«L’économie sénégalaise a été sanctionnée par l’agence américaine Standard & Poor’s ». L’annonce a fait les choux gras de la presse. Dans le document, il est précisé que « la note souveraine du pays a été dégradée, passant de « B+ » à « B », assortie d’une perspective négative ». Les notes « b » indiquent de faibles perspectives de viabilité continue.
Le risque de défaillance matérielle est présent, mais une marge de sécurité limitée demeure. Que signifie réellement notation financière ? Appelée aussi notation de la dette, elle représente l’appréciation, par une agence de notation financière du risque de solvabilité financière d’un État, d’une collectivité publique, nationale ou locale. Elle peut aussi concerner une opération de financement, d’emprunt… Leur rôle est donc de mesurer le risque véhiculé par la dette. Cette mesure du risque doit permettre d’évaluer la probabilité que la dette encourue ne soit pas remboursée. Pour les investisseurs, la notation financière constitue l’un des critères clés dans l’estimation du risque, particulièrement dans le cadre de marchés financiers.
Pour le moment, les agences de notation ne sont pas nombreuses dans le monde. Il y a les agences Moody’s, Standard and Poor’s, Fitch Ratings et la principale agence chinoise, Dagong Global Credit Rating, ainsi que d’autres agences syndiquées. Il arrive également qu’au niveau interne, des banques mettent en place des systèmes de notation internes, pour leur propre usage, et s’appuient sur les données statistiques en leur possession.
Aujourd’hui, elles sont devenues centrales dans le fonctionnement normal des marchés de la dette, et donc une composante essentielle du système financier dans son ensemble. Aujourd’hui, un pays qui figure plus bas dans le classement devra attirer les prêteurs par un taux d’intérêt plus généreux. Autrement dit, un risque plus important de défaut de paiement s’accompagne d’un taux d’intérêt plus élevé. Cependant, malgré l’attention particulière accordée à la notation financière, malgré une place de plus en plus importante dans le système financier, la notation fait l’objet de critiques, notamment en Afrique. Beaucoup de spécialistes estiment que certaines agences de notation exagèrent sur les facteurs de risque sur le continent.
En effet, très souvent, les notes publiées décuvent des situations peu reluisantes du continent réduisant l’accès aux marchés internationaux ou s’ils le font, c’est à des taux prohibitifs, eu égard à l’ampleur du risque décrit par l’agence de notation. Une situation qui n’a pas manqué d’attirer l’attention des autorités africaines. « Pour mettre fin aux injustices subies par les pays du continent », comme l’ont martelé beaucoup de chefs d’État, l’Union africaine a décidé de lancer une agence de notation financière africaine au deuxième semestre 2025 pour répondre aux préoccupations des pays du continent face aux évaluations « parfois arbitraires » des grandes agences internationales. L’objectif est d’en faire « l’une des principales institutions financières qui va œuvrer à équilibrer la position du continent dans l’architecture financière mondiale.
Une entité indépendante et pilotée par le secteur privé, dont le principal atout sera une sensibilité au contexte, qui lui permettra de générer des informations plus complètes sur le profil de crédit en utilisant des experts compétents basés en Afrique et en bénéficiant d’un accès relativement meilleur aux données ». Il est important de rappeler que la création de cette agence de notation africaine avait été soulevée en septembre 2023, mais sa matérialisation se fait toujours attendre. Quel crédit cette agence aura-t-elle face aux agences de renommées internationales ?
Le marché financier prendra-t-il le risque de changer de fusil d’épaule ? Le pourra-t-elle face aux agences déjà reconnues par les institutions internationales ? Les questions sont nombreuses. Les réponses en suspens.
Par Oumar FÉDIOR
oumar.fedior@lesoleil.sn