À Koumpentoum, un des quatre départements de la région de Tambacounda, la vie au centre de santé s’organise au rythme des naissances et des urgences. Malgré les efforts de l’État, le district sanitaire lutte encore pour garantir à chaque femme, à chaque nouveau-né, un droit fondamental : celui de recevoir des soins de qualité.
Pour atteindre Koumpentoum depuis Tambacounda, il faut avaler plus de 100 kilomètres de bitume, entrecoupés de travaux routiers forçant à tailler à travers des pistes où la poussière et les nids-de-poule sont la norme. Le district, qui couvre 7.650 km², regroupe 10 communes, 24 postes de santé, 33 cases de santé et 123 sites de prise en charge du paludisme à domicile. C’est tout un petit monde de professionnels : 6 médecins, 28 sages-femmes, 19 infirmiers d’État, 87 matrones et des centaines de relais communautaires qui se relaient pour servir une population de plus de 215.000 habitants, dont 51.872 femmes en âge de procréer.
À la maternité du centre de santé, les murs fraîchement repeints témoignent d’une réfection récente. Le bloc opératoire est fonctionnel, une ambulance médicalisée trône dans la cour. « Nous avons vu une amélioration », confie le Dr Siré Sagna, médecin-chef du district sanitaire de Koumpentoun. La blouse blanche s’exprimait le 30 juillet 2025 lors de la caravane de presse de l’Association des journalistes en santé population et développement (Ajspd) en collaboration avec la Direction de la santé de la mère et de l’enfant (Dsme). D’après elle, les indicateurs de nutrition et de santé de l’enfant sont meilleurs qu’en 2024. « Nous avons diminué les décès maternels, et la couverture en consultations prénatales est excellente ». En effet, 98 % des femmes enceintes ont effectué au moins une consultation prénatale et 87 % des accouchements sont assistés par un personnel qualifié.
Mais derrière ces succès, se cachent des réalités plus sombres. 11 % des accouchements ont toujours lieu à domicile, parfois dans des conditions précaires. Le taux de césariennes reste extrêmement faible (0,2 %), signe que certaines complications ne peuvent pas toujours être prises en charge à temps. Les causes des décès maternels ? « L’éclampsie, l’anémie, le choc septique… », énumère Dr Sagna. Les évacuations, elles, sont souvent liées à des avortements, des ruptures prématurées de membranes ou des dystocies. Et dans les zones reculées, 8 postes de santé n’ont pas d’ambulance pour transférer rapidement les patientes. Face à ces défis, Dr Siré Sagna appelle à doter à chaque poste de santé éloigné d’une ambulance médicalisée. Elle réclame aussi la construction une d’unité néonatale au centre de santé et l’affectation d’un pédiatre et d’un gynécologue. Elle demande à l’Etat le recrutement de 8 sages-femmes d’État pour les structures non doublées. « Nous avons les résultats pour prouver que les efforts portent leurs fruits, mais nous ne pouvons pas nous arrêter là. Chaque minute perdue pour une femme enceinte ou un nouveau-né peut coûter une vie », alerte-t-elle. À Koumpentoum, un des 3 départements de la région de Tambacounda, la santé maternelle et néonatale est un combat quotidien. Entre routes difficiles, manque de spécialistes et distances écrasantes, l’équation reste complexe. Mais derrière les chiffres, une certitude : ici, chaque avancée, aussi modeste soit-elle, sauve des vies.
Babacar Gueye DIOP