Le ramadan de cette année coïncide avec la période de la chaleur à Tambacounda. C’est pourquoi, au moment de la rupture du jeûne, les populations boivent beaucoup d’eau fraîche. Du coup, la vente de glace est devenue un business très lucratif qui attire de nombreux jeunes des villages environnants.
TAMBACOUNDA – Depuis le début du ramadan, ils sont omniprésents dans le décor de la ville, à Tambacounda. Il s’agit des mototaxis supportant une grosse glacière. En effet, le mois de jeûne est un moment de traite pour ces revendeurs de glace alimentaire. Beaucoup d’habitants des villages environnants s’adonnent à cette activité. Habillés en pull ou en blouson, chaussures fermées, casquette sur la tête, ces jeunes ont parcouru des dizaines de kilomètres avant d’arriver dans la ville de Tambacounda. Sur leurs deux roues, derrière lesquelles ils accrochent une caisse hermétique débordante des deux côtés, ils arpentent les rues de la ville de 8 heures à 17 heures à la recherche de glace. Ils entrent dans les maisons pour s’approvisionner.
Aliou Mbaye, à bord de sa moto, s’apprête à prendre la route pour retourner à Saré Mbondji, dans la commune de Ndoga Babacar, à presque 40 kilomètres de la ville de Tambacounda. Malgré le poids de sa caisse contenant 100 pièces de glace bien attachée, il accepte de nous accorder quelques minutes d’échange. Pour sa marchandise, Aliou a déboursé 10.000 FCfa à raison de 100 FCfa l’unité. Si la plupart de ces « chasseurs de glace alimentaire » sont occasionnellement dans ce business, juste pendant le mois de ramadan, ce n’est pas le cas d’Aliou. Il en a fait une vraie activité pendant les 9 mois de la saison sèche. Une fois que la pluie tombe, le cinquantenaire se tourne vers ses champs. « Ce travail constitue ma principale source de revenu. Seulement pendant l’hivernage, ne pouvant plus faire la navette, du fait de l’impraticabilité de la piste, je m’occupe de mes champs », renseigne-t-il. Il reconnait néanmoins que, pendant le mois de ramadan, la demande est plus forte.
Grâce à ce travail, l’ancien chauffeur a pu se procurer 3 motos et un tricycle. Ce dernier qui peut transporter jusqu’à deux caisses de 100 pièces de glace chacune est souvent utiliser en cette période de jeûne pour répondre aux besoins des populations. Selon Aliou, à Saré Mbodji, seul l’éclairage public est assuré par quelques poteaux solaires éparpillés un peu partout dans le village. Aucune maison n’est encore électrifiée.
Baba Camara, âgé de 35 ans, quant à lui, vient de Gouloumbou, un village nouvellement électrifié, situé à 35 km de Tambacounda. Cependant dans cette localité seules quelques maisons disposent d’un réfrigérateur. « Il y a des frigos à Gouloumbou, mais ils ne sont pas nombreux. Le village vient d’être électrifié », soutient-il.
Ces revendeurs achètent la glace alimentaire à 100 FCfa l’unité en ville pour la revendre à 200 ou 250 FCfa. Malgré la cherté, la glace est vendue comme des petits pains. Souvent les clients s’abonnent pour tout le mois de ramadan. Les vendeurs livrent le produit à domicile. Ces derniers ne sont pas les seuls à se frotter les mains pendant cette période. Leurs clients en ville sont très contents après leur passage. En effet, ils emportent avec eux tout le stock de ces derniers. « J’avais plus d’une cinquantaine de pièces de glace, mais ils ont tout acheté. J’ai même recommandé certains à d’autres vendeurs », indique Mami Camara, vendeuse de glace.
Tambacounda est l’une des régions les plus chaudes du pays avec des températures avoisinant parfois les 42°c. C’est pourquoi la vente de glace alimentaire pendant le ramadan est un véritable business. Les populations ont pour coutume, au moment de la rupture, d’engloutir une ou deux pièces de glace alimentaire dans une carafe à eau disposée à côté des mets. Les factures d’électricité explosent pendant cette période. Dans une maison, on peut compter 3 à 4 frigos fonctionnels. « J’ai 3 réfrigérateurs qui fonctionnent pendant le ramadan. Mais à la fin du mois béni, j’en allume qu’un seul », explique Bineta Kéita. Selon elle, la vente de glace alimentaire, en plus d’être un marché lucratif, allègent considérablement le travail des femmes. ‘’En temps réel après mes travaux ménagers, je me rends à la gare routière pour vendre mes produits. J’y passe toute l’après-midi. Mais pendant le mois de ramadan, je ne bouge pas de chez moi, et j’écoule tranquillement et rapidement mon stock de glace », explique la commerçante.
Cependant, pour beaucoup de revendeurs et leurs clients en ville, ce business commence à perdre de la vitesse. Cette situation est due à l’électrification progressive de plusieurs villages. Comme quoi « le bonheur des uns fait le malheur des autres ».
Boubacar Agna CAMARA (Correspondant)