Des acteurs de la société civile, ayant dévoilé leurs propositions pour une réussite du dialogue national, s’attendent à des transformations majeures du paysage politique sénégalais. Dans une contribution unifiée, rendue publique, ils ont dégagé des pistes de réflexion visant à faire du Sénégal un hub démocratique et électoral.
La société civile sénégalaise, qui a toujours été au rendez-vous lors des précédentes éditions de dialogue national, a très tôt affuté ses armes en vue de jouer le rôle de sentinelle entre les protagonistes du jeu politique. Elle s’est mise en première ligne et s’est constituée en force de propositions pour des modifications majeures du code électoral. Dans leur mémorandum commun, qui sera présenté lors des travaux du dialogue politique, la société civile compte peser de son poids pour l’approfondissement de la démocratie sénégalaise. Elle insiste sur la mise en place d’un comité de suivi en charge de produire des rapports réguliers sur l’évolution du dialogue et de veiller à l’application des réformes attendues.
À travers un atelier préparatoire, tenu il y a quinze jours, suivi d’une conférence de presse, des organisations de la société civile ont pris l’option de participer, cette année, aux concertations nationales avec une position harmonisée. Elles ont produit, à l’initiative du Collectif des organisations de la société civile (Cosce), du Groupe de recherche et d’appui-conseil pour la démocratie participative et la bonne gouvernance (Gradec) et de l’Ong 3 D, une contribution unifiée pour faciliter des plages de convergence entre les différentes parties prenantes, notamment les membres de la classe politique. Tous abondent sur la même fréquence. Ils tiennent à ce que cette rencontre débouche sur des consensus forts, permettant de conjurer toute menace à la paix sociale et à la stabilité politique et institutionnelle.
Dans un souci de contribuer à l’approfondissement de la démocratie sénégalaise, ils ont pris en compte les points en suspens lors des précédentes assises nationales et ceux qui attendent d’être mis en œuvre avant d’élaborer un mémorandum commun. À travers trois axes majeurs à savoir la démocratie et les droits humains, le processus électoral et les réformes institutionnelles, ils ont réaffirmé, à cet effet, leur engagement à appuyer la volonté des autorités étatiques et de la classe politique de s’engager dans une dynamique d’ouverture et de continuité. Diagnostic et solutions consensuelles Si certains s’interrogent sur la pertinence d’une telle rencontre généralement axée dans le passé sur la pacification du climat politique, le facilitateur du dialogue national, Cheikh Guèye, estime que le Sénégal va franchir une étape significative dans sa trajectoire politique.
Dans cette optique, Djibril Gningue, le directeur exécutif du Pacte et membre du Gradec, rappelle que la crise politique, survenue en cette période, avait laissé entrevoir des rapports fortement polarisés entre l’opposition et le pouvoir. « Il est aujourd’hui nécessaire de parfaire notre système politique qui est adossé, en bonne partie, sur le système électoral. Si le régime actuel est ouvert pour un débat sur toutes les questions qui préoccupent la classe politique et que les parties prenantes fassent preuve de dépassement, je trouve que ce sera bénéfique pour notre pays », souligne-t-il. Le directeur exécutif de l’Ong 3 D, Moundiaye Cissé, plaide pour une mobilisation des différentes parties prenantes.
Il juge qu’un dialogue préventif constitue un impératif dans le souci de faire grandir la démocratie sénégalaise. Il précise : « Nous ne devons pas attendre des tensions pour dialoguer. Un dialogue préventif aidera à dépassionner les débats et à entreprendre la réforme du code électoral dans un climat de sérénité ». Pour lui, comme pour d’autres figures de la société civile, le dialogue ne traite pas uniquement de préoccupations électoralistes. Il permettra de redynamiser voire de consolider le modèle démocratique sénégalais. « Pour la société civile, nous avons tenu à harmoniser nos points de vue et nos positions. Nous estimons qu’il est nécessaire de mener des médiations et d’amener tout le monde à la table de discussions », renseigne-t-il.
Dans ce sillage, le secrétaire exécutif du Gradec, Ababacar Fall, a mis en exergue, dans ses différentes sorties, le rôle déterminant de leurs plénipotentiaires durant ce grand rendez-vous politique, institutionnalisé par le régime sortant. « La société civile a, au cours de ces dernières décennies, développé une expertise qui fait d’elle un acteur incontournable dans les changements politiques, économiques et judiciaires de notre pays », indique M. Fall.
Il est également soutenu, dans cet élan, par le Pr Babacar Gaye, président du Cosce, qui rappelle une réalité politique. Il estime que « la démocratie est une pièce à double face : l’une symbolise la compétition, l’autre la communion. Le dialogue est consubstantiel à la démocratie ». Il préconise de « soigner la maladie » politique en allant à la racine des dysfonctionnements.
Matel BOCOUM