C’est la façon de faire de Ousmane Sonko. Il n’avance pas masqué. Et il ne recule pas devant l’obstacle. Quand le pastefien en chef décide de prendre en charge un problème, il le fait et l’assume. Publiquement. Il le fait surtout sans user de faux-fuyants. Sans prête-noms. En clair il ne cherche pas de porte-parole. Préférant aller lui-même au charbon pour expliquer et défendre sa position. C’est ce qu’il a fait récemment à l’Assemblée nationale quand il a fallu annoncer la nouvelle doctrine de « tolérance zéro » à l’encontre des auteurs de fausses informations et de diffamations ciblées.
« La liberté d’expression ne donne pas le droit de porter atteinte à l’honorabilité des individus », avait clairement indiqué le chef du gouvernement, déterminé à faire face à ce qu’il qualifie de « règlements de comptes personnels menés par des individus manipulés par l’opposition ».
Et curieusement, cette montée au créneau de Ousmane Sonko a suscité de vives réactions. Politiques, journalistes, syndicats de presse, société civile, tous ont senti la nécessité de réagir. Alignant certitudes et convictions. Sur fond d’intérêts partisans et de niveau d’implication. On a entendu ici et là que la liberté d’expression était abimée.
Que la démocratie était en recul. Des esprits très fertiles ont même annoncé des arrestations, accusant le Premier ministre d’être à la commande. Peu de voix, en revanche, se sont élevées pour demander le respect des règles journalistiques face à la tyrannie de la désinformation, des fakes news et de la manipulation. C’est comme si les honorables doyens de la presse, le régulateur officiel et le tribunal des pairs se sont passés le mot, s’emmurant dans un silence retentissant, en attendant de voir comment tout ça va se terminer.
Une posture, plusieurs raisons. Certains se sont dit qu’il ne sert plus à rien de rappeler à l’ordre, d’alerter et de sermonner des gens qui ont visiblement juré de saboter la démocratie en foulant aux pieds les règles du métier. « Il m’est arrivé d’appeler un journaliste ou un chroniqueur pour lui dire de faire attention et de traiter l’information avec plus de responsabilités mais le lendemain, j’ai vu pire que ce qu’il m’avait servi la veille. À la longue, on finit par se lasser et on fait comme tout le monde : on accepte de subir », m’a dit récemment un doyen, formateur et très respecté dans la profession. D’autres, par contre, ne se sont pas donné toute cette peine, parce qu’ayant très tôt compris que le mal était déjà fait. Que rien ne peut plus arrêter les dérives actuelles. « Seul un « ndeup » national pourrait nous sortir de cette macabre situation. Le modèle a atteint ses limites. Ayons le courage de le dire. Il faut le repenser mais pas n’importe comment.
Il faudra de l’audace et une réelle volonté politique soutenue par tous les professionnels pour y arriver ». Preuve de l’immensité du défi à relever. En attendant, que faire ? Faut-il croiser les bras ? Se résigner et continuer de subir ? Non, nous dit le Premier ministre. Fidèle à ses convictions, Ousmane Sonko, pour qui l’information est un bien public, a décidé d’agir et de sévir contre les fossoyeurs de la démocratie. Qui nous enfument avec des histoires à dormir debout afin d’être sûr de ne pas parler des sujets qui préoccupent les sénégalais. Ce qui est rassurant et qui mérite d’être relevé, c’est qu’il n’a jamais été question de restreindre les libertés ou de bâillonner la presse. Mais de bien nommer le problème pour ne pas ajouter au malheur du Sénégal, pour paraphraser le grand Albert Camus.
De bien nommer le problème avec un but précis : dégager les intrus et permettre à tous les journalistes, les vrais, d’exercer en toute indépendance leur métier. Voilà pourquoi, le Premier ministre doit être soutenu et encouragé dans ce vaste et stratégique chantier qui est de protéger le journalisme sain et de combattre la phalange d’activistes déterminés à exercer leur diktat en s’abritant derrière ce noble métier qui ne doit pas être un tremplin pour arriver à des fins égoïstes. abdoulaye.diallo@lesoleil.sn