La Journée nationale du Sénégal à l’Exposition universelle d’Osaka s’est achevée par un forum sénégalo-japonais. Le chef de l’Etat, ainsi que le ministre de l’Industrie et du Commerce et le Directeur général de l’Apix ont exposé à des entrepreneurs japonais réunis au sein du Jetro, les potentialités économiques du pays tout en les invitant à venir les saisir.
Elle s’était ouverte sur des airs de musique, elle s’est refermée sur une note économique. La Journée nationale du Sénégal, hier, à Osaka, dans le cadre de l’Exposition universelle que cette ville accueille depuis le 13 avril dernier, fut dense en activités. Dans la foulée de la cérémonie d’ouverture, le chef de l’Etat a présidé, dans l’après-midi, un forum économique d’envergure qui a vu des investisseurs japonais y participer largement. Devant cet aéropage d’entrepreneurs nippons réunis au sein de la puissante Japan external trade organization (Jetro) – organisme para-gouvernemental pour la promotion des échanges et des investissements -, le président de la République a réaffirmé la place du Sénégal comme partenaire stratégique du Japon et présenté sa vision pour une coopération économique renouvelée. « Les relations entre le Sénégal et le Japon ne datent pas d’hier.
Depuis plusieurs décennies, elles se nourrissent d’échanges fructueux dans les domaines de l’éducation, de la santé, des infrastructures et de l’innovation. Pour Dakar, le Japon incarne un modèle de développement basé sur la valorisation du capital humain et l’intégration harmonieuse des avancées technologiques dans l’économie nationale. En retour, le Sénégal souhaite offrir au Japon un partenariat ancré dans la stabilité politique, la confiance institutionnelle et une ouverture économique résolument tournée vers l’avenir, a déclaré Bassirou Diomaye Faye. Il demeure persuadé que « le développement ne peut être durable que lorsqu’il repose sur la complémentarité des forces de chaque partenaire », insistant sur l’idée d’une coopération gagnant-gagnant.
L’Afrique en mutation, le Sénégal
en vitrine Avec plus d’un milliard d’habitants, dont près de 60 % ont moins de 25 ans, l’Afrique est en pleine mutation. La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) offre de nouvelles perspectives pour l’industrialisation, le commerce intra-africain et l’intégration économique régionale. Le Sénégal, par sa situation géographique et son rôle de carrefour en Afrique de l’Ouest – un marché de 400 millions de personnes -, se positionne comme une vitrine de cette transformation.
« Le pays veut incarner une Afrique moderne, loin des clichés réducteurs, et offrir aux investisseurs internationaux un environnement propice à l’innovation, à la création de valeur et à la prospérité partagée », a-t-il assuré. Ainsi, le président n’a pas hésité à insister sur les secteurs porteurs qui font du Sénégal une destination attractive. Il a cité l’énergie avec les récentes découvertes de pétrole et de gaz qui sont en passe de faire du Sénégal un acteur énergétique majeur. Mais il mise également sur les énergies renouvelables (solaire, éolien, hydroélectricité, géothermie) pour bâtir une transition énergétique durable. Dans le domaine de l’agriculture, le président de la République soutient que le Sénégal ambitionne de nourrir sa population croissante tout en contribuant à la sécurité alimentaire mondiale. De ce point de vue, l’accent est mis sur l’agriculture de précision, l’irrigation moderne et la transformation agroalimentaire.
A cette liste, il a ajouté les infrastructures, la santé, la formation professionnelle Pour rassurer les investisseurs, le président de la République leur a annoncé que le Sénégal a engagé, depuis plusieurs années, des réformes profondes pour moderniser son économie et améliorer son environnement des affaires. Il en veut pour preuve la digitalisation des services publics, la simplification administrative, les incitations fiscales, les infrastructures modernes. « Tout concourt à faire du Sénégal une destination compétitive. Cette volonté est soutenue par une stabilité politique rare dans la région et une vision économique claire, portée par la stratégie « Vision 2050 », qui fixe les grandes orientations de développement dans un horizon de 25 ans.
Une nouvelle ère de coopération avec le Japon
Au-delà des opportunités, le Forum d’Osaka a surtout posé les bases d’une nouvelle étape dans la coopération sénégalo-japonaise. Celle-ci se veut plus concrète, orientée vers des projets d’investissement transformateurs et structurants. « Ensemble, écrivons un chapitre mutuellement bénéfique de notre partenariat économique, au service des générations futures », a conclu le chef de l’Etat, soulignant que le Japon trouvera au Sénégal un partenaire dynamique, innovant et résolument tourné vers l’avenir. Ishiguro Norihito, président du Jetro, a rappelé la tradition démocratique du Sénégal, un pays qui incarne des valeurs « inspirantes ». Il a réaffirmé la volonté de sa structure d’être toujours aux côtés du Sénégal en cherchant notamment à collaborer avec les entreprises sénégalaises. Son compatriote Matsumoto Masayochi lui a emboîté le pas non sans saluer la décision du Sénégal d’ouvrir un pavillon autonome.
Des relations solides, mais un potentiel encore sous-exploité
Au-delà des mots, le Directeur général de l’Apix, chargé de présenter les opportunités d’investissement au Sénégal de manière holistique, a eu recours aux chiffres et aux faits pour donner une idée plus concrète de l’état de la coopération entre le Sénégal et le Japon. En effet, selon Bakary Séga Bathily, si les échanges commerciaux entre les deux pays ont atteint 163 millions de dollars en 2023, leur volume reste en deçà des potentialités offertes par les deux économies. « Le Sénégal exporte principalement des matières premières (or, produits agricoles, ressources minières), tandis que le Japon fournit surtout des véhicules, des machines industrielles, des produits chimiques et des équipements électroniques. Ce déséquilibre illustre la nécessité de diversifier et d’intensifier les investissements japonais au Sénégal », a-t-il souligné.
Au-delà du commerce, le Dg de l’Apix s’est félicité du fait que la coopération bilatérale s’illustre depuis plus de quarante ans à travers le Centre de formation professionnelle et technique Sénégal–Japon, qui a déjà formé plus de 7.000 jeunes Sénégalais grâce à un investissement cumulé de 44 millions de dollars. Cette réussite a récemment conduit les deux pays à élargir leur partenariat dans le cadre de la stratégie « Sénégal 2050 », qui met l’accent sur le développement du capital humain. L’objectif affiché est de former plus de 5 millions de jeunes d’ici 2050 pour répondre aux défis économiques et technologiques à venir. Avec la Vision Sénégal 2050, le pays vise, selon lui, une croissance annuelle moyenne de 6,5 % jusqu’en 2029, une réduction du taux de pauvreté à moins de 10 % et une amélioration significative de son indice de développement humain. « Notre ambition est claire : transformer localement nos richesses, diversifier notre économie et bâtir des partenariats solides avec nos amis japonais », a-t-il conclu, appelant Tokyo à saisir les opportunités offertes par un pays jeune, stable et résolument tourné vers l’avenir.
Par Elhadji Ibrahima THIAM, envoyé spécial à Osaka