Les vieilles voitures, les frigidaires, les téléviseurs, fers de bâtiments ou encore les vieux ventilateurs, les ferrailleurs savent trouver de l’intérêt dans ce que la plupart considère comme des vieilleries rouillées. Ils les ramassent ou parfois les rachètent afin d’aller revendre cela pour quelques pièces.
« Il n’y a pas de sot métier », a-t-on pour coutume de dire. Les ferrailleurs connaissent bien l’importance de cet adage. À la Zone de captage, ferrailleurs, manœuvres ou encore mécaniciens essaient de gagner honnêtement leur vie. Gana Sène est dans le métier depuis plus de dix ans. Assis sur une chaise en métal devant sa chambre construite en baraque, il est à l’affût de potentiels revendeurs. Entouré de tas d’objets en fer, ce bric-à-brac n’a pas l’air de déranger le sieur. Habillé d’un t-shirt à la blancheur douteuse et d’un pantalon délavé, il se laisse bercer par cette mélodie en sourdine. Dans sa solitude, les poèmes du guide du mouridisme lui tiennent compagnie. « Je vis seul. Ma femme et mes quatre enfants sont restés au village », explique-t-il. Ce ressortissant de la région de Diourbel, a du mal à vivre de son gagne-pain : « Ces derniers temps, je tire le diable par la queue. Les temps sont durs », se désole-t-il. Des difficultés, le sieur n’en manque pas : « Dans notre métier, nous sommes confrontés aux risques de tétanos. Nous ne nous faisons vacciner qu’une fois malade », narre-t-il.
Le prix de la survie
Les cheveux poussiéreux, les mains crasseuses, les habits noircis par la saleté, ces ferrailleurs viennent de finir leur journée. À quelques pas du repère de Gana, certains procèdent à la pesée de leur collecte du jour tandis que d’autres discutent tout en attendant leur paye. Les brouettes sont déjà garées. Une pile de fers de bétons rouillés est entreposée dans un coin. « Je suis ferrailleur depuis bientôt onze ans. La ferraille est vendue à 100fcfa le kilo », explique Serigne Saliou Diouf. Ce ressortissant de la région de Fatick déplore le prix du fer.« C’est scandaleux ! Il faut qu’on augmente le prix du fer, car il n’y a pas de bénéfices », fulmine-t-il. « C’est vrai ! », rétorque un de ses camarades.
Si la journée vient de terminer pour ces derniers, ce n’est pas le cas pour Alioune Thiaw. Allongé sur un tas de sable, tout en sueur, ce jeune âgé de 19 ans, se repose afin de reprendre des forces. Habillé d’un pantalon déchiré et d’un t-shirt noirci par la crasse, Alioune traîne une vilaine blessure au pied. Mais il n’y prête pas attention, pris de fatigue. « J’ai commencé la récupération depuis un mois. Je viens tout juste de commencer ma journée et je me suis arrêté pour me reposer ». Tous les jours, ce jeune homme sillonne les ruelles à la recherche du fer. Pour l’instant, la collecte n’a encore rien donné, comme en atteste sa brouette vide qu’il a garée à côté de lui. « Je quitte Mermoz chaque matin », confie-t-il. Alioune est entré dans le métier par accident : « Mon frère est dans la récupération. J’ai abandonné l’école. C’est par la suite qu’il m’a proposé de travailler avec lui », explique-t-il. Ce travail est loin d’être une partie de plaisir pour Alioune.«C’est très pénible ! Malheureusement, je n’ai pas encore trouvé mieux », dit-il d’un air navré. Comme quoi, le métier ne paye pas de mine !
Arame NDIAYE