La réforme du Code des douanes vise, entre autres, à mieux prendre en compte la fiscalité de l’économie numérique. C’est ce qu’a indiqué Papa Thialaw Fall, directeur de la Réglementation et de la coopération internationale des Douanes sénégalaises.
La prise en compte de la fiscalité de l’économie numérique est l’un des axes majeurs de la réforme en cours du code des douanes, selon Papa Thialaw Fall, directeur de la Réglementation et de la coopération internationale à la Direction générale des Douanes. Il prenait part, hier, à un panel dans le cadre de la conférence internationale sur la fiscalité de l’économie numérique tenue à Dakar du 15 au 16 avril. « Nous sommes en train de réformer le Code des douanes pour prendre en compte le commerce électronique », a ainsi déclaré M. Fall. Pour intégrer le commerce électronique, la Douane travaille sur un partenariat avec les plateformes de commerce en ligne. Thialaw Fall suggère alors d’élargir le dispositif d’Opérateur économique agréé (Oea) aux acteurs du commerce électronique.
Lancé en 2024, ce dispositif permet de soustraire les grandes entreprises qui présentent certaines garanties, du point de vue de la conformité légale, de l’obligation de passer par les bureaux des douanes. Les Douanes sénégalaises entendent aussi poursuivre l’informatisation des bureaux des douanes de l’intérieur du pays et ont récemment lancé la phase test du transit informatisé vers le Mali. Civisme fiscal Toutefois, il faut prendre en compte la complexité des services financiers numériques, explique Nuno Felix, ancien directeur général adjoint des Impôts et des Douanes du Portugal, soulignant que plusieurs entités interviennent dans une transaction en ligne. Il recommande aux pays africains de « capitaliser sur leurs lacunes » en matière de fiscalité, citant l’exemple du Cabo Verde qui a « l’un des systèmes les plus avancés grâce à l’utilisation de l’Intelligence artificielle » et le Portugal qui exige des entreprises de faire leurs déclarations fiscales en ligne afin de minimiser les flux financiers illicites. Le Bénin aussi applique une fiscalité indirecte de 5 % sur la commission perçue par les Émetteurs de monnaie électronique (Eme).
Un autre pays africain, le Ghana, a lancé, en 2022, une plateforme digitale, le e-levy, permettant de collecter une taxe de 1,5 % de la valeur des transferts électroniques. Mais, à en croire Vishal Gujadhur, directeur adjoint en Politique de développement et finance à la Fondation Gates qui accompagne le Ghana dans ce projet, beaucoup de contribuables ont quitté la plateforme pour échapper à l’impôt. Ceci pose le problème du civisme fiscal en Afrique et justifie l’exploration de « nouvelles approches ». Beaucoup de participants invitent à s’inspirer de la Finlande où les citoyens se définissent comme des « happy taxpayers » (des gens heureux de payer l’impôt), avec un taux d’imposition le plus élevé au monde.
« L’enjeu d’un élargissement de l’assiette et du civisme fiscal est plus crucial que la crise de la dette qui frappe plusieurs pays africains et est intimement liée à la fiscalité », a expliqué le Dr Patrick Olomo, directeur par intérim du Département développement économique, intégration et commerce à la Commission de l’Union africaine (Ua). Pour rappel, les résultats de la conférence de Dakar seront présentés pour approbation au 4e sous-comité de l’Union africaine sur la fiscalité et les Flux financiers illicites (Ffi), prévu à Lusaka, en Zambie, du 12 au 16 mai 2025, et devraient servir de position commune de l’Afrique lors des négociations pour l’adoption d’une Convention-cadre des Nations unies pour la réforme fiscale mondiale dont les négociations sont prévues en août 2025.
Seydou KA