Avec ses lignes mélodiques et son rythme syncopé, le Yéla vibre comme le reggae, un genre musical jamaïcain qui a émergé à la fin des années 1960, issu du ska et du rocksteady, et qui s’est popularisé mondialement grâce à Bob Marley. C’est une chanson à plusieurs variantes dont chacune a des versions dérivées. Le Yéla est une musique très ancienne, qui porte la mémoire des plus lointains ancêtres. C’est l’une des musiques principales des Haalpulaar du Boundou et du Fouta Tooro. Quant à son origine, le sujet reste polémique. Le Boundou, ancien lieu d’établissement du premier État musulman au 17e siècle, situé à plus de 400 km au sud-est de Dakar, apparaît comme la source originelle de ce genre musical. Le Fouta Toro, contrée du nord du Sénégal et du sud de la Mauritanie, peuplée à l’époque par les nobles guerriers « Sebbe » (Ceddo au singulier) pendant le règne de la dynastie des Deniyanké (Peuls guerriers du royaume de Tekruur qui deviendra la contrée du Fouta Tooro) réclame aussi la paternité.
Toujours est-il que le Yéla est chanté par des griots pour célébrer hauts faits et gestes nobles des hommes valeureux et vertueux mais aussi et surtout d’encourager et égayer les nobles guerriers devant aller sur le champ de bataille. Ce répertoire des griottes Haalpulaar du Boundou comme du Fouta Tooro, nourri par les faits d’armes des siècles passés, poussait les guerriers à se surpasser sur les champs de bataille et à inscrire leurs noms dans la mémoire des hommes « éternels », des héros. Chaque tube du Yéla a sa propre histoire et se joue traditionnellement avec des Koumballi (petites calebasses), des Bolong (gourdes) et Kolli (luth ouest-africain). Certains récits avancent que cette musique prend sa source dans l’ancien empire mandingue (l’empire du Mali) et sonne comme l’ancêtre du reggae, la mélodie des rastafari.
Par Ibrahima Khaliloullah NDIAYE et Ibrahima KANDE