off m’a un peu libérée de tout cela. Parce que quand on est voix, on est freelance », explique la voix du BIC-Gouv. Mais dans ce métier, il faut suivre le rythme des mots et des émotions.
Selon Khadija Fall, la différence entre une voix ordinaire et une voix-off professionnelle, c’est l’émotion transmise. Une autre qualité essentielle, poursuit-elle, est la capacité à identifier le message que l’on veut faire passer, l’émotion à transmettre, les mots à mettre en valeur, ceux à atténuer, tout en maîtrisant l’intonation, le rythme et la vitesse de la voix.
Elle précise qu’il ne suffit pas d’avoir une belle voix. « Une voix-off doit avant tout bien se faire comprendre : articuler, gérer sa respiration… C’est crucial, car la voix dépend en partie de la respiration et de la posture », explique-t-elle, avec pédagogie. Il lui aura fallu une année d’entraînement pour trouver le ton juste. Entre recherches sur Internet, exercices de respiration et de diction, elle a su perfectionner sa pratique.
BIC-Gouv, là où la passion s’écrit en toutes lettres
« Quand il y a des communiqués ou des événements du Président ou du Premier ministre, je fais des résumés en wolof pour mieux atteindre la population qui ne comprend pas forcément le français », raconte-t-elle fièrement. Khadija Fall porte ainsi la voix du gouvernement à travers des vidéos diffusées sur différentes plateformes. Mais elle ne se limite pas au BIC-Gouv.
« J’ai aussi des gros clients avec qui je travaille depuis le début, et je continue à collaborer avec eux », confie-t-elle. Sa forte présence sur les réseaux sociaux a largement contribué à sa notoriété. Khadija Shares (NDLR : son nom sur les réseaux, qui signifie Khadija partage) cumule 32 000 abonnés sur Instagram et 78 000 sur TikTok.
Elle y partage notamment les coulisses de son travail de voix-off. La trentenaire n’hésite pas non plus à parler des réalités de ce métier, entre opportunités et difficultés. Si le métier peut être lucratif (de 50 000 FCFA jusqu’à plusieurs millions), il exige avant tout de la passion. « Il faut connaître ses limites et s’appuyer sur ses principes personnels », insiste-t-elle.
Khadija Fall ne prête pas seulement sa voix à des spots ou des vidéos institutionnelles. Elle travaille également sur des projets documentaires. Mais elle voit plus loin : son ambition est d’ouvrir une école de formation spécialisée pour donner plus de voix à ce métier.
Arame NDIAYE