Yangoo, Heetch, Yassir et maintenant Bkg. Les Véhicules de transport avec chauffeur (Vtc) utilisant une application se multiplient au Sénégal. Si les usagers y trouvent leur compte, les taxis urbains traditionnels (jaune-noir) dénoncent une concurrence déloyale.
Les Véhicules de transport avec chauffeur (Vtc) semblent avoir la cote auprès de la population. Pour beaucoup de personnes, il n’est plus question d’attendre un taxi sur la voie publique. La digitalisation a apporté beaucoup de modernité dans le système des transports. L’usage des Vtc est simple, mais par-dessus tout, il procure une option essentielle pour certains : la climatisation. Pour faire son choix, le client a juste besoin de télécharger l’application de Vtc de son choix. Cela fait, il peut lancer une commande qui lui donne les détails du trajet. Il s’agit, entre autres, de l’identité du conducteur qui sera envoyé, l’immatriculation du véhicule, le temps d’attente, la durée du trajet et le prix du transport. Ces informations généralement indisponibles dans le cas des taxis, font que beaucoup de personnes ont adopté les Vtc.
Selon Cheikh Tidiane Biaye, un adepte des Vtc, entre les taxis et les services de transport moderne, le choix est vite fait. Habitant Diamaguene, il souligne que pour aller en ville, il préfère prendre le bus public de transport en commun « Dakar Dem Dikk ». Cependant, une fois au centre-ville, il préfère passer commande avec son téléphone et attendre en toute sérénité la voiture. « En ville, je me déplace exclusivement à travers les Vtc. J’ai fait ce choix pour des raisons de confort, d’autres avantages économiques. Les tarifs des Vtc sont plus raisonnables. De plus, cela m’évite de marchander et de perdre du temps », déclare le jeune homme. Cheikh Tidiane ajoute qu’avec les Vtc, il peut, s’il le souhaite, commander un véhicule climatisé, surtout en période de canicule. Même avec cette option dite « confort », dit-il, le prix reste raisonnable. « Cela m’évite d’arriver tout dégoulinant de sueur à mes rendez-vous. Les Vtc sont plus adaptés à la circulation urbaine et présentent des avantages aussi bien sur le plan économique que sécuritaire », affirme Cheikh Tidiane Biaye.
Du côté des clients, les retours sont positifs en ce qui concerne les Vtc. Amadou Fall, adepte des transports à la demande, a une appréciation positive des services. Cependant, il note qu’à plusieurs reprises, il a cheminé avec des conducteurs qui ne maîtrisent pas l’outil principal de travail des Vtc qu’est Internet et la géolocalisation. « J’ai une fois pris un Vtc et à un moment donné j’ai constaté que le chauffeur tournait en boucle autour du rond-point en face de l’hôpital Dalal Jamm de Guédiawaye. J’ai compris qu’il avait du mal à suivre le trajet défini par la géolocalisation. J’ai dû lui indiquer la voie la plus rapide pour rallier Yoff. Je pense que ce problème ne se poserait pas avec les taxis jaune-noir qui, quoique l’on puisse dire, ont une parfaite connaissance des artères de Dakar», confie cet habitant de Pikine Guinaw Rail.
D’ailleurs, un quiproquo oppose les Vtc et le syndicat des taxis jaune-noir. Parmi les voitures inscrites sur les plateformes de Vtc, il y en a qui font du transport irrégulier ; dénoncent les chauffeurs de taxis. En effet, tous ne disposent pas de la licence et de l’assurance qui leur donnent le droit de faire du transport au même titre que les taxis. Certains chauffeurs des Vtc usent de subterfuges pour passer les contrôles routiers parfois avec la complicité des clients.
A la base, les taxis jaune-noir utilisaient les plateformes de Vtc. Mais selon Moussa Dia, président du regroupement des taxis urbains du Sénégal, les applications de Vtc n’ont pas respecté les accords de rémunération convenus avec les chauffeurs de taxis. Cela a conduit au retrait de ces derniers qui sont retournés à la vieille méthode, en roulant au gré du vent à la recherche de clients. La conséquence immédiate a été leur remplacement par des véhicules particuliers. Et souvent il s’agit de chauffeurs particuliers disposant de leur véhicule mais ne remplissant pas les conditions. Une fois, l’infraction constatée, il s’agit de ne pas se faire démasquer par les agents de la circulation.
Transport irrégulier
Amadou Seck (nom d’emprunt) explique son astuce pour ne pas être arrêté. Il n’a que le permis de conduire, l’assurance pour véhicule particulier et la carte grise. «Si par chance, j’ai un client coopératif, je lui demande de bien vouloir s’asseoir devant, à mes côtés. Ensuite, j’essaie de retenir son nom et lui donne le mien. C’est pour éviter que l’agent de circulation ne soupçonne que je fais du transport irrégulier parce que les clients ont l’habitude de se mettre à l’arrière. Au cas où le policier aurait des doutes et qu’il me demande le nom du client pour être sûr que je le connais, alors je lui dis qu’il fait partie de la famille. Ça augmente les chances de passer le contrôle», raconte-t-il avec beaucoup d’humour. Amadou Seck précise que le stratagème ne marche pas à tout les coups, mais il prend toujours ses dispositions.
Il n’est pas le seul à user d’une telle ruse pour ne pas être immobilisé pour transport irrégulier. Aïssatou Diop a été témoin d’une scène similaire. Habitante de Keur Mbaye Fall, un chauffeur lui a demandé de se mettre devant lors d’un trajet entre Thiaroye et Pikine. Cependant, elle n’a pas répondu favorablement à l’invite du conducteur. « C’était la première fois que j’étais dans une voiture et que le chauffeur me demande de me mettre sur le siège avant à côté de lui. J’ai tiqué un instant, mais par la suite il m’a expliqué que c’était pour éviter de se faire arrêter par la police. J’ai immédiatement pensé qu’il y avait un souci. Mais non, c’était juste un transport irrégulier », raconte la jeune mère.
dossier réalisé par Assane FALL