Ancien instituteur, professeur de collège, puis inspecteur de l’éducation, formateur, entre autres casquettes, Masseye Sow est bien connu dans le monde de l’éducation nationale. Ayant troqué la craie contre le militantisme, il fait partie des pionniers du Mouvement national des Enseignants patriotes (Monep). Le natif de Yarakh est actuellement membre de « Maggi Pastef » (sages des Pastef).
Il a le style d’un enseignant, tout du moins d’un pédagogue. Masseye Sow prend le soin de bien expliquer les choses pour qu’elles s’impriment dans la mémoire de son interlocuteur. À l’occasion de notre tête-à-tête, il ne déroge pas à la règle. Teint noir, gestuelle posée, cet enseignant de formation nous délivre, dans les moindres détails, le récit de sa vie « politique » qui a débuté en 2015, un an après la création du parti Pastef-Les Patriotes et dont il se réclame pionnier. Avec ses lunettes d’intellectuel, ce serviteur inconditionnel de l’école sénégalaise, inspecteur de l’éducation à la retraite, a aussi occupé le poste de professeur au collège et au lycée. Il nous confie qu’il a été pendant 10 ans premier conseiller pédagogique national au ministère de l’Éducation nationale et responsable des écoles de formation d’instituteurs.
Ces structures sont devenues, aujourd’hui, les Centres régionaux de Formation des Personnels de l’Éducation (Crfpe). « En 2009, j’ai ouvert l’inspection de Goudomp. Après le décès de mon épouse, j’ai décidé de rentrer sur Dakar où j’ai été recruté comme directeur de la Pédagogie du groupe les Pédagogues pour gérer leurs neuf établissements », se remémore-t-il. Ce retour dans sa ville natale donne des ailes à ce Yarakhois de naissance (en 1952) et de cœur. Masseye Sow décide de s’engager dans la sphère politique quelques années après, précisément en 2015, tentant vaille que vaille de concilier ses deux amours : politique et éducation. Ce septuagénaire devient responsable politique de Pastef dans la commune de Hann-Bel Air, un quartier populeux où il a appris des valeurs comme l’engagement, la solidarité, mais aussi la vie en communauté. Il confesse que son père, pêcheur-maraîcher, et sa mère, ménagère, lui ont inculqué les valeurs de travail et de détermination.
« J’ai grandi aussi chez l’un des plus grands pêcheurs de la localité à l’époque : Bara Guèye. Il est le parrain de l’école de Hann-Pêcheurs », soutient-il. C’est parce que ses voisins sont convaincus qu’il est très utile à sa communauté qu’ils l’ont choisi comme parrain de la 1ère édition de distribution de kits scolaires aux élèves de la commune de Hann-Bel Air le 11 octobre 2025. Dans sa riche formation, tout a commencé au bord de la plage de Hann. Après des études primaires à l’école de Hann-Pêcheurs, il fit son cycle moyen au collège 2 de Pikine et le secondaire au lycée Malick Sy de Thiès. Masseye Sow y décroche son baccalauréat en 1973. Il rejoint le Département d’Histoire et de Géographie de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar. Un concours d’entrée au Centre de Formation pédagogique, où il termine major de la promotion (1973-1974) l’envoie au cœur du Fouladou, précisément à Médina Yoro Foulah, en octobre 1975. Une terre d’accueil où va s’écrire une partie de son histoire personnelle avec son mariage au sein de la famille Diallo dont un des membres, Abdoul Diallo (grand-père de son épouse), a donné son nom au pont qui traverse la ville.
« Tous les premiers cadres de Médina Yoro Foula sont mes élèves. C’est le cas de Kalidou Sy, l’actuel maire de cette commune », affirme-t-il. Fondateur du Syndicat des Inspecteurs de l’Éducation du Sénégal En 1978, l’appel du grand rivage yarakhois est plus fort et il débarque à l’école de Hann-Montagne. Insatiable et féru de connaissances, Masseye Sow décide de s’inscrire en première année à la Faculté des Lettres et Sciences humaines de Dakar. En 1981, il devient professeur de français au collège Momar Marême Diop de Yeumbeul jusqu’en 1990, année de sa réussite au concours de recrutement des inspecteurs de l’enseignement. À travers les péripéties de son passage dans la grande banlieue dakaroise, il croisera la route de certaines personnalités à l’image de l’actuel ministre de l’Agriculture, Mabouba Diagne, qui fut un de ses élèves. Ce nouveau chapitre de sa vie va réveiller en lui une âme de syndicaliste.
« J’ai créé le Syndicat des Inspecteurs et Inspectrices de l’Éducation nationale du Sénégal (Siens) en 2004. Nous avons signé le premier protocole qui octroyait aux inspecteurs de l’éducation une Indemnité de Contrôle et d’Encadrement pédagogique (Icep) de 150 000 FCfa », déclare-t-il avec fierté. Masseye Sow, en bon marin, aime aussi se fondre dans les grands espaces que constituent nos terroirs. Au gré de ses différentes affectations, il posera ses baluchons à Podor, Goudomp, Sédhiou et Kédougou. Cette dernière affectation lui vaudra les félicitations de Moustapha Guirassy. « C’était la première fois que quelqu’un demandait à être affecté à Kédougou qui était considéré comme un poste punitif », confesse-t-il. Après ce moment passé dans différentes régions comme inspecteur de l’éducation, Masseye rentre à Dakar où il est nommé conseiller pédagogique national au ministère de l’Éducation. Il fut aussi formateur à l’École nationale d’Économie appliquée (Enea), devenue l’École normale supérieure d’Économie appliquée.
La rencontre avec Ousmane Sonko et Birame Soulèye Diop
Cette quête assoiffée de savoir qui ne le quittait jamais va lui ouvrir les portes d’une nouvelle carrière sur le terrain politique. Il rencontre son futur mentor politique, Ousmane Sonko, sur les bancs de l’Institut supérieur des Finances (Isf) en 2004. Promotionnaire de l’actuel Premier ministre, il obtiendra son diplôme après deux ans de formation en 2006. Malgré cette proximité, son intégration au sein de Pastef va se faire par l’intermédiaire de Birame Soulèye Diop, administrateur du parti à l’époque. « C’est Birame Soulèye qui m’a recruté dans le parti en 2015 », se souvient-il. La raison : « Je venais payer régulièrement mes impôts, car j’avais un cabinet, et ça l’avait marqué. On a longuement échangé, il m’a dit qu’ils avaient besoin de moi dans leur parti ». Cette renaissance de la fibre politique, à travers cette jeune formation de gauche souverainiste, lui rappelle les années sombres de militantisme clandestin.
« J’étais dans le journal de la gauche « Harébi ». On était dans la clandestinité ; c’est nous qui déposions les tracts à Gibraltar. J’ai une expérience politique dans la clandestinité. Tous les gens de Hann me connaissent parce que très souvent, j’étais traîné à la gendarmerie où on subissait beaucoup de brimades », a-t-il affirmé. Masseye Sow se rappelle qu’il a fait son mémoire d’instituteur sur « Che Guevara ou le mythe ». « Lorsque j’ai intégré le Comité de pilotage de Pastef, qui est devenu le Bureau politique, en 2015, on n’était pas trop nombreux. Mais, on s’est inspiré de Che Guevara, Fidel Castro, qui n’étaient que six au départ », a-t-il soutenu.
L’homme devient, à partir de 2015, membre du Bp jusqu’en 2019, date à laquelle il devient conseiller au cabinet politique d’Ousmane Sonko, composé de huit membres, dont Amadou Ba, Khadija Mahécor Diouf, Wally Diouf Bodiang, Marie-Rose Faye, Fadilou Keïta, Bakary Séga Bathily et Aboubacar Djamil Sané. Au fil des années, Masseye finit par établir une relation de confiance avec le président du parti. « Ousmane est un homme affable. Je connais Diomaye, c’est vrai, mais j’ai des relations beaucoup plus affectives avec Ousmane Sonko. Je mangeais chez lui et j’y prenais le thé. Il me consultait souvent », confesse-t-il avant de se remémorer les débuts très difficiles, avec notamment la collecte de parrainages pour la présidentielle de 2019.
Toutefois, ce militant de la première heure ne regrette que le sort réservé aux membres du Mouvement national des Enseignants patriotes (Monep), qu’il estime sous-représentés dans les instances du pouvoir. Sa proximité avec le duo Diomaye-Sonko « Je pense qu’un jour je parviendrai à avoir accès à Ousmane Sonko et à Diomaye pour pouvoir leur parler. Le président Bassirou Diomaye Faye, on s’est connu dans l’opposition. On a travaillé ensemble pour la mise en place du Mouvement national des Enseignants patriotes. C’est moi-même qui ai donné l’idée, mais sa mise en œuvre lui revient. J’ai prononcé un discours lors du lancement de cette structure. Ousmane Sonko a demandé de faire de mon discours un document sur l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité », raconte Masseye Sow avec fierté. Pour qualifier le duo Diomaye-Sonko, il souligne que « le stratège, c’est Diomaye et le leader charismatique, c’est Sonko ».
D’après lui, les deux personnalités peuvent être qualifiées de jumeaux et que toute action envers l’un est ressentie par son alter ego. Actuellement, Masseye est membre de « Maggi Pastef » (Sages de Pastef).
Oumar KANDÉ


