À l’école, les journées culturelles étaient jadis l’apanage des Foyers socio-éducatifs (Fosco). Organisées de nos jours par les gouvernements scolaires, celles-ci sont de plus en plus dévoyées. Pour preuve, les récentes dérives ponctuées de danses obscènes qui ont émaillées les soirées festives par endroit dans des établissements scolaires. Un phénomène symptomatique lié notamment aux réalités socio-culturelles actuelles impactées de plus en plus par les réseaux sociaux.
« Ce qui se passe actuellement n’a quasiment rien à voir avec la vocation des gouvernements scolaires », affirme Kaba Diakhaté consultant en éducation et ancien vice-président du Groupe Agora pour l’éducation à la citoyenneté (Gra-Redep). M. Diakhaté fait allusion aux récents événements survenus lors des journées culturelles organisées dans des établissements scolaires. Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montraient de jeunes filles exécutant des danses jugées obscènes à l’occasion d’une soirée culturelle dans un établissement scolaire dans le sud du pays. C’était en mai dernier. Le ministère de l’Éducation était monté au créneau pour décrier l’acte en exhortant les chefs d’établissement et les encadreurs des gouvernements scolaires à faire preuve de plus de vigilance et de rigueur. « Ces dérives sont symptomatiques d’un problème plus profond lié essentiellement à deux facteurs. La crise des valeurs que nous vivons dans tous les secteurs de la vie. Le manque de pudeur, du sens de la responsabilité. Des phénomènes qui sont devenus des tares », a expliqué Kaba Diakhaté.
Le deuxième facteur, dit-il, est lié à la démission des adultes. « Tout se passe comme si nous avions peur de nos enfants. Ces enfants qui s’adonnent à des danses obscènes appartiennent à des familles et font ces gestes horribles sous les yeux des enseignants », souligne-t-il. Il estime que le rôle des foyers socio-éducatifs a été dévoyé en un moment dans la vie scolaire. « Le président du foyer scolaire était respecté par ses camarades et avait un dessus psychologique sur eux. À son arrivée, souvent lors des cérémonies, ses camarades lui font une haie d’honneur ».
Il plaide en faveur d’un repositionnement des gouvernements scolaires dans les stratégies d’enseignements, apprentissages, car il demeure convaincu que « la vocation des gouvernements scolaires n’est pas différente de celle des foyers socioéducatifs. « Dans la Charte des foyers socioéducatifs, il était précisé qu’ils constituent des structures de coordination des activités sociales, culturelles et sportives de l’établissement », précise M. Diakhaté.
Compétences transversales
« Le gouvernement scolaire peut aider à améliorer la stratégie concernant l’encadrement des apprenants. Élaborez un plan d’action que le Gouvernement Scolaire mettra en œuvre pour lutter contre ces comportements », a indiqué M. Diakhaté. Le gouvernement scolaire, dit-il, peut inscrire dans son plan d’actions plusieurs activités que les curricula abordent théoriquement : la culture de la paix, la solidarité, le civisme, la civilité, etc. Selon lui, les autorités éducatives doivent mieux encadrer les gouvernements scolaires pour l’élaboration de plans d’actions intégrant des activités citoyennes et de promotion des valeurs ancestrales, civiques, universelles en plus des activités récréatives.
« Jadis, les Fosco accompagnaient les programmes liés à l’éducation, à la citoyenneté, au droit et à la paix. Ils n’avaient pas seulement des stations d’élaboration de plateformes revendicatives », a dit M. Diakhaté. Le Ministère de l’Éducation nationale doit instruire les Inspections d’académie (Ia) et les Inspections de l’éducation et de la formation (Ief) pour un renforcement des capacités sur l’utilité pédagogique des gouvernements scolaires. « Les bonnes pratiques doivent être partagées pour montrer aux sceptiques qu’il est possible de faire des actions utiles. La presse peut jouer un rôle important à ce niveau », selon notre interlocuteur. « Le foyer socio-éducatif devenu gouvernement scolaire a pour vocation d’être une structure d’éducation complémentaire aux enseignements prenant en charge les activités éducatives, culturelles et récréatives, un cadre d’épanouissement individuel et collectif pour les élèves, un cadre d’apprentissage de la vie en société, favorisant la solidarité et l’entraide », a rappelé Kaba Diakhaté.
Les gouvernements scolaires permettent aux élèves d’acquérir, de manière expérientielle, des compétences transversales très importantes. Créés en 2010 dans les collèges et lycées à la place des foyers socio-éducatifs, les gouvernements scolaires constituent des cadres d’apprentissage de la démocratie, de la citoyenneté, d’une culture de paix et de droits humains.
Par Daouda DIOUF