SUSPENSION DE SERVICES FINANCIERS
Depuis quelques jours, certaines Fintechs subissent une suspension de services financiers au Sénégal et dans d’autres pays de l’Uemoa. La situation découle d’un non-respect de la réglementation en vigueur. Aujourd’hui, les activités de plusieurs structures sont impactées avec des conséquences économiques et sociales.
Ces derniers jours, les Fintechs sont sur le qui-vive, que ce soit au Sénégal ou dans d’autres pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa). Beaucoup d’entre elles sont victimes d’une suspension de services liée à l’absence de mise en conformité avec la réglementation de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (Bceao). Pourtant, dans une note publiée le 19 mars dernier, l’autorité bancaire avait lancé une énième mise en garde. « Une période transitoire de six mois, à compter de la signature de ladite instruction, a été accordée aux structures concernées pour se conformer aux exigences des nouvelles dispositions réglementaires régissant les services de paiement », indiquait le régulateur. Initialement prévue pour s’achever le 23 juillet 2024, cette période a été prorogée jusqu’au 31 janvier 2025 par l’avis de la Bceao du 25 septembre 2024.
À compter du 1er mai 2025, toute structure non agréée conformément aux exigences de l’instruction susvisée doit cesser d’offrir des services de paiement dans l’Umoa. Depuis le 30 avril, certaines Fintechs ne fonctionnent plus normalement. C’est, par exemple, le cas de Change Money qui permettait la conversion entre Wave et Orange. Selon une source financière bien informée, ce n’est pas la Bceao qui a coupé les services des Fintechs, mais plutôt les banques, établissements financiers et émetteurs de monnaie agréés qui ont suspendu leur collaboration avec ces entreprises afin de se conformer eux-mêmes à la réglementation de la Bceao. Il leur est désormais exigé de respecter les normes relatives aux Application programming interfaces (Api), c’est-à-dire les interfaces de programmation. Sans cela, il leur sera difficile de poursuivre leurs activités. « La Bceao n’est nullement l’interlocutrice directe de ces établissements non agréés », estime la même source.
Des conséquences économiques et sociales
Pour Amadou Diawara, Ceo et fondateur de Famib Group, la situation actuelle des paiements dans l’Uemoa, marquée par la suspension brutale des activités des établissements de paiement (Edp) non agréés, plonge l’économie de la région dans une crise profonde et inédite. Il estime que cette situation est due, en grande partie, à des lenteurs administratives. « De nombreuses Fintechs attendent toujours le traitement de leurs dossiers d’agrément malgré l’entrée en vigueur de l’instruction n° 01-01-2024 depuis plus d’un an ». Il souligne que le blocage affecte les salaires, les paiements en ligne et les flux commerciaux. « Des millions de citoyens ainsi que des secteurs comme l’agriculture, la santé, les services et le commerce dépendent de ces types de paiements pour leurs transactions quotidiennes et en souffrent ». M. Diawara en appelle ainsi à une refonte de la régulation des Fintechs dans l’espace Uemoa, afin qu’elle soit plus souple, transparente et mieux adaptée aux réalités du numérique. « La régulation doit avoir pour objectif d’accompagner la transformation. Elle ne doit pas être un frein, mais un levier de développement ».
Demba DIENG