Les futurs Picasso ont rendez-vous avec la peinture tous les dimanches pour faire ressortir leur créativité et passer un bon moment tout en joignant l’utile à l’agréable. Cette initiative de Djiby Ly vise à aider les enfants à s’exprimer à travers la peinture.
Le quartier de la Sicap Liberté 6 est rythmé par des enfants qui courent par ci par là tandis que d’autres peuvent s’initier à une nouvelle activité, à savoir la peinture. C’est le concept des ateliers du dimanche. En cet après-midi, dans l’un des immeubles de ce quartier populaire, le calme règne en maître. Il est 15h et Djiby Ly l’initiateur du concept, règle les derniers détails avant l’arrivée de ses artistes. « Je travaille en tant qu’informaticien dans l’une des boîtes. On me prête gracieusement la véranda pour y dérouler mes activités. Après chaque séance, je nettoie et range avant de quitter les lieux », explique-t-il. À l’entrée, un tableau aux motifs orange, jaune, bleu et noir attire l’attention. Sur ce tableau est inscrit sur un fond orange et jaune « les ateliers du dimanche ». Deux grandes tables sont posées de part et d’autres et des toiles à peindre ainsi que des mélanges de peintures sont mis à la disposition des artistes. Quelques confiseries ainsi que de la boisson sont prévues pour les enfants.
Habillé d’un t-shirt marron taché par de la peinture et d’un pantalon noir, Djiby procède au mélange des couleurs. « Il ne faut pas avoir peur de se salir », dit-il d’un ton taquin. Le matériel, il se le procure facilement. « J’arrive à tout trouver dans les quincailleries »explique-t-il. Du jaune, du violet, du bleu, du rouge ou encore de l’orange, toutes les couleurs étaient au rendez-vous. La peinture est faite à base de gouache. Sur un pot, Djiby mélange du bleu et du jaune pour obtenir le vert. « C’est l’occasion de passer de bons moments tout en apprenant », explique-t-il tout en mélangeant les couleurs. Il peaufine les derniers détails en installant des chaises pour ses petits artistes du dimanche.
Il est 16h et les premiers hôtes commencent à arriver accompagnés par leur parent. « C’est un après-midi entre amateurs de peinture juste pour apprendre les techniques de base » affirme Djiby tout en distribuant les pots de peinture aux apprenants. « Vous allez commencer par peindre un fond vert », explique-t-il. Ces derniers tout excités se mettent à l’œuvre. Ils commencent par prendre la peinture verte qu’ils badigeonnent sur la toile. Pour les plus petits, Djiby n’hésitent pas à leur prendre la main pour les guider. Concentrés, ces artistes peignent sans faire attention à en mettre partout. « N’oubliez pas, il faut nettoyer le pinceau à l’eau avant de le mettre dans une autre couleur », explique-t-il tout en indiquant le robinet. Il passe vérifier et remet quelques couches de peinture par ci par là pour recouvrir tout le cadre. «Vous pouvez peindre ce que vous voulez, laissez parler votre imagination », lance-t-il à ces derniers après le cours. Les enfants commencent à peindre sans tarder sur l’œil vigilent de Djiby qui n’hésite pas à guider les plus jeunes.
Le calme a cédé la place à une ambiance bonne enfant. Ils s’attaquent à la peinture en quelques minutes. Fatou Cissé Faye, malgré le brouhaha, reste concentrée sur sa toile qu’elle voit prendre forme petit à petit. Sur un fond jaune, elle laisse libre cours à son imagination. « Je dessine des cœurs », explique-t-elle tout en continuant son œuvre. « J’adore dessiner », avoue Fatou tout juste âgée de neuf ans venue pour la première fois participer aux ateliers. Des cases, des petites filles ou juste des formes sont peintes par ces jeunes qui s’initient pour la première fois à la peinture. D’autres plus ambitieux essaient de ressortir ce qu’ils ont appris : « J’ai peint le monde. Voici la Côte d’Ivoire, le Burkina, les États-Unis et le Sénégal », explique ce dernier. Avec le pinceau, il continue son œuvre tout en se laissant guider par son imagination et sa créativité.
L’art pour tous !
Djiby Ly s’est lancé dans ce projet depuis mars 2019. « Le concept est né d’une discussion avec un ami. Mais ce qui a vraiment motivé cette prise d’initiative est la frustration que j’ai eue étant plus jeune. Quand je me retrouvai face à des gouaches, mais dans l’incapacité de faire quelque chose avec. Aujourd’hui, je veux aider ces enfants et les plus grands à pouvoir exprimer des choses en ayant les bons réflexes », explique-t-il. Passionné, il s’est lancé dans ce projet et prend tout en charge : « C’est grâce à mes propres moyens que je gère l’organisation. Il m’arrive d’aller jusqu’à 20.000 FCFA pour une séance en renouvelant les fournitures et aussi le rafraîchissement pour les grands et le goûter pour les plus petits. La participation est de 4.500 FCFA ».
Cet amoureux des arts estime que la chose la plus importante dans ce concept « est de passer un bel après-midi autour d’un point commun qui est la passion pour l’art ». « Je trouve aussi que nous avons cette nature en nous. Car nous aimons les couleurs et nous aimons les choses par ce simple critère de couleurs. La peinture dans son sens abstraite n’est que la combinaison harmonieuse de couleurs », explique-t-il.
Le jeune autodidacte ne se limite pas seulement aux ateliers de peinture : « les jeunes manquent de vraies activités créatives et la peinture est une première approche, car j’ai en vue d’autres ateliers comme l’écriture ou le slam ». En sus de cela, il estime que ce sont des occasions « pour permettre aux jeunes d’exprimer leurs sentiments ».Djiby Ly n’espère plus valoriser ce concept. Durant les prochaines années, il pense à y inclure d’autres ateliers et pouvoir ouvrir d’autres centres un peu partout au Sénégal afin de rendre plus accessible l’art.
Arame NDIAYE