Dans le Sine où il est originaire, Moussa Diouf alias « Scorpiart » a fini par gagner le respect et l’amour des siens. Cela, grâce à son art qui rafraîchit les cœurs à travers un style original. Slameur doué, le défenseur des couches vulnérables impressionne avec ses textes irrésistibles, dont le sens nourrit l’émotion et l’envie.
« La poésie est un hymne du cœur », enseignait Alphonse de Lamartine. Leçon apprise et maîtrisée par Moussa Diouf qui, par le biais de l’écrit, extériorise son for intérieur. Trouvant refuge derrière sa plume, le slameur au talent confirmé exprime les maux de la société à travers des mots bien structurés et très instructifs. Sur scène, « Scorpiart », de son nom d’artiste, attire toujours les projecteurs sur lui. Les textes suaves qu’il produit rafraîchissent les âmes et touchent profondément les cœurs.
Très prolifique, le disciple mouride est aujourd’hui auteur de plusieurs textes. Les uns plus agréables que les autres. Lors d’une prestation, à l’occasion d’un festival organisé récemment à Toubacouta, dans le département de Foundiougne (Fatick), « Scorpiart » a impressionné la foule avec une originalité déconcertante et un style inégalé. Le public ne pouvait s’empêcher de répondre par des ovations appuyées à sa descente du podium.
Pour rendre la pareille, l’artiste, qui s’est laissé aller dans une vive émotion, a soufflé dans l’oreille d’un ami, la voix grave : « Merci pour les appréciations. Cela me donne plus de courage et d’envie ! ». Cependant, ces mots de remerciement cachent aussi une tout autre réalité. Au-delà de la joie et de la fierté qui l’animent, les larmes de l’artiste aux dreadlocks bien coiffés renseignent sur le jugement extérieur dont il fait l’objet.
Comme toute autre personne engagée (écrivain, chanteur, caricaturiste, etc.), il n’a pas échappé aux on-dit et aux spéculations. Si sa famille ne cautionne pas forcément son métier d’artiste, la société, quant à elle, voit en lui un homme qui a simplement suivi sa passion. C’est d’ailleurs pourquoi il se définit comme un « incompris ».
Artiste multidimensionnel
Moussa n’est pas que slameur. C’est un artiste au savoir-faire étendu. Peintre, poète, calligraphe, plasticien, autant de compétences qui font de lui une valeur sûre dans le monde de l’art. En plus de l’esthétisme qu’il a épousé, le natif du Sine évolue parallèlement dans l’art utilitariste. Autrement dit, sa poésie repose sur l’engagement et la conscientisation. À cinquante-trois ans, « Scorpiart » détient un certain nombre d’expériences lui permettant d’éveiller la conscience collective. Dans beaucoup de ses textes, l’artiste sérère dénonce les tares de la société et les souffrances de la vie.
« Je chante le plus souvent pour les couches vulnérables, mais aussi pour défendre la cause de la race noire qui a souffert par le passé. Mon art, c’est de la révolution, de la revendication et de l’information », laisse-t-il entendre.
Son sens de l’humour reflète la courtoisie et l’humilité qui le caractérisent au quotidien. Souriant et bavard, Moussa cache toutefois en lui une rigueur et un caractère imposants. C’est d’ailleurs ce qui fait de lui un artiste aux facettes multiples. En dépit du manque de moyens, ce génie de l’art vit tant bien que mal sa passion et son métier. Il le fait pour le plaisir de son public à travers une modulation de la voix à couper le souffle.
Un talent inné
À l’en croire, il n’a fait l’objet d’aucune formation préalable. C’est juste un talent qui relève de l’inné. « Je n’ai jamais eu de maître. Le slam que j’ai commencé à pratiquer en 2015 m’est venu de nulle part. Je peux dire que c’est un don naturel. J’ai toujours voulu impressionner le monde de l’art », avance-t-il.
Ainsi, à l’instar de tout homme qui rêve grand, Moussa Diouf a en tête beaucoup de projets ambitieux. Le ton fier, il se projette sur son avenir, sourire aux lèvres. « J’ai lancé deux premiers singles intitulés « Souveraineté » et « Sargal djiguène » (hommage à la femme). L’album est en cours et je dois préparer d’autres singles ainsi que des clips et des vidéos », informe celui qui dit avoir plusieurs centaines de textes en tête. Aujourd’hui, le slameur du Sine sollicite le soutien des siens pour mieux faire valoir son art qui, jusque-là, n’est pas totalement révélé.
Par El hadji Fodé Sarr (Correspondant)