Ce mardi 05 aout 2025, s’est ouvert, au Centre international de conférences Abdou Diouf (CICAD), le premier forum national destiné au secteur de l’horticulture. Cette rencontre, qui vise à faire un état des lieux exhaustif de ce secteur et à formuler des recommandations fortes, a été présidée par les ministres de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Élevage, Mabouba Diagne, et de l’Industrie et du Commerce, Serigne Gueye Diop.
Le ministre Serigne Gueye, qui a présidé aux côtés de son collègue, a indiqué que l’avenir de ce pays repose sur l’agriculture et l’industrie, car elles constituent 60 à 70 % du PIB. Toutefois, malgré l’importance et le potentiel que recèle le secteur de l’horticulture, cet avenir semble être compromis par des défis persistants qui l’obstruent, voire le retardent. « Ce secteur souffre depuis de longues années d’une sous-production (le faible rendement à l’hectare) et des dégâts liés aux pertes post-récolte », souligne-t-il.
À cet effet, le ministre identifie deux facteurs. D’abord, l’organisation du marché. Le ministre estime que la production arrive en même temps sur le marché. Cette offre, selon lui, ne correspond pas à la demande. Pour y remédier, il insiste sur l’urgence de disposer d’un stockage tampon (buffer).
« Il nous faut ce stockage tampon. Ce dernier, on n’a jamais réussi à le faire en 65 ans », a-t-il regretté.
L’autre aspect demeure la qualité. Serigne Gueye Diop affirme que c’est ce défi qui complique l’accès de nos marchés nationaux aux marchés internationaux. « Un projet horticole qui n’est pas bien conditionné, pas bien séché, pas bien stocké ne peut pas être conservé. C’est ce qui fait qu’on a 10, voire 20 %, qui pourrissent au bout de quelque temps », indique-t-il.
À côté de ces défis, le ministre n’oublie pas de citer la faible part de transformation de ces produits horticoles. Le ministre de l’Industrie et du Commerce demeure conscient que le déficit d’infrastructures, de même que la formation industrielle, constitue un obstacle pour booster la chaîne de valeurs.
Le programme froid pour mettre fin aux pertes post-récolte
Ce premier forum, au-delà de faire une radioscopie sans complaisance de la filière horticole, notamment des défis, a été l’occasion pour les ministres Mabouba Diagne et Serigne Gueye Diop de faire des annonces sur les ambitieuses initiatives en cours pour accompagner ce secteur.
Pour faire face à la problématique liée au manque de structures de stockage, Serigne Gueye informe que son ministère et celui de l’Agriculture réfléchissent à une solution définitive : le programme froid pour stocker les produits horticoles. Celui-ci vise à permettre au pays de ne plus perdre un seul kilogramme de pommes de terre, d’oignons ou de tomates. « Nous devons, dans les deux prochaines années, mettre à votre disposition 200 000 à 300 000 tonnes de capacité de stockage ici au niveau du Sénégal », annonce-t-il.
Poursuivant, le ministre rajoute que des discussions sont en cours sur un autre projet de 200 000 tonnes de stockage avec des partenaires. « Dans les deux ans qui viennent, nous aurons la capacité non seulement de stocker ce que nous produisons, mais nous aurons la capacité de transformer ce que nous produisons en production industrielle », rassure-t-il.
Avec ces installations, le ministre s’appuie sur ce levier pour inciter les acteurs du secteur à produire en quantité et en qualité. Selon lui, le retard, c’est au niveau de la transformation.
Résoudre le challenge de la planification agricole
Les deux ministres sont tombés d’accord sur l’urgence d’arriver à une planification agricole. « Le problème de l’horticulture demeure, en partie, l’absence de planification », pense Serigne Gueye Diop.
Selon lui, tout le monde sème et récolte au même moment. Alors qu’il croit fermement qu’il est parfaitement possible, dans les conditions climatiques de Podor, de Potou, de Sandiara, de la zone des Niayes, de réorganiser le calendrier cultural. « Nous savons bel et bien que nous pouvons déplacer notre calendrier cultural de 3 à 4 mois, ce qui fait naturellement que nous aurions une production étalée sur 6 mois ou plus », plaide le ministre.
Pour ce faire, Serigne Gueye Diop dit avoir sollicité l’Agence de régulation des marchés (ARM) pour travailler sur un programme national de couverture des besoins de stockage. Selon le ministre, il urge de réfléchir à un autre modèle, car celui en place ne marche pas. Ainsi, le nouveau modèle, dont l’ARM aura la charge de proposer aux producteurs, prendra en compte ces dimensions : une prévision de la demande nationale, une prévision des besoins de l’exportation dans la sous-région, à l’international, et également la transformation. « Si la production nationale dépasse la planification proposée par l’ARM, des problèmes vont se poser », souligne Mabouba Diagne.
Le ministre, dans le développement du secteur horticole, s’engage à accompagner les acteurs à implanter des unités de transformation dans les fermes (des PME). « Nous souhaitons que les petits producteurs se regroupent pour être de grands producteurs que nous pourrons appuyer, comme à l’image du Maroc », invite-t-il.
Mohamed DIÈNE