Les actes sont symboliques et emblématiques de la teneur et profondeur des relations entre le Sénégal et la Chine. Pour sa première visite d’État, le Président Sénégalais Bassirou Diomaye Faye a choisi la Chine comme destination, en marge de la 9ème édition du Forum sur la coopération Chine-Afrique (FOCAC), qui s’est tenu en septembre 2024 à Beijing. Son Premier ministre Ousmane Sonko aussi, pour sa première sortie hors du continent africain, se rendra en Chine du 22 au 27 juin 2025. Ces deux déplacements de ceux qui sont à la tête du Sénégal depuis avril 2024 montrent clairement la place et le poids qu’occupe la Chine dans les partenariats politiques et économiques du Sénégal. Il est à rappeler que depuis 2016, la relation entre le Sénégal et la Chine a été élevée au rang de Partenariat stratégique global, avec une convergence de vues sur la plupart des questions internationales d’intérêt commun et aussi une co-présidence pendant six ans (2018-2024) du FOCAC.
Avec un portefeuille de projets très varié allant de la santé, à l’économie en passant par l’hydraulique, la Chine a aidé le Sénégal à avoir cette dernière décennie un tissu infrastructurel et culturel très dense. Le partenariat sénégalo-chinois a été à la base d’importantes réalisations parmi lesquelles le parc industriel de Diamniadio dont la seconde phase est en cours de réalisation, les autoroutes Ila Touba , Thiès-Mbour-AIBD et celle en construction Mbour-Fatick-Kaolack ; la réalisation de plus de 251 forages dans le cadre du volet hydraulique de la phase 3 du Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC) ; l’aménagement hydro-électrique de Gouina; l’Arène nationale de lutte ; la réhabilitation du barrage d’Affiniam ; l’équipement de la Brigade Nationale des Sapeurs-Pompiers ; la construction du Pont de Foundiougne Nelson Mandela ; la construction du Grand Théâtre National ; la réalisation de l’Hôpital pour Enfants de Diamniadio ; l’Institut Confucius de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar; les phases I et II du réseau national de l’intranet gouvernemental; le data center de Dakar; le Musée des Civilisations noires; l’acquisition de 406 minibus et de 235 bus en faveur de Dakar-Dem-Dikk ; la rénovation et l’agrandissement du réseau de distribution de l’électricité à Dakar ; la réhabilitation des 11 stades régionaux et du stade LSS.
A ce titre, lors de son voyage en Chine, le Président sénégalais Bassirou Diomaye Faye et son homologue chinois Xi Jinping ont supervisé la signature de plusieurs accords de partenariat dont l’un porte sur l’assistance technique sur les Jeux olympiques de la Jeunesse au Sénégal de 2026 avec la rénovation de plusieurs sites sportifs comme le stade Iba Mar Diop, celui de LSS étant déjà terminé. La capitale chinoise Beijing a la particularité d’avoir accueilli les Jeux olympiques d’été (2008) et ceux d’hiver (2022), d’où son surnom de « double ville olympique ». Une expérience que la Chine va partager avec le Sénégal qui est le premier pays africain à accueillir une compétition d’une telle envergure planétaire. Au-delà des ports, aéroports, routes, stades, forages qui portent aujourd’hui l’empreinte de cette coopération exemplaire, ce sont les hommes et les femmes qui doivent être les ponts de cette relation avec ainsi plus d’investissement dans le capital humain par plus de formations, de partages d’expérience et de connaissance, d’échanges culturels… Il faudra aussi pour les nouvelles autorités sénégalaises porteuses d’un nouvel « Agenda de transformation » qu’elles veulent implémenter avec leur référentiel, arrimer la coopération chinoise sur leurs préoccupations et priorités pour arriver à leurs objectifs de développement.
Dans cette perspective, la nouvelle réorientation prise par l’économie chinoise peut être une opportunité. La Chine mise aujourd’hui sur de nouveaux secteurs émergents comme le Numérique, le Développement vert, l’Intelligence artificielle, etc pour son développement économique de qualité. Ainsi des convergences peuvent être trouvées surtout le Numérique sur lequel les nouvelles autorités sénégalaises comptent beaucoup avec leur « New Deal technologique » de par une digitalisation des procédures administratives et l’émergence d’une vraie économie numérique. Les infrastructures numériques constituent désormais un pilier essentiel de la modernisation au Sénégal. La Chine a joué un rôle central dans cette transformation digitale, notamment à travers le projet « Sénégal Intelligent », financé et mis en œuvre par des entreprises chinoises. Cette initiative a permis d’optimiser les réseaux haut débit et de dynamiser l’économie numérique.
Un autre exemple marquant est le Centre national de données, inauguré en 2020, qui témoigne de l’expertise chinoise en matière de gestion sécurisée des données publiques. Ces infrastructures soutiennent également des secteurs clés tels que : la santé (déploiement de la e-médecine) et l’éducation (développement de plateformes d’apprentissage en ligne). C’est aussi le cas pour la construction du parc industriel de Diamniadio. Inspiré du modèle des zones économiques spéciales chinoises, le parc industriel de Diamniadio associe capitaux chinois et savoir-faire local. Ce projet a généré des milliers d’emplois et attiré des investissements dans des secteurs stratégiques : transformation agroalimentaire et fabrication de matériaux de construction.
En parallèle, des formations techniques dispensées par des experts chinois permettent de préparer une main-d’œuvre qualifiée, répondant aux besoins des industries locales. La coopération est aussi notable dans le domaine des énergies renouvelables. La Chine soutient activement la transition énergétique du Sénégal, notamment à travers des projets solaires. La centrale photovoltaïque de Bokhol, par exemple, fournit une électricité propre à plus de 200 000 foyers. En 2024, les deux pays ont renforcé leur collaboration avec un partenariat visant à développer des micro-réseaux solaires dans les zones rurales, intégrant des solutions de stockage d’énergie et de smart grids. La coopération sino-sénégalaise, fondée sur le principe « gagnant-gagnant », illustre parfaitement comment le transfert de savoir-faire et les investissements ciblés peuvent stimuler un développement durable. Alors que le Sénégal aspire à devenir un hub technologique en Afrique de l’Ouest, la Chine demeure un partenaire incontournable pour concrétiser cette ambition.
Par Oumar NDIAYE et Shanhui ZHANG
Oumar NDIAYE ; Journaliste-Chef du Desk International du journal Le Soleil, diplômé de l’Université Renmin de Beijing
Shanhui ZHANG ; Présentatrice–Commentatrice à CGTN Français, Chercheuse au Center For China & Globalization