Face à un niveau d’endettement plus élevé que prévu, l’État sénégalais est contraint de revoir ses ambitions économiques. Entre arbitrages, relance et recherche de financements, les défis sont nombreux. « Quand on gouverne, on doit planifier. Mais encore faut-il s’adapter au contexte », avertit Khadim Bamba Diagne, qui fait face à la Convention des jeunes reporters du Sénégal, vendredi 25 juillet 2025.
Alors que les autorités pensaient maîtriser le niveau d’endettement autour de 73 % du Pib, des données récentes montrent que ce taux pourrait être bien plus élevé, fait savoir l’économiste. Une situation qui impose des arbitrages difficiles. « Si on vous dit qu’elle est plus importante, vous ne pouvez plus avoir les mêmes ambitions. Il faut avoir le courage de faire des arbitrages », explique-t-il.
Ces arbitrages sont dictés par une mécanique implacable : plus un pays est endetté, plus sa note souveraine diminue, fait constater l’économiste. « Et la note, ce n’est pas du subjectif. C’est du quantitatif. Les agences comme Moody’s, Fitch ou Standard & Poor’s ne notent pas selon leur humeur. Elles se basent sur des chiffres », précise le secrétaire permanent Cos Petro-Gaz.
Une mauvaise note signifie des taux d’intérêt plus élevés, une prime d’assurance plus lourde, et donc un coût de la dette plus important, fait savoir le sécretaire permanent du Cos-Petro Gaz.
Dans ce contexte, l’État cherche à se repositionner. Un plan de redressement est en préparation. « Ce document n’est pas encore public, il sera présenté par le Premier ministre vendredi prochain. Il n’est pas élégant d’en parler avant lui. Mais une chose est claire : il faut une stratégie nouvelle », renseigne l’économiste.
Le recours aux marchés financiers pose aussi question. « Quand l’État lève des fonds sur le marché régional, il assèche les ressources disponibles pour le secteur privé. C’est l’effet d’éviction. L’investissement public chasse l’investissement privé », fait-il constater. Si l’État emprunte massivement, les entreprises doivent offrir des taux plus élevés pour accéder aux fonds restants, ce qui renchérit leurs coûts et ceux des produits.
Quant aux eurobonds, leur attrait est tempéré par le risque perçu : « Sur les marchés internationaux, si la visibilité sur l’économie sénégalaise est faible. Les investisseurs exigent donc une prime d’assurance très salée ».
D’où la préférence pour le marché régional, plus sécurisé,selon Dr Khadim Bamba Diagne : « Sur la Brvm, c’est la Bceao qui couvre le risque. Les taux d’intérêt y sont compris entre 5 et 7 %. C’est moins coûteux ».
Face à une dette « énorme » et à une marge de manœuvre réduite, la priorité est claire. « Il ne faut plus perdre du temps à débattre de la dette. Elle est là. Il faut maintenant penser à la dépasser », souligne le Dr Khadim Bamba
Daouda DIOUF