L’école sénégalaise dans tous ses états. En effet, au regard des trois événements récemment vécus par notre système éducatif, on ne peut pas trouver meilleure assertion. Au lycée Babacar Cobar Ndao de Kaffrine, un professeur de mathématiques, lors d’un contrôle de cahier, renvoie les élèves qui n’avaient pas recopié leur leçon. Il est automatiquement désavoué par son proviseur devant les élèves.
Si pour certains, le proviseur a totalement tort, pour d’autres, lui et l’enseignant sont tous fautifs. À la Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Ucad, plus précisément au Département de Lettres modernes, c’est un moniteur qui tripatouille les notes pour de l’argent ou des faveurs sexuelles. À Ziguinchor, dans la première quinzaine du mois de février 2025, sept élèves de la classe de troisième d’un Collège d’enseignement moyen (Cem Boucotte Sud) ont eu l’audace de proférer des injures à l’endroit de leurs enseignants par le biais de supports vidéos diffusées à travers les réseaux sociaux.
Des vidéos devenues virales. Sidéré par un tel comportement, l’inspecteur de l’académie de Ziguinchor, Papa Gorgui Ndiaye, se basant sur le rapport du Principal et sur les conclusions du Conseil de discipline de l’école, a sévi. Le 7 mars 2025, il a acté l’exclusion définitive de trois élèves. Ces trois événements, et Dieu sait qu’il y en a d’autres, rappellent un fait : notre école est malade. Comme notre société, elle est malade du comportement de ses acteurs. L’indiscipline, la cupidité, le manque de respect, etc., sont en train de la gangrener davantage. L’on me dira que l’école est la société en miniature.
Certes ! Mais l’école, comme le « lël » chez les Wolofs, le « bukut » chez les Joola, le « kuyan » chez les Manding (cette école traditionnelle de la vie), a été créée pour parfaire l’éducation et la socialisation de l’homme, de réduire les inégalités sociales, faire progresser la paix et la stabilité, faciliter son insertion socioprofessionnelle… Car, selon les spécialistes de l’éducation, « l’école a un triple objectif d’intégration : elle intègre à la collectivité en favorisant l’apprentissage des codes de la vie en collectivité ; elle intègre à la culture en transmettant notamment les valeurs de la République ; elle intègre professionnellement en favorisant l’acquisition d’un statut professionnel ». (Cf. Global Partnership for Education : benefits of education).
« L’éducation est le processus par lequel l’homme acquiert des connaissances, des compétences, des valeurs morales qui configurent savoir, savoir-faire et savoir-être qui permettent d’installer durablement les changements intellectuels, affectifs et sociaux durables », disait l’ancien Directeur de la formation et de la communication (Dfc) du ministère de l’Éducation nationale, Abdoulaye Diatta. Bref, il s’agit d’instruire, de socialiser et de qualifier les élèves. Un rôle crucial. Une noble mission qui s’effrite de plus en plus. Oui, notre école a longtemps perdu son rôle d’éducation. Elle est tout simplement devenue, reconnaissons-le et honnêtement, un simple lieu d’enseignement.
Quelle gageure de vouloir alors former des citoyens modèles capables de prendre en charge le destin de ce pays ! Au moment où tout va à une vitesse supersonique, il est temps de redonner à l’école son rôle d’éducation et pas seulement d’enseignement. Comme ce fut le cas, il y a quelques décennies, au Sénégal. Comprenons-nous bien. Il ne s’agit pas de faire revenir la cravache. Mais trouver un lien entre la famille (premier milieu d’éducation) et l’école afin d’offrir à l’enfant la meilleure éducation possible. Un pays qui continue d’investir plus de 25 % de son budget national dans l’éducation et la formation, soit 5 voire 6 % de son Pib, a l’obligation de prendre en main l’éducation de son peuple. L’éducation et la formation étant des enjeux capitaux pour le devenir de tout pays. daouda.mane@lesoleil.sn