La réconciliation dans les contextes post-crise ne se décrète pas de manière automatique. Elle n’est pas non plus le fruit d’un hasard. Au contraire, elle scelle l’aboutissement d’un processus méthodique, soigneusement conçu et qui résulte de plusieurs étapes. Une réconciliation obtenue de façon judicieuse est la solution la plus aboutie possible pour panser les plaies béantes que nous lèguent les crises et les conflits. Elle implique une entreprise qui comprend les étapes suivantes : vérité, justice et réconciliation. Plusieurs pays Africains, à l’instar de l’Afrique du Sud, de l’Ethiopie, du Zimbabwe, la Côte d’Ivoire, le Sudan, le Kenya ont été de mettre en œuvre des entreprises de réconciliation avec des processus et des résultats différents qu’il serait intéressant d’analyser en vue d’en tirer des leçons et d’apporter une orientation claire au débat qui anime l’opinion actuellement au Sénégal. A bien des égards, la réconciliation peut ainsi être l’étape qui retient le plus d’attention dans ces processus mais elle s’appuie sur les prérequis que sont la vérité et la justice.
La première étape cruciale de ce processus de réconciliation est celle qui consiste à rétablir la vérité et à faire la lumière sur les faits qui ont caractérisé une crise. Dans les contextes post-crises comme celui où se trouve le Sénégal actuellement, la manifestation de la vérité est une condition essentielle pour aller vers la réconciliation. La mise en lumière des faits qui ont caractérisé une situation de crise ou de conflit démontre principalement l’existence de l’Etat de droit et la capacité de l’appareil judiciaire à satisfaire les attentes du peuple.
En outre, la manifestation de la vérité redonne de la crédibilité et renforce la légitimité des institutions auprès du peuple dont elle cherche à regagner la confiance. En réalité, enquêter sur des faits jugés répréhensibles afin de faire jaillir la lumière est le minimum qu’un Etat respectable et moderne puisse assurer à ses citoyens. La phase de vérité est un moment crucial dans le processus dans la mesure où elle permet de retracer les faits en vue de mieux comprendre les mobiles des différents agissements répréhensibles enregistrés au moment de la crise.
Elle permet de respecter les droits des accusés tout en leur garantissant la possibilité de s’exprimer conformément à leurs droits. De manière plus importante, elle permet surtout aux victimes d’injustice et d’atrocités de faire des témoignages, d’exprimer leurs souffrances et de vider le traumatisme dont elles portent les séquelles pendant que la justice fait son travail en toute objectivité.
Ensuite, il y a la phase de justice dans le processus. La justice est l’application de la loi en vue de prononcer des peines à l’endroit des fautifs. C’est un impératif de rendre justice aux citoyens pour permettre à une nation de surmonter une période de crise ou de conflit comme l’affirme le célèbre dicton en anglais « Justice must be done ». La jonction entre la vérité et la justice est ce moment décisif où les concernés reconnaissent les faits qu’on leur reproche. C’est une phase cathartique qui aide les nations post-crise à résoudre l’impunité. Pour les fautifs, c’est une occasion unique de reconnaître les faits et d’avoir même la grandeur de présenter des excuses. En outre, eu égard aux actes d’exaction perpétré contre des citoyens, l’application de la justice peut donner au fautif le sentiment de s’être réconcilié à soi-même surtout lorsqu’il présente ses excuses. En revanche, elle donne surtout aux victimes un sentiment de satisfaction en ce sens que les faits ont pu être retracés et leurs oppresseurs appelés à comparaître à la barre. La reconnaissance de l’injustice subie permet aux victimes de se soulager et contribue à atténuer le traumatisme qu’ils ont vécu. Voir les bourreaux continuer à s’occuper tranquillement de leur vie, comme cela semble se passer au Sénégal, crée un sentiment de rancune et alimente chez l’opinion que l’impunité est une règle de conduite et que ceux qui sévissent contre les citoyens n’ont aucun risque à craindre, même dans le futur. Par contre, le seul fait de voir la vérité triompher et la loi appliquée donne aux victimes un sentiment de satisfaction et un regain de confiance vis-à-vis des institutions de leur pays. Ils sont ainsi comblés de remarquer que le combat contre l’impunité est une conviction chez les autorités étatiques.
Pour illustrer ces arguments, nous pouvons évoquer le cas de la réconciliation initiée en Afrique du Sud à la fin de l’apartheid, à partir de 1994. Elle a connu un bilan mitigé en ce sens qu’elle n’intégrait pas toutes les étapes et tous les aspects nécessaires du processus. Les autorités sud-africaines avaient mis en place une Commission Vérité et Réconciliation (Truth and Reconciliation Committee), donnant, de fait, l’impression de faire abstraction d’une étape importante, la justice. Malgré ces limites, Nelson Mandela nous raconte que le seul fait de voir, à l’étape de vérité, les anciens oppresseurs venir témoigner des exactions qu’ils ont fait subir à des Noirs donnait un sentiment de satisfaction aux victimes, certains affirmant qu’ils pardonnaient aux auteurs les crimes commis, souvent émus par le fait que ces derniers leur demandaient publiquement pardon. N’eussent été ces résultats acquis par la recherche de la vérité et une volonté de réconciliation, la nation sud-africaine ne se remettrait pas si facilement de l’accident de l’apartheid, pour voir Noirs et Blancs cohabiter, même si les tensions vont encore perdurer. La reconstruction nationale passe par une volonté sincère. Frederick De Klerk, alors Premier Ministre de l’Afrique du Sud, après la démission de Botha, avait bien compris cette dimension lorsqu’il prit la peine de présenter ses excuses au début des négociations entre le gouvernement et l’ANC (Congrès National Africain). Plus tard, certains Sud-Africains ont beaucoup fustigé l’attitude des autorités à vouloir réconcilier le pays à tout prix, et dans le premier mandat post-apartheid, sans passer par les fondamentaux. D’ailleurs, Meredith souligne qu’en demandant en Sud-africains, ces derniers affirmaient : Ces critiques ont été confortées par de grands observateurs comme Martin Meredith (The State of Africa) qui fait remarquer que l’échec de la réconciliation entreprise par Mandela est l’une des tâches noires de son œuvre exemplaire. Pour la majorité des Sud-africains, le premier mandat de Mandela devrait plutôt mettre l’accent sur la redéfinition des rapports entre les races (Black empowerment) et sur l’amélioration des conditions de vie des Sud-Africains que de s’investir sur la réintégration d’une élite blanche qui a longtemps fait souffrir l’Afrique, et tout ceci au nom de la réconciliation. C’est d’ailleurs cette insatisfaction sur la direction prise par les autorités qui explique, après le départ de Mandela, que les Noirs, sous le règne de Thabo Mbeki, ont entrepris des manœuvres de récupération des biens, constatant l’échec, selon eux, de Mandela à restaurer pleinement aux Noirs sud-africains ce qui leur revenait de droit. Cette expérience de l’Afrique du Sud nous montre suffisamment qu’une réconciliation mal gérée rattrape toujours le pays dans lequel elle est mise en œuvre, pour le plonger dans de nouvelles crises.
Enfin, la phase de la réconciliation est la dernière étape du processus. C’est d’ailleurs même, le résultat auquel le processus doit mener. Sans les deux étapes initiales que sont la vérité et la justice, l’on ne peut obtenir une réconciliation entre d’anciennes factions opposées. Pour matérialiser la réconciliation, il faut recourir à un ensemble de mécanismes. D’abord, le terrain doit être propice pour enclencher un élan de réconciliation. Cela implique qu’il faut un temps relativement suffisant entre la période de crise et le moment où l’on commence à détecter, au niveau de l’opinion et des citoyens, les signaux qui montrent que la situation est propice pour réconcilier un pays. Les tensions se seront ensuite apaisées avec le temps par la manifestation de la vérité et la justice rendue. L’élan de réconciliation se ressent à travers l’opinion nationale qui en donne les signaux à travers le portage de voix crédibles et sages et une volonté populaire partagée. La réconciliation est aussi portée par une volonté et un engagement fort de l’autorité et de personnalités crédibles au parcours exemplaire, en qui l’opinion a foi. Si les autorités politiques, comme les présidents des pays doivent en jeter les jalons et en dessiner les contours, la réconciliation est une entreprise qui nécessite l’implication d’autres champions dont l’apport serait vital. Si par exemple, l’archevêque Desmond Tutu a joué un rôle de premier plan dans la reconstruction de l’Afrique du Sud, c’est parce qu’il disposait d’une sagesse reconnue qui lui a d’ailleurs valu l’attribution du Prix Nobel pour la paix en 1984 et d’être désigné comme le président de la Commission Vérité et Réconciliation, même si lui-même fustigeait les contingences que les autorités imposaient et qui ont contribué à l’échec du véritable travail qui devait être fait.
La réconciliation peut ensuite se manifester à travers l’expression d’un sursaut national qui résulte d’une volonté commune combinée à un agenda adéquat. Une telle volonté se fonde sur le bon vouloir du pardon et une résolution chez les citoyens à dépasser les anciennes velléités et à fixer un nouveau cap. Un tel élan permet de légitimer l’assouplissement des peines prononcées, de recourir à l’amnistie ou la grâce à l’endroit de certains acteurs. Elle concrétise ainsi cette volonté de pardon que le peuple accorde aux fautifs dans un élan qui vise à ressusciter la concorde, l’harmonie, la cohésion nationale et la paix sociale durable.
Œuvrer pour la réconciliation est une entreprise fastidieuse et exigeante. La plupart du temps, elle ne récompense pas ses initiateurs. Nelson Mandela en a justement payé le prix, adulé en Occident et à l’extérieur de l’Afrique du Sud comme un homme au grand cœur, sévèrement critiqué en Afrique du Sud pour son manque de fermeté envers la justice sociale. Bien souvent de tels acteurs se retrouvent au cœur de beaucoup de controverses. Nelson Mandela, comme nous le savons, est un leader chez qui l’engagement pour la paix et la tolérance restent des principes inaltérables. Ses efforts pour réconcilier l’Afrique du Sud et en faire une nation arc-en-ciel où toutes les sensibilités et les diversités pourraient être reconnues et valorisées a suscité beaucoup de débats. Lorsqu’un journaliste lui demanda s’il avait des regrets dans sa vie, Mandela affirma qu’il était dommage que beaucoup de Noirs en Afrique du Sud le considéraient comme le traître qui a accordé des faveurs incalculables aux Blancs tandis qu’une grande majorité de ces Blancs le traitaient toujours comme ce rebelle qui a brisé leurs rêves.
La réconciliation en Afrique du Sud a laissé un bilan mitigé comme il en est d’ailleurs pour beaucoup de pays en Afrique, notamment au Kenya, après la crise de 2008 dont les séquelles restent toujours vivaces, ou en Côte d’Ivoire (après la guerre civile) où des tensions sous-jacentes avaient resurgi en 2010, et menacent toujours aujourd’hui l’unité nationale (« l’ivoirité »). Le principal obstacle est qu’en Afrique du Sud, il n’y a pas eu de justice totale. La vérité s’est manifestée dans les tribunaux mais les fautifs en ressortaient totalement libres sans que justice soit rendue conformément à l’orientation que les autorités avaient donné à l’entreprise de réconciliation.
Un maillon essentiel du processus a été escamoté, celui de la justice comme l’illustre l’appellation de la commission comme nous l’avons évoqué plus haut. Ensuite, le processus s’est plutôt avéré être un camouflage qu’un véritable exercice qui visait à jeter les bases d’un nouveau départ. La Commission Vérité et Réconciliation n’a pas fait le travail attendu et ce sont des personnalités de l’ANC comme Thabo Mbeki (Meredith, p.662), qui en étaient des membres qui lui faisaient obstruction de façon délibérée aussi bien dans les enquêtes que dans les démarches compensatoires.
L’Afrique est un continent qui a vécu beaucoup de crises et de conflits dont les dénouements ont été marqués par l’adoption de mécanismes visant à réconcilier différents acteurs. Martin Meredith, dans The State of Africa, en a étudié plusieurs. Ses conclusions ne restent pas surprenantes : la plupart des initiatives de réconciliation n’étaient pas minutieusement conçues et mises en œuvre de façon appropriée. Elles laissent toujours une paix fragile avant de faire resurgir les anciennes velléités. En guise d’illustration, les premières tentatives de réconciliations nationales en Afrique ont eu lieu lors des fameuses conférences nationales qui scellent l’avènement du multipartisme en Afrique dans les années 1990.
En réalité, la plupart des présidents africains ont régné, juste après les indépendances, avec le parti unique au prix d’énormes exactions contre des opposants politiques ou des groupes sociaux spécifiques. Ouvrir la voie du multipartisme impliquait le lancement d’un nouveau départ où il fallait embarquer toutes les forces vives de la nation au nom de la réconciliation. Il est connu que la plupart de ces élans n’étaient qu’un simulacre de réconciliation.
Quelques années après, à la veille des années 2000 et juste après, plusieurs pays africains ont à nouveau sombré dans les conflits et la violence : le Congo, la RDC, l’Ethiopie et l’Erythrée, la Côte d’Ivoire, le Libéria, le Soudan, le Kenya. Ces conflits ont quelque chose de commun, l’expression de l’amertume d’une partie de la population qui fustige la gestion d’un régime qui se complaît souvent dans le népotisme et l’autoritarisme, oubliant les engagements précédemment pris – qui n’étaient donc pas sincères – à œuvrer pour une nation unie et solidaire où les libertés de tous les citoyens sont respectées. La réconciliation n’a donc pas porté ses fruits et ses incohérences ont rattrapé ces pays qui ont replongé dans des conflits préoccupants.
Le seul exemple de réconciliation largement plébiscité est celui du Rwanda. Cette dernière, quoique comportant des limites, repose sur beaucoup de facteurs qu’il importe de mettre en exergue, et qui ont contribué à poser les jalons d’une cohésion sociale solide dans ce pays.
A ce niveau, il sied tout de même de faire ressortir certaines remarques qui font du Rwanda un cas particulier. Le Rwanda a connu un conflit d’une rare violence, un génocide, qui a ému l’opinion internationale. Cela a certainement laissé une résolution inébranlable chez les Rwandais qui consiste à se dire que, pour rien au monde, il ne faudrait revivre une expérience si atroce. Ce qui pourrait amener les citoyens à être plus enclins à être pacifiques.
Le second élément, utilisé à tort contre Kagamé, et totalement infondé, serait de dire qu’après la victoire du RFP (Rwanda Patriotic Front) de Paul Kagamé, les populations d’origine ethnique différente de celle du président (Tutsi), se sont déplacées dans les pays voisins de sorte à ne laisser dans le pays que ceux qui prêtent une une allégeance et une loyauté aveugles au président. Cette assertion est une hérésie car 84% des Rwandais sont des Hutus d’après World Atlas.
En revanche, il faut reconnaître que la cohésion sociale du Rwanda est tributaire des actions de réconciliation qui ont été entreprises sous la houlette de Paul Kagamé. Cette réconciliation repose sur une recette principalement axée sur l’application de la loi et la fermeté du Président Kagamé à sévir contre ce qu’il appelle toute force occulte, haineuse dont l’ambition est de saper l’unité nationale du pays.
Il s’agit de traduire en justice tout individu qui revendique une sympathie ou une appartenance à l’ancienne classe de faussaires, aussi bien Tutsis que Hutus, qui avaient plongé le Rwanda dans l’une des tragédies les plus atroces que la planète ait vécue. Ensuite, Paul Kagamé s’est surtout attelé à améliorer les conditions économiques et sociales des Rwandais tout en dirigeant le pays dans un élan de fermeté et de pragmatisme. Au fil des années, beaucoup de ses concitoyens, se sont rendus compte que la direction qu’il a dessinée semblait la voie la plus viable pour mettre le pays sous la rampe du progrès et se sont joints à cet effort de construction nationale inédit. Cet exemple est fort pertinent en ce sens qu’elle diffère fondamentalement de l’expérience Sud-africaine.
La trajectoire que Paul Kagamé a imprimée au Rwanda fait aujourd’hui qu’il est difficile de le juger à l’aune des critères classiques de la démocratie. Au demeurant, une seule variable semble se confirmer : il reste un président légitime aux yeux des Rwandais qui se disent que « tant qu’il peut faire le travail, ils se soucient peu du nombre de ses mandats ou de sa longévité à la tête du pouvoir ». Son parcours s’apparente à celui de Den Xiao Ping ou de Lee Kuan Yew du Singapour.
Ce que nous retenons de ces différentes expériences de réconciliation en Afrique est qu’une réconciliation de façade est toujours un camouflage dans le but de prétendre passer à une autre étape. Cette réconciliation est une bombe à retardement car ses incohérences finiront toujours par rattraper le pays à l’avenir. L’autre leçon fondamentale que nous tirons de ces expériences est que la dynamique de réconciliation ne peut pas être forcé.
Elle prend souvent des contours naturels qui jaillissent de l’écoulement du temps et d’un sursaut national qui ne peut être obtenu qu’une fois les citoyens se montreront satisfaits des efforts de vérité et de justice. Au demeurant, les réconciliations ratées prennent surtout forme des dans espaces où les compromissions politiques sont courantes.
Le cas de l’Afrique du Sud est encore révélateur à ce niveau. L’absence d’une orientation claire à la fin de l’apartheid au niveau de l’ANC a eu des conséquences désastreuses. Ce parti est vite devenu un parti ouvert à la corruption où ses prochains leaders notamment Mbeki et Zacob Zuma furent impliqués, parmi des centaines d’autres responsables, dans de gros scandales. Cette situation a sapé la crédibilité de ce grand parti, symbole de la résistance africaine.
Aujourd’hui, il est facile de présager que les ambitions de l’ANC de rester longtemps risquent clairement de ne pas se réaliser. Aujourd’hui, le retour de la suprématie blanche, sponsorisée de l’extérieur constitue une menace sérieuse pour l’Afrique du Sud. La trajectoire de l’ANC doit servir de leçon aux autres formations politiques dans l’espace africain. Ce parti est l’invention d’esprits ingénieux et des résistants les plus téméraires dont les actions émerveillent tant en termes de résistance et qui malheureusement n’a pu satisfaire les attentes de son peuple lorsqu’il s’est agi de reconstruire le pays.
J’en conclus que le premier mandat du régime PASTEF devrait être un mandat de la fermeté qui reflète la volonté des Sénégalais qui ont sanctionné le régime précédent et qui nous ont transmis un message clair. La réconciliation est une entreprise noble et louable mais elle doit reposer sur des principes solidement établis.
Desmond Tutu rappelait à ce niveau que : « la réconciliation ne consiste pas à rendre tout le monde confortable. Une réconciliation basée sur du faux et les compromissions, qui ne considère pas la réalité en face, n’est pas de la véritable réconciliation.
Elle ne peut durer longtemps » (Meredith, p. 667). A défaut de prendre en compte ces réalités, nous risquons de sauter des étapes fondamentales du processus et d’alimenter des méfiances et des incertitudes qui pourront rattraper le Sénégal dans le futur. C’est parce que l’ancien régime et ses défenseurs n’avaient plus la confiance du peuple qu’ils ont été sanctionnés. Au regard de cette réalité, l’autorité de l’Etat dispose d’une grande légitimité pour appliquer la loi sur les agissements répréhensibles que nous avons enregistrés durant la période de la crise entre 2021 et 2024, surtout que les souvenirs de ces exactions restent toujours vivaces.
Au même moment, les urgences sur les vrais problèmes du Sénégal liées, entre autres, à la vie économique, à la santé, à l’emploi, à l’éducation, au logement et aux infrastructures ne nous donnent pas le temps de trop nous mobiliser sur des efforts de réconciliation qui ne sont ni pressants et dont les retombées ne sont pas aussi évidentes.
Ameth Diallo
Chercheur



