Après la signature du protocole d’accord entre l’État et les travailleurs des collectivités territoriales, le 10 juillet 2025, les agents de la Ville de Rufisque accueillent positivement cette entente qui devrait mettre fin à trois années de mouvement d’humeur. Toutefois, ils appellent à un accompagnement financier conséquent en faveur des collectivités territoriales.
Rufisque – Sous une chaleur estivale accablante, le centre principal d’état civil de Rufisque présente des guichets toujours déserts. Les agents continuent d’appliquer leur mot d’ordre de grève les jeudis et vendredis, en vigueur depuis six mois. Un service minimum reste néanmoins assuré, notamment pour la délivrance des certificats de décès, malgré la récente signature de l’accord entre l’État et les syndicats. Sur place, un agent préfère rester prudent. «J’ai eu quelques informations, mais je ne suis pas habilité à m’exprimer sur la question», confie-t-il avant de renvoyer à son supérieur hiérarchique.
À l’hôtel de ville, l’ambiance est similaire : une atmosphère lourde et morose. Ibrahima Niang, chef du service de gestion, avoue également son manque d’informations précises. «Comme tout le monde, j’ai vu l’information dans la presse. Mais je ne connais ni les détails ni les modalités de mise en œuvre des mesures annoncées», confie-t-il. Les agents et les syndicats se félicitent néanmoins de cette avancée. Pour Tall Faye, Secrétaire général du Syndicat des travailleurs des collectivités territoriales affilié à la Cnts/Fc, «c’est une avancée inédite dans l’histoire syndicale du Sénégal : trois ans de grève, c’est vraiment trop long». Diadji Ndiaye, autre syndicaliste, estime que l’État a tardé à résoudre le problème. «L’État a laissé pourrir la situation. Heureusement que cet accord ouvre une perspective de sortie de crise», se félicite-t-il néanmoins. Les travailleurs restent toutefois prudents et attendent de voir si les engagements pris seront respectés.
Tall Faye place sa confiance en la nouvelle équipe gouvernementale. «Au début de la grève, ceux qui sont aujourd’hui aux commandes étaient dans l’opposition. Le Premier ministre Ousmane Sonko connaît bien les difficultés des collectivités territoriales», dit-il. Quant à la levée définitive de la grève, cela ne serait plus qu’une question de temps. Diadji Ndiaye annonce une assemblée générale prochaine avec la base pour discuter des mesures adoptées et envisager une suspension définitive du mouvement. Pour rendre ces mesures effectives, les agents demandent un soutien financier substantiel de l’État envers les collectivités territoriales. «À Rufisque, où l’on compte 800 agents (dont 733 embauchés), il sera difficile d’appliquer les revalorisations salariales sans un appui conséquent de l’État», souligne Diadji Ndiaye. Tall Faye va plus loin, en précisant que seule la Ville de Dakar pourrait supporter cette charge sans aide externe. Il plaide pour que l’État consacre au moins 5 % du budget national à l’accompagnement des collectivités territoriales.
«La décentralisation ne peut réussir qu’avec des collectivités viables et dotées de ressources suffisantes pour soutenir le développement local», affirme-t-il. Il réclame également la révision de la loi n°2011-08 du 30 mars 2011 relative au statut général des fonctionnaires des collectivités territoriales, notamment en ses articles 29 et 30, pour garantir plus d’équité entre agents de l’administration. Pour rappel, l’accord signé le 10 juillet 2025 prévoit : une revalorisation salariale intégrale, une indemnité transitoire, une enveloppe spéciale destinée à soutenir les collectivités impactées par la mesure.
Mohamed DIENE (Correspondant)