La commune de Diembéring, dans le département d’Oussouye (région de Ziguinchor), est l’une des plus belles du Sénégal. Sa position géographique fait de cette collectivité territoriale, une destination touristique privilégiée. Mais le mariage entre le fleuve Casamance et l’océan Atlantique, qui lui confère tout ce charme, représente aujourd’hui une véritable menace.
OUSSOUYE – Nichée dans l’extrême ouest de la région de Ziguinchor, Diembéring partage avec l’océan Atlantique un littoral de 30 kilomètres de long. Sa plage est décrite comme l’une des plus belles d’Afrique de l’Ouest. Les limites géographiques de la commune avec les autres collectivités territoriales sont naturelles. Elles sont tracées par le fleuve Casamance et ses marigots.
Au nord, c’est l’embouchure qui sépare Diembéring de Kafountine. À l’est, ce sont les marigots d’Elinkine et de Diakène Diola qui la délimitent respectivement des communes de Mlomp et d’Oukout. Au sud, c’est le marigot de Boudiédiétte où se situe la frontière avec la commune de Santhiaba Manjack. Cette position géographique fait de Diembéring un « paradis terrestre ».
La localité jouit d’une végétation luxuriante, composée de forêts de palétuviers, de mangroves et de plusieurs espèces d’arbres, dont des fromagers centenaires. Cinq îles paradisiaques (Carabane, Sifoka, Vendaye, Ehidj et Ourong) et deux presqu’îles (Nikine et Cachouane) sont parmi les 21 villages que compte la commune de Diembéring.
La collectivité que beaucoup considèrent comme un archipel ou une grande île est la première destination touristique de la partie sud du pays. Elle est aussi le poumon économique de la région. Cependant, Diembéring et des villages de Nikine et Carabane sont les plus touchés par l’avancée fulgurante de la mer.
« Ces villages qui sont à l’embouchure du fleuve Casamance sont les plus menacés, Nikine en premier. D’ailleurs le bois sacré du village est sous la menace des vagues et si l’on n’y prend garde, nous raconterons à nos enfants et à nos petits-enfants qu’il y avait sur ces lieux un village qui s’appelait Nikine », alerte le docteur en géographie Samsidine Sarr.
Ayant fait sa thèse sur cette question, il insiste sur l’urgence de sauver ces localités. « Il est vrai que beaucoup de villages de la commune sont menacés, mais Nikine et Carabane sont les plus exposés compte tenu de leur position par rapport à l’embouchure du fleuve Casamance.
L’érosion côtière
Donc l’agression de la mer est plus forte de ce côté-là », ajoute le natif de Carabane. Dans le village de Diembéring, le constat est tout aussi alarmant. À la plage, les hectares de filaos qui constituaient un rempart contre l’érosion en fixant le sol n’ont pas survécu à l’agression progressive des vagues de l’océan Atlantique.
« Ces filaos ont été plantés il y a plus de 3 décennies. Ils étaient à plus de 500 m de la mer. Il y en avait six rangées. Mais aujourd’hui, il ne reste qu’une ou deux rangées », se désole Georges Boubacar Diatta, notable à Diembéring.
Il ajoute que toutes leurs rizières familiales qui se situaient dans la zone sont englouties par la mer. Les vagues ont détruit toutes les installations érigées sur la plage du village de Diembéring. Les habitants qui y menaient des activités génératrices de revenus n’ont que leurs yeux pour constater les dégâts.
« J’avais installé un bar-restaurant sur la plage et je gagnais bien ma vie en vendant de la boisson et de la nourriture aux touristes qui venaient se baigner à la plage. Je me suis déplacée une fois à cause de l’avancée de la mer. Mais cette fois-ci les vagues ont tout détruit », relate Seynabou Diatta qui s’est résignée et a définitivement quitté la plage de Diembéring. Tombon Guèye, ancien maire de la commune de Diembérin, est encore plus inquiet.
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« Nous avons, ici, la plus importante vitesse de décapage de la côte, qui est de l’ordre de 10 à 20 mètres par an. Alors que la moyenne nationale est de 1,5 à 3 mètres par an », s’alarme ce spécialiste de l’environnement. Les conséquences, dit-il, sont d’ordre cultuel, avec notamment la menace sur les bois sacrés et les sites de passage du vénéré guide religieux, El Hadj Oumar Foutiyou Tall.
Elles sont aussi, poursuit-il, d’ordre économique avec la menace sur les bandes de terres les plus fertiles et des espèces spécifiques telles que les palmiers à huile, les parinaris, les diolium guineensis. Dans cette partie du département d’Oussouye, l’érosion côtière inquiète tout le monde. De l’avis de certains opérateurs touristiques, la protection du littoral relève d’une urgence.
« Cette bande côtière est la seule réserve foncière touristique qui reste dans la commune de Diembéring. Nous savons que les populations autochtones seules ne pourront pas se battre contre l’avancée de la mer. Nous sollicitons de l’État du Sénégal et de ses partenaires un programme d’envergure qui consiste à installer des brise-vagues pour sauver cette côte très importante pour l’avenir du tourisme en Casamance et préserver ce havre touristique », étaye Jean Siboundo Diatta, opérateur touristique et ancien président de l’Office du tourisme de Casamance.
Kathafa B.H.M KANFOUDY (Correspondant)

