Figure montante de l’architecture écoresponsable et voix engagée pour un urbanisme africain enraciné dans ses traditions, Mame Boyo Tall, dite Mamy Tall, est décédée, dans la nuit du lundi au mardi 22 juillet, à l’âge de 32 ans. À la fois architecte de talent, militante pour la construction locale, elle laisse derrière elle un vide dans le paysage intellectuel et professionnel sénégalais.
Mame Boyo Tall dite Mamy Tall a tiré sa reverence à l’âge de 32 ans. C’est ce qu’a annoncé l’ordre des architectes du Sénégal à travers un communiqué. « C’est avec une profonde tristesse que l’Ordre des Architectes du Sénégal vous annonce le rappel à Dieu de Madame Mame Boyo Tall dite Mamy Tall, architecte engagée et membre de notre communauté », lit-on dans la note. Architecte engagée, Mamy Tall est decrite par ses pairs comme une professionnelle talentueuse, une femme de conviction avec une voix forte.
« Elle fut la présentatrice dévouée des trois jours du premier Symposium des Architectes Africains et de SENHABITAT5, marquant cet événement d’une empreinte humaine et professionnelle inoubliable. Son départ laisse un grand vide dans notre famille architecturale », poursuit le communiqué.
Mamy Tall n’était pas seulement une architecte reconnue par ses pairs. La co-fondatrice de Dakar Lives était engagée et militait pour un type de construction, écoresponsable et locale. « La terre est un matériau disponible et adapté à notre climat. Pourtant, elle est stigmatisée et associée à la pauvreté et aux villages », confiait-elle aux confrères du site Le petit journal.
Née à Dakar en 1992, Mamy Tall a grandi avec sa famille à Lomé au Togo. Depuis l’âge de 10 ans, elle rêvait de faire des études d’architecture. « Je voulais dessiner et créer de belles choses » révélait-elle dans une interview. Ses parents l’ont poussé à poursuivre ses envies. « Dès l’âge de 14-15 ans, j’ai pu faire des stages à Dakar chez ATEPA Goudiaby, grand architecte sénégalais qui m’a également poussé dans cette voie. Je regardais les logiciels, les planches de dessins, la façon dont on répondait à un appel d’offres. Ces expériences m’ont confortée dans mon envie de choisir ce métier », avouait-elle. Cette dernière a toujours eu un fort attachement à ses racines. Lors des vacances, elle revenait régulièrement au Sénégal. Mais c’est en 2017 que l’architecte rentre définitivement au bercail.
L’architecte a eu à travailler pour l’agence de gestion du patrimoine bâti de l’Etat (AGPBE). Elle a aussi eu à travailler à la présidence de la République. Son travail auprès de la cellule d’architecture de la Présidence s’est matérialisé à travers plusieurs projets de modernisation et de conservation de monuments historiques, notamment le Palais présidentiel.
« Architecte au Bureau des Architectures de la Présidence de la République, Mamy Tall fut une personne discrète, professionnelle et surtout très talentueuse dans son domaine. C’est ainsi que je l’ai connue, humble, mais remarquable », a témoigné Alioune Ibnou Abitalib Sow, conseiller spécial du président de la République.
Elle faisait partie de ces artisans de l’ombre qui façonnent, dans la sobriété, l’image et la structure du pouvoir.
Arame NDIAYE