Les relations diplomatiques entre Le Caire et Dakar datent de plusieurs décennies. Pour l’Égypte, il n’y a pas de pays aussi proche que le Sénégal pour qu’elle lui offre la réplique du sarcophage de Toutânkhamon et de sa momie, symboles de l’héritage pharaonique. C’est du moins l’avis de l’ambassadeur d’Égypte à Dakar, Khaled Aref, dans un entretien accordé au « Soleil », en prélude à la célébration prochaine des 65 ans de relations diplomatiques entre les deux pays.
Le Sénégal et l’Égypte vont célébrer cette année leurs 65 ans de relations diplomatiques. Que retenez-vous de ces rapports historiques ?
Les relations entre le Sénégal et l’Égypte remontent à la date de l’indépendance du Sénégal. L’Égypte a été le premier pays africain à reconnaître cette indépendance. Cela remonte à l’époque de Gamal Abdel Nasser, qui entretenait des relations très spéciales avec le président Léopold Sédar Senghor. D’ailleurs, nous avons une université à Alexandrie qui porte son nom, l’Université Senghor. Cette année est spéciale, car nous célébrons les 65 années de relations entre nos deux pays. À cette occasion, lors de la visite de notre ministre des Affaires étrangères, nous offrirons au Sénégal une réplique du sarcophage et de la momie du pharaon Toutânkhamon.
Que symbolise cette momie pour les relations entre les deux pays ?
C’est un témoignage de l’amitié et des relations spéciales que les deux pays entretiennent. D’ailleurs, le Sénégal est l’un des rares pays à disposer d’un département d’égyptologie, grâce aux idées et aux travaux du professeur Cheikh Anta Diop. Pour nous, il n’y a pas de pays aussi proche que le Sénégal pour recevoir ce beau cadeau. Le Sénégal est un très beau pays, avec une riche histoire. Comme nous, Égyptiens, sommes profondément attachés à nos origines et à notre terre, j’ai observé que les Sénégalais sont également très liés à leur pays. Je l’ai vu avec l’arrivée au pouvoir du Pastef. Beaucoup de Sénégalais sont revenus de l’étranger, portés par le désir de contribuer au développement de leur pays. Ils ont apporté leur expérience au service de la nation. Ce patriotisme, nous le partageons aussi en Égypte. Les Égyptiens aiment leur pays, rêvent de revenir après des années passées à l’étranger. C’est un point commun fort entre nos deux peuples.
Au-delà de l’histoire et de la civilisation, pouvez-vous évoquer les relations commerciales entre l’Égypte et le Sénégal ?
Durant la visite de notre ministre, nous organiserons un forum d’affaires économiques et commerciales. Nous visons à doubler les échanges entre nos deux pays. Nous sommes optimistes quant au développement de ces relations. En parallèle, nous soutenons pleinement le développement du Sénégal. Nous avancerons main dans la main avec ce pays frère. D’ailleurs, à l’occasion de cette visite, nous procéderons à un soft-opening d’une usine égyptienne d’électroménager à Diamniadio, qui produira des appareils pour le marché local. C’est un signe fort de rapprochement. Des hommes d’affaires égyptiens viendront également explorer le marché sénégalais. Ce déplacement est aussi un préambule au Forum « Invest in Senegal » prévu en octobre. Ils viennent évaluer les opportunités et définir ce qu’ils pourront présenter lors de cet événement.
Y aurait-il des entreprises égyptiennes spécialisées dans l’Ia ou les technologies ?
Oui, un représentant du secteur des technologies de l’information (It) fera le déplacement pour explorer les perspectives au Sénégal. Une réunion est prévue le 25 juillet à la Chambre de commerce et d’industrie de Dakar, dans la matinée. Tout le monde est invité à venir échanger avec les délégués égyptiens. Dans l’après-midi, notre ministre présidera la cérémonie officielle de commémoration des 65 ans de relations diplomatiques entre nos deux pays, aux côtés de Mme Yassine Fall, ministre sénégalaise des Affaires étrangères, et de Mme Khady Diène Gaye, ministre de la Culture, des Sports et de la Jeunesse. L’événement aura lieu au Musée des civilisations noires.
Quel est le volume actuel des échanges commerciaux entre le Sénégal et l’Égypte ?
Pour les six premiers mois de cette année, les échanges commerciaux ont avoisiné les 51 millions de dollars. C’est une tendance à la hausse. Nous espérons atteindre les 100 millions de dollars d’ici à la fin de l’année, et doubler ce chiffre dans les prochaines années. Mais au-delà des échanges, ce sont les investissements qui comptent. Une grande entreprise égyptienne, Orascom, active dans la construction, les télécommunications, le tourisme, l’industrie et la technologie, développe un projet d’envergure au Lac Rose. Il s’agit d’un investissement d’environ un milliard de dollars.
Combien d’entreprises égyptiennes sont actuellement présentes au Sénégal ?
Actuellement, elles sont peu nombreuses, entre trois et quatre grandes entreprises. Mais nous espérons doubler ce chiffre dans les années à venir. Cette visite de haut niveau est justement une étape clé pour explorer les opportunités du marché sénégalais.
Et concernant la communauté égyptienne au Sénégal ?
Elle est très réduite, moins de 500 personnes. Cela s’explique par la distance géographique. Mais le Sénégal est proche de notre cœur. Nous espérons bientôt établir une liaison aérienne directe entre les deux pays, pour renforcer les échanges humains et commerciaux. Nous avons aussi de nombreux étudiants sénégalais en Égypte, notamment à Al-Azhar, qui font office de véritables ambassadeurs culturels. Et bien sûr, il y a Sadio Mané, qui est un modèle pour les Égyptiens. Je dis toujours que c’est un exemple parfait de l’amour pour son pays, de la modestie, du don de soi. Il inspire beaucoup en Égypte, tout comme Mohamed Salah est apprécié ici, au Sénégal. Il y a une vraie réciprocité d’admiration entre nos peuples.
Mariama DIEME