Professeur de sciences physiques à la retraite (décembre 2021), Samba Guissé milite pour une réforme du baccalauréat. Ce spécialiste des Tic, explique qu’il s’agit, à travers celle-ci, de sortir d’un flou institutionnel qui dessert à la fois l’élève, l’enseignant et l’université pour construire un système plus cohérent, plus équitable et plus efficace.
L’enseignant Samba Guissé a pris sa retraite en décembre 2021. Pendant longtemps, il a servi comme professeur de sciences physiques (Lycée Alpha Molo Baldé de Kolda, Lycée Seydou Nourou Tall de Dakar) avant de diriger un programme de la Banque mondiale sur les Tic. Dans un document reçu à la rédaction du « Soleil », M. Guissé plaide pour la réforme du Baccalauréat. Dans le document, il souligne que dans le système éducatif sénégalais, chaque cycle est marqué par un examen national qui certifie les acquis des élèves et organise leur passage au niveau supérieur. Pourtant, a-t-il relevé, une « incohérence structurelle persiste ». Selon l’enseignant retraité, alors que l’entrée en 6e et en seconde se fait sur la base d’un concours ou d’un filtrage, l’accès à l’université reste largement ouvert à tous les titulaires du Baccalauréat, sans sélection ni orientation systématique.
« Ce diplôme tant convoité, censé marquer la fin du secondaire, est devenu un sésame automatique vers l’université, sans sélection, sans orientation structurée, sans prise en compte des capacités d’accueil. Pendant ce temps, les élèves du primaire et du collège doivent, eux, franchir des concours, surmontant filtres et quotas pour accéder au cycle suivant », a indiqué M. Guissé. Il se demande pourquoi une telle exception pour le Bac ? Pourquoi cette rupture de logique au moment le plus décisif du parcours scolaire ? Samba Guissé affirme que cette situation fragilise l’ensemble du système. « Il est temps de rétablir une cohérence éducative, en considérant le Baccalauréat pour ce qu’il est réellement : un diplôme de fin d’études secondaires, et non un droit automatique à l’université », a dit M. Guissé.
Selon lui, à l’heure où les universités débordent, où les jeunes se perdent dans des formations inadaptées, et où l’on peine à valoriser les voies techniques et professionnelles, il devient urgent de repenser le rôle et la gestion du Baccalauréat. À son avis, réformer le Baccalauréat ne signifie pas en affaiblir la valeur, mais lui redonner sa juste place dans l’architecture éducative nationale. « Il s’agit de sortir d’un flou institutionnel qui dessert à la fois l’élève, l’enseignant et l’université, pour construire un système plus cohérent, plus équitable et plus efficace », a confié Samba Guissé. Pour lui, le Bac doit être reconnu comme le point d’aboutissement du secondaire, et non comme un laissez-passer automatique pour l’université. L’enseignant à la retraite est d’avis que c’est à ce prix que nous pourrons réconcilier exigence académique et orientation pertinente, fluidité des parcours et valorisation des talents.
Reconverti comme consultant numérique dans le secteur de l’éducation, ce retraité demande de mettre fin à l’hémorragie silencieuse que constituent les années perdues dans l’enseignement supérieur par manque d’orientation. « C’est en rétablissant une transition juste et bien pensée entre secondaire et supérieur que nous construirons un système éducatif plus performant, plus humain, et mieux aligné avec les réalités de notre temps », a dit le physicien. Samba Guissé a coordonné le programme « World Links for development » de la Banque mondiale. Il a également été « Citizenship manager » de Microsoft pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre avant de devenir directeur d’éducation de Microsoft pour la même région (19 pays). Il fut aussi conseiller informatique au ministère de l’Éducation nationale, et il a travaillé sur le projet « Ressources numériques pour tous » et sur l’outil de gestion « Mirador » du Men.
Aliou KANDE