Le Sénégal, dans le cadre de sa stratégie de transformation économique, a mis en place le Programme national de développement des Agropoles du Sénégal (PNDAS).
Ce projet vise à bâtir des pôles agro-industriels intégrés sur l’ensemble du territoire afin de doter le pays d’une véritable industrie agroalimentaire, capable de transformer localement les productions agricoles, créer des emplois et réduire les importations.
Cinq pôles agro-industriels pour valoriser les territoires
Cinq zones sont ciblées : Centre, Nord, Sud, Ouest et Est, chacune jouant un rôle de catalyseur pour les chaînes de valeur agricoles. Intégrées dans la Vision 2050 – Agenda national de transformation, les agropoles reposent sur quatre piliers : économie compétitive, aménagement durable, équité sociale et gouvernance renouvelée.
Chaque pôle dispose de priorités et de financements propres :
Pôle Centre (Kaolack, Diourbel, Fatick, Kaffrine) : arachide, céréales, sel – 108 milliards FCFA.
Pôle Sud (Ziguinchor, Kolda, Sédhiou) : mangue, anacarde, maïs – 57 milliards FCFA.
Pôle Ouest (Thiès) : légumes, fruits, viande, lait – 56 milliards FCFA.
Pôle Nord (Louga, Saint-Louis, Matam) : riz, oignon, tomate, viande – 189 milliards FCFA.
Pôle Est (Tambacounda, Kédougou) : banane, fonio, maïs. (montant non spécifié)
Soutenu par la BAD, la BID, Enabel et l’État, le programme vise la montée en valeur ajoutée, la substitution aux importations et la création d’emplois jeunes et femmes. Selon le gouvernement, les deux premiers pôles – Sud et Centre – devraient générer 350 000 emplois directs et indirects, selon les estimations du Conseil des ministres du 23 juillet 2025.
Une politique industrielle portée par la Vision Sénégal 2050
Le Premier ministre Ousmane Sonko souligne que « les agropoles, véritables moteurs du développement agroalimentaire, faciliteront l’accès des producteurs aux industries de transformation et réduiront les pertes post-récolte ». Elles deviendront « des vecteurs d’innovation technologique ». En ce sens, elles s’inscrivent dans l’axe 1 de la Vision 2050 (souveraineté économique et alimentaire) et l’axe 3 (création d’emplois durables).
Invité de l’émission Nay Ler (RTS1, 17 octobre 2025), le ministre de l’Industrie Serigne Guèye Diop a affirmé que « la mise en place des pôles est la véritable politique industrielle du gouvernement ». Selon lui, « le rôle de l’industrie, c’est de transformer nos produits en richesse ». Il a cité l’exemple de l’anacarde : « vendue 700 F, elle peut valoir 15 000 F une fois transformée ».
Le ministre prévoit 25 sites industriels dans les agropoles du Sud et du Centre entre 2025 et 2029, avant une extension à d’autres régions. Il a insisté sur la nécessité d’un foncier sécurisé et attractif, ainsi que sur la transformation horizontale et verticale, « de la mangue jusqu’au jus de mangue ».
Des fondations solides et inclusives
Le taux de transformation agricole du Sénégal est inférieur à 15 %, contre plus de 90 % dans certains pays, illustrant le potentiel à exploiter. Selon la BAD, le pôle Sud a été conçu pour être inclusif, avec 50 % des emplois réservés aux femmes et 60 % aux jeunes. Des conventions, comme celle de 190 millions FCFA avec la CNAAS pour assurer les filières arachide, céréales et sel, témoignent de l’accompagnement technique du programme.
Le ministre rappelle que « nous importons encore presque tout ce que nous mangeons, et cela nous rend fragiles ». Les principaux défis concernent la sécurisation des intrants, la formation des PME/PMI, la mobilisation de l’investissement privé et la durabilité des infrastructures. Une gouvernance territoriale solide, un foncier sécurisé et une bonne connectivité seront essentiels.
Une ambition portée par le régime de Bassirou Diomaye Faye
Sous la direction du président Bassirou Diomaye Faye et du Premier ministre Ousmane Sonko, l’État a fait de l’industrialisation un pilier central de la politique économique. Les agropoles traduisent la volonté de passer du « cultiver et vendre » au « cultiver, transformer, valoriser et exporter ».
L’enjeu est de faire des agropoles un vecteur de souveraineté alimentaire, d’autonomie économique et de création d’emplois durables. Le succès de ce programme pourrait redéfinir le modèle agricole et industriel du Sénégal.
Par Cheikh Gora DIOP