La Coordination des associations de presse (Cap) a présenté, hier à Dakar, le Rapport général des Assises nationales des médias. Ce document, fruit d’un vaste processus participatif engagé en 2022, propose un plan de refondation du secteur médiatique sénégalais autour de quatre axes stratégiques.
La Coordination des associations de presse (Cap) a franchi une étape décisive dans le processus de refondation des médias sénégalais, en organisant, hier, 1er juillet, à Dakar, un atelier de restitution et de validation des conclusions des Assises nationales des médias. Démarrées en octobre 2022, ces assises, selon les organisateurs, ont mobilisé pendant deux ans plus de 1.600 participants issus de divers horizons du secteur médiatique.
La rencontre s’est tenue avec le soutien de la Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (Mfwa) et de la Fondation Friedrich Ebert. Intitulé « Bâtir un écosystème médiatique performant », le rapport général, présenté par le rapporteur Cheikh Thiam, offre une synthèse des recommandations issues des six commissions thématiques mises en place.
Des défis structurels persistants
Afin d’adresser les multiples défis identifiés, les Assises ont dégagé quatre grandes orientations stratégiques. Il s’agit de renforcer le rôle des médias dans la démocratie, en assurant leur indépendance, leur responsabilité et leur capacité à éclairer le débat public, de réformer le cadre juridique et institutionnel, notamment par une régulation plus efficace et une meilleure répartition des ressources publiques et privées.
Il consiste également à moderniser et rendre viable économiquement les entreprises de presse, à travers des aides mieux structurées, l’innovation numérique et de nouveaux modèles d’affaires, mais aussi à améliorer les conditions de travail et la formation des professionnels, dans une logique de professionnalisation continue et d’élévation des standards éthiques. « Le partenariat entre l’État et les médias doit être rénové, basé sur la transparence, la redevabilité et une vision partagée du développement du secteur », a insisté le rapporteur général, par ailleurs ancien directeur général de la Société sénégalaise de presse et de publications (Sspp) « Le Soleil ».
« Une démarche inclusive »
Le rapport ambitionne de servir de socle à une transformation profonde du paysage médiatique national. « Ce rapport est le fruit d’un dialogue inclusif réunissant journalistes, éditeurs, chercheurs, représentants de la société civile et institutions publiques. Il propose des recommandations ambitieuses et réalisables pour le redressement et le développement durable de notre secteur », a souligné M. Thiam. L’essor du numérique, la diversification des supports et l’émergence de nouveaux modèles économiques ont profondément transformé les médias au Sénégal. Mais cette évolution rapide a aussi mis en lumière les fragilités du secteur. Ainsi, le rapport pointe une crise économique persistante, exacerbée par un environnement concurrentiel de plus en plus rude, une régulation inadaptée et un modèle économique obsolète. Pour Cheikh Thiam, la viabilité des entreprises médiatiques, la qualité du journalisme et son indépendance sont aujourd’hui menacées, alors qu’ils constituent les piliers de toute démocratie.
Dans sa prise de parole, Mamadou Thior, coordonnateur du Comité de pilotage, est revenu sur la méthodologie adoptée. « Nous avons voulu un processus ouvert, rigoureux et participatif. Le Comité scientifique, constitué de praticiens et d’experts, a structuré les travaux en six commissions thématiques, associant l’ensemble des catégories professionnelles et institutionnelles concernées », a précisé le président du Conseil pour l’observation des règles d’éthique et de déontologie dans les médias (Cored). Les thématiques traitées ont donné lieu à des réunions, à des consultations, et à la réception de nombreuses contributions analysées et synthétisées pour nourrir le rapport final. Ministères sectoriels, forces de défense et de sécurité, universitaires, formateurs, éditeurs et journalistes ont ainsi apporté leur pierre à l’édifice. « Au total, ce sont près de 1.600 personnes qui ont participé aux travaux des Assises. Ce chiffre témoigne de l’ampleur de la mobilisation autour de cette initiative », a ajouté Mamadou Thior.
Le Rapport général des Assises ne constitue pas une fin en soi, mais un point de départ. Pour les membres de la Cap, la mise en œuvre des réformes dépendra de la volonté politique des autorités et de la capacité des acteurs du secteur à travailler en synergie. « La presse ne saurait se réinventer sans une volonté forte de l’État, accompagnée d’une mobilisation collective. Nous appelons à inscrire ces conclusions dans les politiques publiques et les futures lois sur la presse », a déclaré Cheikh Thiam.
Adama NDIAYE