Niché au cœur de la belle région naturelle de la Casamance, Tonguiya est un village du département de Vélingara qui charme par ses paysages verdoyants et ses majestueux palmiers se balançant sous la brise. Ce petit coin de paradis abrite la minorité ethnique des Badiarankés, mais derrière cette carte postale se cache une réalité bien plus dure : l’isolement et les difficultés d’accès aux soins de santé, notamment pour les femmes enceintes.
La beauté de Tonguiya est ternie par son enclavement, qui complique l’accès aux services médicaux. Les routes sinueuses menant à Linkering, la localité la plus proche disposant d’un centre de santé, deviennent quasi impraticables en saison des pluies. Pour les femmes enceintes, cet isolement constitue un véritable calvaire. Les urgences obstétricales ne peuvent être prises en charge sur place et les trajets vers les structures de santé peuvent être interminables, mettant en danger la vie des mères et de leurs nouveau-nés.
Pendant longtemps, Tonguiya ne disposait que « d’une simple case de santé ». Ce n’est que récemment qu’un poste de santé plus structuré a vu le jour, grâce à « la mobilisation de la mairie, au soutien d’une mission évangélique américaine et à la contribution des villageois », selon Wally Sandé, agent sanitaire du village. Cette infrastructure représente un espoir pour la communauté, mais elle reste incomplète et insuffisamment équipée.
Foufa Gnabaly, matrone du poste de santé, exprime les difficultés quotidiennes : « Nous avons un nouveau poste de santé et du matériel, mais nous manquons cruellement de médicaments et d’autres équipements indispensables. Lorsqu’une femme enceinte arrive pour accoucher, j’attends parfois dix minutes avant de pouvoir intervenir, car je n’ai pas tout le nécessaire pour l’assister. Si je peux prendre soin d’elle, je le fais ; mais si son cas dépasse mes compétences, je dois la référer vers un centre de santé ou le district sanitaire le plus proche. »
Le manque d’une véritable maternité met en danger la vie des femmes enceintes et de leurs nouveau-nés. Les matrones locales témoignent d’une réalité tragique : des complications pendant l’accouchement deviennent courantes en raison du manque de soins adéquats.
Le martyre des femmes enceintes
Les femmes enceintes sont souvent livrées à elles-mêmes, devant parcourir des kilomètres en pleine douleur, parfois transportées sur des motos ou des tricycles loués à prix exorbitant. Cette situation entraîne un risque accru de mortalité maternelle et infantile. L’absence de personnel qualifié pour traiter des cas complexes rend chaque accouchement à risque, et l’impossibilité de transférer rapidement les patientes en cas de complications expose ces femmes à un danger imminent.
Wally Sandé, agent sanitaire de Tonguiya, souligne l’ampleur du problème : « Un poste de santé ne peut référer un patient à un autre poste de santé. Si nous dépassons nos compétences, nous devons envoyer le malade vers un centre de santé ou un district hospitalier. Le plus proche se trouve à Vélingara, à 7 km, ou à Gounas, à 40 km. Mais avant même d’atteindre la route goudronnée, il faut parcourir 12 km sur une piste difficile. »
En cas de complications graves, la situation devient dramatique. Les familles doivent organiser elles-mêmes les évacuations, souvent à l’aide de moyens rudimentaires. Ceux qui en ont les moyens parviennent à envoyer leurs proches à Linkering, mais pour les plus démunis, l’attente peut être fatale.
Son Chef de village, le vieux Sandé, l’âge avancé, par ailleurs patriarche de la communauté, espère que des efforts supplémentaires seront faits pour renforcer l’accès aux soins et améliorer les infrastructures sanitaires. Les populations, par la voix de la matrone Foufa Gnabaly, lancent un appel aux autorités, aux organisations humanitaires et aux partenaires de développement pour leur venir en aide.
L’infirmier chef de poste (ICP), bien que dévoué, doit composer avec un manque chronique de ressources, rendant l’accès aux soins aléatoire pour de nombreuses familles. L’absence de maternité et la pénurie de matériel médical compliquent encore davantage la prise en charge des urgences obstétriques.
Cheikh Tidiane NDIAYE