À Richard-Toll, le quartier de Guadalkhout vit au rythme de la Taouey, cet affluent du fleuve Sénégal, dont il tire l’essentiel de ses moyens de subsistance grâce à la pêche. Né de cette proximité avec l’eau, le quartier subit aujourd’hui les contrecoups de sa situation géographique. En période d’hivernage, les crues menacent constamment les habitations, exposant les populations à un risque permanent.
En ce début d’après-midi du 5 juillet 2025, Guadalkhout ressemble au quartier des pêcheurs de Guet Ndar à Saint-Louis. Situé dans la commune de Richard-Toll, il est bordé par le canal de la Taouey, un bras du fleuve Sénégal, et par la Compagnie sucrière sénégalaise (Css). Ici, les ruelles mènent directement à l’eau. Sur la berge, des pirogues chargées de filets attendent d’être mises à l’eau.
Nous sommes dans un quartier de pêcheurs. À quelques pâtés de maisons, de petits hangars de fortune servent de séchoirs. Les femmes y exposent les poissons séchés, et l’odeur flotte dans l’air. La plupart des pêcheurs viennent de Gaya, village natal de Seydi El Hadji Malick Sy. Ils ont apporté avec eux leur lien à l’eau.
À Guadalkhout, le liquide est partout : on le trouve à portée de pied et on vit avec lui. La pêche n’est pas seulement une activité, c’est une culture, un mode de vie. Ousmane Gaye, aujourd’hui âgé de 77 ans, a passé la majeure partie de son existence à Guadalkhout. Il s’y est installé dès son enfance avec son père.
« Nous sommes une famille de pêcheurs et avons pratiquement vécu toute notre jeunesse au bord de l’eau », explique-t-il.
Aujourd’hui, le patriarche profite d’une retraite paisible auprès de sa famille. À Guadalkhout, la pêche soutient de nombreuses familles.
Hantise des inondations
Le fleuve est une véritable source de vie. Après une demi-heure à trier puis à sécher les poissons au bord du canal de la Taouey, Aminata Diop évoque un passé glorieux. « Il y a quelques années encore, la pêche était abondante. Les pirogues étaient remplies de poissons, et nos activités se déroulaient parfaitement. Aujourd’hui, la ressource se fait de plus en plus rare », déplore-t-elle.
« Tout au long du fleuve, le typha pousse de manière incontrôlée, ce qui entrave la circulation de l’eau. Le poisson s’y retranche, ce qui rend la pêche de plus en plus difficile», explique la mère de famille.
À Richard-Toll, Guadalkhout est l’un des quartiers les plus exposés à la montée des eaux. En période d’hivernage, il n’est pas rare que les habitations soient envahies lors des crues. Jusqu’à présent, aux abords des maisons, des digues de fortune construites par les habitants tiennent encore, témoignant de l’ampleur des dégâts causés par les inondations.
Les eaux du fleuve Sénégal : une menace bien réelle
La proximité immédiate avec le canal en fait une zone menacée. À chaque saison des pluies, Guadalkhout vit dans la crainte. Ici, la montée des eaux du fleuve Sénégal n’est pas un simple phénomène naturel : c’est une menace bien réelle.
Selon Mody Diop, habitant de la localité, les riverains doivent constamment se battre contre les crues. « En période d’hivernage, l’eau entre dans les maisons. On a beau élever des digues de fortune, parfois cela ne suffit pas », confie-t-il, les yeux rivés sur les berges du canal de la Taouey.
D’après lui, la commune de Richard-Toll leur vient en aide en leur octroyant des camions de sable. Les souvenirs des précédentes crues restent encore vivaces dans les mémoires. À Guadalkhout, la crue n’est pas une exception, c’est la règle, car chaque année, une bataille silencieuse contre l’eau s’y joue.
Selon Bintou Niasse, habitante du quartier, la situation devient critique lorsque les eaux du fleuve, en crue, se mêlent à celles de la pluie : « Elles montent rapidement et encerclent nos maisons. Même avec les digues que nous construisons nous-mêmes, il arrive qu’elles cèdent », explique-t-elle.
Par Ibrahima MBAYE (Correspondant)