Rationalisation des partis politiques: Une proposition à l’épreuve de la liberté d’association

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La volonté du président de la République de rationaliser le nombre de partis politiques au Sénégal dont le fonctionnement et l’organisation sont encadrés par la loi n° 81-17 du 6 mai 1981 relative aux partis politiques, risque de poser un certain nombre de difficultés concernant le respect du pluralisme et de la liberté d’association garantie par la Constitution. Le président Bassirou Diomaye Faye qui a déploré une application laxiste de la loi entend tenir des concertations pour plus de lisibilité dans le jeu démocratique.

C’est une arlésienne de la vie politique sénégalaise qui, de manière périodique, occupe le devant de la scène médiatique. Ainsi, après le Premier ministre Ousmane Sonko, à l’occasion de sa Déclaration de politique générale (Dpg), c’est au tour du chef de l’État, Bassirou Diomaye Faye, lors de son adresse à la Nation, le 31 décembre dernier, de revenir sur la rationalisation des formations politiques dans notre pays. Le Président a ainsi indiqué son désir de conduire des « concertations sur notre système politique dans le but d’y apporter plus de lisibilité, plus de transparence et plus de rationalisation ».
Pour lui, « l’inflation notée des partis politiques, favorisée par une application trop laxiste des textes en vigueur, a conduit à une fragmentation excessive et une inflation préoccupante, préjudiciable à une respiration démocratique de qualité ». Selon la loi n° 81-17 du 6 mai 1981 relative aux partis politiques, modifiée par la loi n° 89-36 du 12 octobre 1989, « chaque parti doit déclarer, chaque année, au plus tard dans les huit jours qui suivent la date anniversaire du récépissé de ses statuts, les prénoms, noms, professions et domiciles de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration ». Par ailleurs, les partis sont aussi dans l’obligation de déposer, chaque année, au plus tard le 31 janvier, le compte financier de l’exercice écoulé. Ce compte doit faire apparaître que le parti politique ne bénéficie d’autres ressources que celles provenant des cotisations, dons et legs de ses adhérents et sympathisants nationaux et des bénéfices réalisés à l’occasion de manifestations.

348 partis politiques

Le Sénégal qui compte plus de 348 partis connait une croissance exponentielle depuis l’émergence des coalitions et des alliances politiques. Mais, pour beaucoup de détracteurs à une rationalisation des partis politiques, une modification de loi pourrait entraver le respect du principe de la liberté d’association garantie par la Constitution. Ainsi, l’article 12 de la Constitution dispose que « tous les citoyens ont le droit de constituer librement des associations, des groupements économiques, culturels et sociaux ainsi que des sociétés, sous réserve de se conformer aux formalités édictées par les lois et règlements ». Néanmoins, pour Moundiaye Cissé, président de l’Ong 3D, cette liberté d’association doit être contrôlée. « Il est clair que la Constitution permet la liberté d’association en son article 12, mais toute liberté ne doit as être absolue. La liberté de création des partis politiques n’exclut en rien leur rationalisation, surtout que beaucoup de partis sont nés des flancs d’anciens partis qui sont gérés par leur chef comme une propriété individuelle. Il y a un manque de démocratie interne au niveau des partis politiques », déclare-t-il.

Réformer le système partisan

Pour sa part, le Professeur Babacar Guèye, président du Collectif des organisations de la société civile pour les élections (Cosce), estime que cette rationalisation s’impose afin d’offrir une meilleure lisibilité au jeu politique sénégalais. « Si la loi de 1981 était appliquée dans toute sa rigueur, il n’aurait pas subsisté plus d’une dizaine de partis. La plupart de nos formations politiques ne présentent pas leur bilan financier et ne remplissent pas diverses autres formalités administratives contenues dans la loi de 1981. En outre, le président de la République a annoncé des concertations pour essayer de trouver un consensus qui sera consigné dans un acte juridique », déclare le constitutionnaliste. Le Pr Guèye de souligner que ces échanges qui doivent définir de nouvelles règles concernant les partis politiques et qui ne doivent pas aller à l’encontre du caractère pluraliste de notre démocratie et de la liberté d’association.
D’après lui, la reconfiguration du paysage politique, marquée par une multiplication des coalitions, démontre que les partis ne se constituent plus sur des bases idéologiques, mais sur des calculs électoralistes. « Cette rationalisation pourrait ouvrir la voie à des discussions sur un possible financement des partis politiques, car il ne faut pas oublier que les entités politiques remplissent aussi des missions de service public, notamment dans l’éveil des consciences et la promotion de la citoyenneté », affirme Babacar Guèye. Dans la même dynamique, Moundiaye Cissé appelle à une refonte des procédures pour la création d’un parti politique. « La loi qui organise les partis politiques date de 1981. C’est une loi obsolète, dépassée et elle a été modifiée en 1989 pour insister sur des dispositions relatives aux conditions de dissolution des partis politiques. On doit aller vers l’adoption d’un code sur les partis politiques qui va définir d’abord les conditions et les critères nécessaires pour se constituer en parti politique et aussi définir les conditions de fonctionnement de ces partis », affirme-t-il.

Mamadou Makhfouse NGOM

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