Bassirou Guèye est l’une des figures emblématiques du parc zoologique de Hann. Retraité depuis des années, il n’a pourtant jamais quitté ce parc, où il transmet son amour des plantes et des savoirs ancestraux.
« Je souhaite que le jour où je mourrai, qu’on m’enterre ici, au parc de Hann ». C’est avec ces mots que Baye Bassirou Guèye confie son lien indéfectible avec ce parc dakarois, un lieu où il a servi pendant plus de trente ans. À la retraite depuis 2007, l’âme vivante du parc de Hann continue de fréquenter ce lieu tel un gardien de temple. Dans ce havre de paix, le botaniste de formation forge le respect tant sa connaissance des plantes est louée par ses pairs. Un petit tour avec Bassirou Guèye dans les allées du parc de Hann permet de mesurer sa proximité avec le personnel de service. Il est hélé, salué, interpellé de partout. Frêle et court de taille, Bassirou Guèye, surnommé « Baye Bass » ou « cochon », a très tôt été fasciné par les plantes. Assis sur une chaise sous un arbre du jardin ethnobotanique, entouré de ses deux chats, Bassirou Gueye reçoit continuellement de patients. Né à Fatick en 1947, le botaniste a grandi entre Ndiaganiao, Diourbel et Dalifort, entouré de plantes médicinales. Dans sa famille, son oncle tradipraticien lui transmet très tôt les secrets des feuilles, des racines et des écorces. Cet héritage familial l’a poussé à consacrer sa vie à la recherche et à la transmission des connaissances. « Je l’aidais à cueillir et à préparer les remèdes. C’est là que tout a commencé », se souvient-il. Aujourd’hui, « Baye Bass » se sent fier qu’un des arbres du parc porte son nom. « Beaucoup ne comprennent pas pourquoi je viens tous les jours, même le dimanche, mais c’est ici que je trouve mon énergie. Voir un arbre porter mon nom, c’est un grand honneur. J’ai également reçu de très autres décorations de la part des directeurs du parc. Cela veut simplement dire que seul le travail paie », confie-t-il.
À 78 ans, Bassirou Guèye partage des remèdes de plantes qu’il juge « miraculeux ». « Je reçois, ici, des malades souffrant de plusieurs pathologies, mais avec nos remèdes, nous arrivons à les soigner. C’est un don, ça ne se vend pas », indique-t-il. Positif et spontané, pour Bassirou Guèye, la vie doit être tournée vers les autres. « Le bonheur, c’est le partage. Ce n’est pas de vivre caché ». Formé à l’école d’horticulture de Cambérène, où il décroche son Cap, Baye Bassirou a très tôt choisi de se consacrer au monde des plantes. Son chemin le mène vers la subdivision des Parcs et Plantations, avant qu’il fasse partie de plusieurs initiatives pour la préservation de l’environnement. En 1966, Bassirou Guèye a pris part au Festival mondial des arts nègres, avec comme mission de reverdir Dakar. Sa passion l’amène ensuite à diriger le jardin ethnobotanique et le parc forestier de Hann jusqu’à sa retraite. Polygame, père d’une dizaine d’enfants, « Baye Bass » milite en faveur d’une reconnaissance officielle de la phytothérapie au Sénégal. « Je souhaiterais que cette médecine issue du riche patrimoine naturel et culturel du pays soit pleinement intégrée et respectée au sein du système de santé », rêve-t-il.
Par Marième Fatou DRAMÉ