DR YACINE DIAGNE, ENSEIGNANTE CHERCHEUSE EN SCIENCE POLITIQUE

« La perception des sondages varie en fonction des positions des acteurs » (4/5))

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Enseignante chercheuse en Science politique et en journalisme au Centre d’Études des Sciences et Techniques de l’Information (Cesti) de l’Ucad, Dr Yacine Diagne souligne que l’interdiction des sondages d’opinion au Sénégal peut être perçue comme une entrave à la liberté d’expression. Dans cet entretien, elle insiste sur la nécessité d’un cadre juridique et d’une régulation indépendante pour garantir une utilisation responsable des sondages.

Selon la chercheuse, l’interdiction des sondages peut être perçue « comme une marque de scepticisme envers la transparence dans le processus démocratique ». Bien que certains sociologues questionnent la légitimité des sondages, « ces derniers peuvent influencer les comportements électoraux en projetant des perspectives, parfois néfastes », explique-t-elle. Ainsi, « leur perception varie en fonction des positions des acteurs dans le champ politique. Les régimes en place peuvent redouter les sondages lorsque leurs résultats révèlent une baisse de leur capital sympathie. Les partis d’opposition, quant à eux, peuvent les suspecter de partialité et les considérer comme un dispositif potentiel de désinformation. Pour les citoyens ordinaires, leur méfiance découle souvent d’un manque d’information sur l’utilité des sondages dans les processus démocratiques ».

 

Le sondage d’opinion est-il un allié de la démocratie, ou constitue-t-il une menace sur les principes démocratiques ? Pour Yacine Diane, « l’impact des sondages dépend de leur conception, de leur interprétation et de leur usage ». En tant qu’alliés de la démocratie, ils permettent aux décideurs publics d’être mieux informés sur les préoccupations et les attentes des citoyens ordinaires. Cependant, prévient-elle, « lorsque les résultats sont biaisés, manipulés ou mal interprétés, ils risquent de compromettre les principes démocratiques en renforçant la désinformation ou en accentuant la polarisation du champ politique ».

Qui de leur influence sur les politiques publiques et les décisions des gouvernants ? « Ils peuvent guider les pouvoirs publics dans l’élaboration de leur vision stratégique des politiques publiques avec les priorités des citoyens ordinaires lorsqu’ils sont réalisés de manière objective », explique le Dr Yacine Diagne, auteur d’une thèse intitulée « Sociologie politique d’une expérience de démocratie participative. Le cas d’une radio communautaire au Sénégal », en 2014 (Paris 9). Elle souligne aussi qu’une mauvaise interprétation des résultats peut entraîner des effets néfastes et amener les gouvernants à privilégier des mesures inefficaces pour plaire à l’opinion publique, « même si cela met en péril les finances publiques. L’interdiction des sondages d’opinion ne constitue elle pas une entrave à la liberté d’expression ? Selon elle, cela peut être perçu comme « une entrave à la liberté d’expression, un principe fondamental d’un débat éclairé, surtout si elle est généralisée et non motivée ». En effet, « elle peut empêcher les médias et les citoyens d’accéder à des données et des informations fiables pour enrichir le débat démocratique. Cependant, tout dépend des motifs, du contexte et des implications de cette interdiction ». Se faisant plus précise, elle explique que « l’interdiction peut être légitime si l’objectif est de préserver l’ordre public, surtout dans un contexte de polarisation politique et médiatique. En effet, en période de campagne électorale, les sondages peuvent fausser les résultats en favorisant des effets tels que le « Bandwagon » (suivre le candidat favori) ou le « Underdog effect » (soutenir le candidat perçu comme perdant) » Interrogée sur l’encadrement effectif des sondages d’opinions au Sénégal, elle juge que la mise en place d’un cadre juridique clair, accompagné d’une régulation indépendante et d’une sensibilisation générale, pourrait constituer une alternative viable à l’interdiction des sondages d’opinion au Sénégal. « La création d’un organe de régulation chargé de superviser les sondages, de vérifier les méthodologies employées et d’auditer les instituts pour garantir le respect des normes, renforcerait la transparence et favoriserait une contribution constructive des sondages au débat public », soutient-elle. Par ailleurs, elle estime que « restreindre la publication des sondages à des périodes précises, notamment en dehors des campagnes électorales, permettrait de limiter les risques de manipulation ou d’influence excessive sur l’opinion publique.

Propos recueillis par Aliou DIOUF

Lire aussi : « Pour un sondage d’opinion sur le territoire national, prévoir 90 millions de francs CFA » (3/5)

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