Fondée en 1964 à Khartoum par vingt-cinq pays africains, la Banque africaine de développement (Bad) célèbre aujourd’hui plus de 60 ans d’engagement pour l’unité et la croissance économique du continent. Ce 29 mai, alors que le président Akinwumi Adesina s’apprête à céder son fauteuil après deux mandats, retour sur une institution clé de l’Afrique indépendante.
En septembre 1964, à Khartoum au Soudan, vingt-cinq représentants africains réunis signent un accord historique qui donne naissance à la Banque africaine de développement. Cette institution nouvelle incarne la volonté des États africains, récemment indépendants, de reprendre en main leur destin économique, de lutter contre la pauvreté et de favoriser la solidarité continentale. Elle s’inscrit dans une époque d’effervescence politique marquée par la création de l’Organisation de l’unité africaine (Oua) en 1963, symbole de l’ambition panafricaine.
Dès 1958, la conférence réunissant les présidents Tubman (Libéria), Nkrumah (Ghana) et Touré (Guinée) avait posé les bases d’une collaboration africaine renforcée. Cette volonté prit forme lors des conférences de Monrovia (1961) et Lagos, qui préparèrent la création de la BAD. Un comité des Neuf experts, issus de pays diversifiés du continent, organisa la réflexion et la promotion du projet auprès des gouvernements africains et partenaires internationaux.
Des débuts modestes mais ambitieux
Le traité instituant la Banque entre en vigueur en septembre 1964. Après une installation temporaire à Addis-Abeba, la Bad s’installe en 1965 à Abidjan, en Côte d’Ivoire. Son premier président, Mamoun Beheiry, ouvre la voie à une institution qui financera ses premiers projets dès 1966-1967, notamment en Sierra Leone et au Kenya. Progressivement, des fonds concessionnels sont créés, comme le Fonds africain de développement en 1972, qui étend la participation à des pays non africains.
Au fil des décennies, la BAD a su s’adapter aux défis du continent : conflits, réformes institutionnelles, pauvreté, intégration régionale. Elle a renforcé sa coopération avec les gouvernements, les institutions internationales, les Ong et les acteurs locaux, plaçant l’inclusion, l’éducation, et l’autonomisation des femmes au cœur de ses priorités. Des initiatives majeures comme le Nepad ont vu la Bad comme un pilier financier et stratégique.
Plus de 4100 projets financés
Après une relocalisation temporaire à Tunis entre 2003 et 2013 pour raisons politiques, la Banque est revenue à Abidjan en 2015, avec près de 2000 employés et une solide notation financière AAA, attestant de sa crédibilité. En cinquante ans, la Bad a financé plus de 4100 projets à travers le continent, contribuant à transformer les économies africaines.
Malgré les progrès réalisés, l’Afrique fait face à des enjeux majeurs : développement durable, changement climatique, inégalités sociales, instabilité régionale. La BAD poursuit sa mission fondatrice en s’appuyant sur l’innovation, la mobilisation des ressources et la coopération internationale. Ce 29 mai, le continent suit avec attention l’élection d’un nouveau président, qui succèdera à Akinwumi Adesina après deux mandats marqués par des réformes importantes.
Cheikh Tidiane NDIAYE