Un village, une forêt. C’est le pari audacieux que porte le Réseau pour l’Émergence des Écovillages au Sahel (REDES), dirigé par Dr Ousmane Aly Pame. Depuis plus de vingt ans, cet infatigable défenseur de l’environnement s’est engagé à barrer la route à la désertification au cœur du Sahel, en misant sur la reforestation, la sensibilisation et la coopération transfrontalière
À Lahel, le centre du REDES accueille des acteurs venus du Sénégal et de Mauritanie pour se former aux techniques de reforestation, à la régénération des sols et à l’agroforesterie. « Ce centre est un espace de démonstration et de formation. Nous y testons et partageons des méthodes adaptées aux réalités locales », explique Dr Pame. Le défi est de taille. Avec ses 22 communes, le département de Podor n’échappe pas à la déforestation accélérée, véritable fléau qui appauvrit les sols et les populations. Pourtant, les premiers résultats sont là. Grâce aux efforts conjoints du message du REDES et des communautés locales, des centaines de milliers d’arbres ont déjà été plantés, transformant peu à peu les paysages arides en oasis de verdure.
Lahel, épicentre d’une révolution verte
Dans sa vision transfrontalière, Dr Pame refuse que les frontières freinent l’élan écologique. Il ambitionne de créer un pôle écologique regroupant 50 villages sénégalais et mauritaniens. À Lahel, une pépinière fournit régulièrement des plants expédiés en Mauritanie. C’est ce qu’il appelle » les arbres de l’amitié », symboles de paix entre deux pays jadis au bord de la guerre. « Il y a trente ans, un conflit entre un éleveur et un agriculteur a failli plonger le Sénégal et la Mauritanie dans une guerre ouverte. Pour nous, ces tensions étaient les conséquences directes de la dégradation des écosystèmes. En restaurant la nature, on restaure aussi la paix », confie Dr Pame. Aujourd’hui, certains de ces arbres atteignent deux mètres de haut et offrent de l’ombre, des fruits et de l’espoir.
Reboiser pour faire revivre le Sahel
Sur le domaine du REDES, la nature reprend peu à peu ses droits. Des plantes rampantes cohabitent avec des arbres fruitiers, formant une végétation insoupçonnée dans cette région semi-désertique. « Il y a 50 ans, cette terre abritait des lions, des éléphants, une faune et une flore riches. Nos pratiques agricoles mal adaptées ont tout détruit. Il est temps d’inverser la tendance », déclare Dr Pame avec émotion.
Pour réussir son pari, le REDES mise sur une approche communautaire, en formant les populations, en dialoguant avec les autorités locales et en promouvant la solidarité régionale. Grâce à ses partenaires, 63 puits ont été forés, apportant eau potable, irrigation et espoir aux villages sénégalais et mauritaniens. « Notre objectif est de produire deux millions d’arbres par an pour créer des forêts communautaires alimentaires et médicinales. Ces arbres ne sont pas que des plantes, ce sont des infrastructures de résilience », insiste-t-il.
Mamadou THIAM (Correspondant)