Face à un système fiscal jugé inéquitable, le nouveau régime prévoit une réforme ambitieuse du code des impôts et des douanes. Objectif : élargir l’assiette fiscale sans augmenter les taxes. L’interopérabilité est au cœur de cette transformation. Explications.
Au Sénégal, le poids de l’impôt repose principalement sur les travailleurs et quelques grandes entreprises. Une situation qui freine l’embauche et alourdit les charges pour les sociétés déjà établies. Pour remédier à cela, les nouvelles autorités envisagent de réformer profondément le code des impôts et des douanes, en misant sur un concept majeur : l’interopérabilité.
L’interopérabilité comme levier d’efficacité fiscale
Amadou Ba, député de Pastef, explique ce mécanisme : « Il y a beaucoup de gens qui échappent aux impôts. Aujourd’hui au Sénégal, l’impôt est supporté en grande partie par les travailleurs et quelques entreprises. Pour les entreprises, quand tu les imposes fortement, elles ne peuvent pas recruter. Maintenant, qu’est-ce qu’on a décidé ? On ne va pas augmenter les impôts, mais on va élargir l’assiette fiscale. »
Cette interopérabilité consiste à croiser les fichiers de la Douane avec ceux des Impôts. Amadou Ba illustre cette idée par un exemple concret : « Avant, quand quelqu’un amène dix conteneurs au Sénégal, il n’était connu que par la Douane, pas par les Impôts. Mais si on croise les fichiers, les Impôts sauront que X a fait entrer 10 conteneurs au Sénégal. Et dans ce cas de figure, les Impôts sauront que X a eu une activité économique soutenue. Donc il doit payer sa part contributive. »
Une réforme sans hausse d’impôts
L’enjeu est de taille. Selon Amadou Ba, l’interopérabilité permettra aux services fiscaux d’avoir une vue d’ensemble sur les activités économiques qui échappaient auparavant au fisc : « Les impôts n’auront plus à rechercher ces gens, il suffit d’un clic avec l’interopérabilité pour que tous les fichiers de la douane arrivent aux impôts. » Il s’agit donc de faire contribuer les acteurs économiques à leur juste mesure, sans les accabler par une augmentation de la pression fiscale.
Cette réforme vise avant tout à renforcer les ressources de l’État pour financer les infrastructures essentielles : hôpitaux, routes, écoles… Amadou Ba insiste : « Ce n’est pas l’impôt qui tue l’activité économique, car chacun de nous voudrait qu’on ait des hôpitaux, des routes, des écoles de qualité. »
Toutefois, la réussite de cette réforme dépendra de plusieurs facteurs, notamment la volonté politique, la modernisation des infrastructures technologiques, et l’adhésion des contribuables. Pour l’instant, l’interopérabilité reste un chantier en cours, mais les autorités semblent déterminées à en faire un outil essentiel pour une fiscalité plus juste et plus efficace.
Cheikh Gora DIOP