De retour d’une tournée en Europe après plusieurs concerts en France et en Italie, Leuz Diwane G est à plein régime dans la promotion de la 3e édition de son show « Gisu Mala Mbao », prévu le 13 décembre prochain au stade municipal de Mbao. L’artiste rappeur qui cuisine actuellement son troisième album studio veut hisser la barre très haute avec un spectacle sons et lumières hors du commun. Dans cet entretien, l’auteur du hit « Mbourok Lem » s’est confié sur ses influences musicales et a esquissé quelques pistes de solutions pour exporter le Hip-hop Galsen à l’international.
Vous faites partie de ces rappeurs conscients qui peuvent toucher un large public. En témoigne le hit « Mbourok Lem ». Comment vous définissez-vous déjà comme artiste ?
Comme j’ai l’habitude de le dire, nous, Sénégalais, n’avons pas créé le Hip-hop. C’est un mouvement qui est né aux États-Unis, dont l’expression musicale qui est le rap est influencé par des genres musicaux comme le jazz, le blues ou encore le Funk. Et il faut rappeler qu’il est né dans un contexte de lutte contre la ségrégation raciale, avec des groupes comme Black Panther Party ou Nation of Islam qui défendaient la cause noire. Ces groupes faisaient du rap pour des causes qui leur sont propres. Ils ont leurs réalités, et nous avons aussi les nôtres. Il est nécessaire d’adapter ce courant musical selon notre quotidien, nos problèmes socioculturels et socioéconomiques. C’est ce que j’ai compris, et j’ai décidé de rapper pour ma communauté en essayant de toucher le plus large public possible. Je viens de Mbao, un village traditionnel lébou qui a ses réalités avec un ancrage culturel fort. C’est donc mon environnement qui détermine mon identité musicale. Je m’inspire de tout ça pour me démarquer et proposer à ma communauté un rap à la fois conscient et agréable à écouter.
Justement, selon vous, qu’est-ce qui manque au Rap Galsen pour pouvoir s’exporter comme il faut à l’international ?
Une identité. Rien d’autre. Je pense que nous ne pouvons pas rivaliser sur la scène internationale avec des Américains ou des Français en faisant exactement ce qu’ils font. Si nous voulons vraiment exporter le Rap Galsen et être compétitif sur le marché international, nous devons nous inspirer de notre propre culture pour toucher d’autres communautés, pour faire découvrir nos mélodies mais aussi nos valeurs. Tous ceux qui l’ont compris en mettant en avant notre culture ont pu se démarquer. Quand je voyage pour participer à des festivals, je vois des rappeurs de divers horizons, chacun avec son propre style, sa propre identité. Si aujourd’hui un Leuz Diwane G doit performer dans un festival en France ou ailleurs, et qu’il y’ait un rappeur local qui fait exactement ce que je fais comme musique, les organisateurs vont préférer cet artiste plutôt que de me payer le billet d’avion et un cachet. Il faut forcément que j’apporte ma touche personnelle, quelque chose de nouveau, d’exotique pour pouvoir impressionner le public. Il nous manque cette originalité. L’Américain va sampler son rap avec des mélodies de jazz ou de rock, donc pourquoi nous ne pouvons pas faire de même avec le mbalax avec nos percussions et autres.
Vous avez déjà deux albums sur le marché : « Diagnosick » en 2015 et « Prescription » en 2020. Cinq ans après, êtes-vous sur un autre projet ?
Effectivement, je suis actuellement en train d’enregistrer un troisième album. Il devait sortir cette année, mais je suis sur plusieurs projets en ce moment. Je reviens d’une tournée à l’étranger et je prépare un projet de résidence artistique en décembre avec un artiste français. Nous avons produit un album commun lui et moi, et je dois me concentrer sur la promo qu’on doit faire ici au Sénégal. Mais je peux dire que mon troisième album solo est presque bouclé. J’attends juste le moment opportun pour le mettre sur le marché.
Vous revenez d’une tournée en Europe, notamment de France et d’Italie. Quel bilan pouvez-vous tirer de cette expérience ?
Quand on participe à des festivals à l’étranger, on se rend compte de plusieurs aspects qui sont négligés ici au Sénégal. Par exemple l’organisation et la ponctualité. Les organisateurs sont stricts sur les horaires. S’ils disent que le festival doit démarrer à telle heure et s’arrêter à telle heure, ils respectent leurs engagements. Je pense que nous devons en prendre de la graine. J’ai également appris un nouveau concept : le « speed meeting ». Les festivaliers font en sorte que les artistes, les organisateurs, les producteurs, les éditeurs et les partenaires puissent se présenter et échanger pour d’éventuelles collaborations. Le contraire de ce qu’on voit au Sénégal où les organisateurs veulent que chacun reste dans sa loge, pour éviter qu’ils nouent des liens avec certains invités. Alors que ça pouvait favoriser de grands partenariats et donner naissance à de beaux projets.
« Gisu Mala Mbao », 3e édition, le samedi 13 décembre prochain. À quoi peut-on s’attendre comme show ?
Comme d’habitude, on verra un show spectaculaire où la culture et la tradition seront au cœur. J’ai l’habitude de travailler avec les troupes théâtrales, les troupes de Ndawrabine, les « assicos » et les associations de supporters des équipes de « navétane » (championnat populaire) qui feront tous des prestations. Le groupe Casa Family également sera de la partie avec les « Kankourangs ». Ce sera un spectacle sons et lumières de très haute facture en live band avec un orchestre de la place. Il y’aura de nombreux invités de marque et de belles surprises.
Propos recueillis par Papa Alioune NDIAYE

