Durant la guerre froide, l’une des caractéristiques du monde occidental face à celui communiste, c’était son homogénéité.
Cette unité autour des valeurs fortes du libéralisme politique et économique lui a permis de traverser l’histoire et la géographie afin de s’imposer la démocratie comme système politique dans beaucoup de pays du monde. Avec comme leader les États-Unis, le monde occidentalo-capitaliste s’est voulu un apôtre des idéaux de démocratie, de libertés politiques et économiques.
Ces unité et homogénéité qui ont rassemblé les pays de ce bloc ne sont plus d’actualité. Des lignes de fractures qui, auparavant étaient souterraines, sont devenues des blessures et cassures qui risquent d’être pérennes. La scène surréaliste entre les chefs d’État américain Donald Trump et ukrainien Volodymyr Zelensky, qui s’est jouée dans le bureau ovale, épicentre du pouvoir politique américain et haut lieu de décisions, a ainsi projeté les divisions du monde occidental sur la question de la crise russo-ukrainienne. Depuis le début de la guerre, il y a trois années, si l’Ukraine a su tenir face à la Russie, c’est qu’elle a bénéficié de soutien financier et matériel de la part des États-Unis et de ses alliés européens.
Cette ligne de défense derrière l’Ukraine semble avoir des fissures qui font qu’il va être difficile de recoller les morceaux tant les fractures sont béantes et troublantes. Le retour au pouvoir de Donald Trump a remis en cause une constance dans la politique extérieure américaine : le dialogue transatlantique avec l’Europe.
Cette alliance matérialisée par le plus grand regroupement militaire qu’est l’Otan a dominé le monde depuis la période post-Seconde Guerre et a connu des périodes fastes dont l’apogée a été la victoire du monde occidental sur son rival soviétique avec la chute du mur de Berlin en 1989.
C’était l’époque où le politologue américain Francis Fukuyama avec son ouvrage « The end of history and the last man » théorisait comment la démocratie au sens de la liberté est devenue le baromètre des peuples. « C’est ce besoin de liberté qui a entraîné la fin de l’Urss et la fin de l’idéologie marxiste », disait-il. Autre époque… Des divergences et des contingences d’ordre politique, économique, religieux, culturel, sont venues rappeler au monde occidental qu’elle manque d’homogénéité et d’unité dans sa construction et son évolution. Les premiers coups de semonce ou alertes sur la fiabilité et viabilité du camp occidental ont été portés par la Russie, héritière de l’ancienne Urss qui avec sa politique de l’étranger proche avait ressuscité l’ère du «containment» (endiguement) dans les discours et actes du bloc occidental. Tout ceci vient ainsi remettre au goût du jour l’approche portée par la théorie du Réalisme qui postule une observation froide de la réalité de relations internationales et une description de celles-ci.
Les réalistes se veulent ainsi pragmatiques et considèrent que les relations internationales sont marquées par les rapports de force entre les États. Les nouvelles postures portées par la nouvelle administration américaine avec sa logique isolationniste et économiste marquée par la hausse des droits de douane envers même l’Europe montrent que désormais seuls les intérêts vont compter pour les États-Unis et non les idéaux qu’ils ont réussi à exporter avec leurs alliés européens.
Le dernier vote contre une résolution européenne à l’Onu avec la Corée du Nord et la Russie, deux pays unis militairement contre l’Ukraine, en est une illustration. C’est dire que les blessures et factures du monde occidental ne sont pas loin de se cicatriser et risquent d’amener des plaies incurables. oumar.ndiaye@lesoleil.sn