Le laboratoire pharmaceutique américain Gilead Sciences a conclu un accord de principe avec une cinquantaine de procureurs généraux américains, prévoyant le paiement de 200 millions de dollars pour avoir versé des pots-de-vin à des professionnels de santé délivrant ses traitements antisida.
« Lorsque les entreprises pharmaceutiques mettent les bénéfices avant les patients, les New-Yorkais souffrent », a commenté mardi Letitia James, procureure générale de l’Etat de New York, dans un communiqué annonçant cette sanction.
« Les patients doivent pouvoir avoir confiance dans le fait que les recommandations de leurs médecins sont dans leur meilleur intérêt, et ne résultent pas de cadeaux d’un laboratoire pharmaceutique », a-t-elle poursuivi, estimant que Gilead avait « nuit » au système de santé « avec des pots-de-vin illégaux ».
Dans une déclaration à l’AFP, un porte-parole de Gilead a affirmé que le laboratoire avait « évolué et renforcé ses programmes éthiques ces dernières années », soulignant que cet accord négocié sous l’égide du ministère de la Justice (DoJ) était « une affaire du passé ».
Cette résolution dans des « conditions acceptables est dans le meilleur intérêt de l’entreprise et des actionnaires », at-il précisé.
Une partie des 202 millions de dollars qu’il a accepté de payer sera orientée vers les programmes Medicaid (assurance santé pour les Américains à revenus modestes) et Medicare (assurance-maladie des plus de 65 ans), ainsi qu’à un programme d’assistance aux malades du sida (ADAP).
L’action Gilead a terminé la séance en baisse de 2,70% à la Bourse de New York.
– Cadeaux contre ordonnances –
Selon le communiqué, le laboratoire a fourni des cadeaux – repas dans de prestigieux restaurants, voyages tout compris dans des « destinations attrayantes », etc – à des professionnels de santé entre 2011 et 2017 qui assistaient ou intervenaient lors de séances promotionnelles de ses traitements contre le sida.
Les professionnels qui prescrivaient le plus ses traitements ont reçu « des dizaines et des centaines de milliers de dollars » pour faire des présentations en tant que « HIV Speakers » – spécialistes VIH – lors de dizaines de « Dinner Programs ».
Hawaï, Miami, La Nouvelle-Orléans, New York font partie des destinations choisies par Gilead, poursuit le communiqué, citant l’exemple d’une infirmière ayant assisté – parfois avec sa sœur – à 75 « HIV Dinner Programs » dont garantie sur le même sujet au moins trois fois dans l’espace de six mois.
Autre exemple : un groupe de dix médecins new-yorkais ayant assisté ou participé à environ 384 « Dinner Programs », dont 300 ont été organisés à l’initiative de l’un d’entre eux et qui avaient souvent le même intitulé, avec seulement deux semaines d’écart.
Gilead propose depuis 2022 un traitement antirétroviral, le Sunlenca, qui est prescrit aux personnes déjà infectées et qui permet d’empêcher la multiplication du virus dans l’organisme. Il coûte plus de 39.000 dollars par an par malade.
Il est développé à partir de la molécule lénacapavir, également utilisée pour un nouveau traitement préventif très prometteur contre le VIH – baptisé Yeztugo -, approuvé le 18 juin par les autorités américaines. Il doit coûter 28,218 dollars par an aux Etats-Unis.
Après plusieurs mois d’appels d’experts et d’associations de malades, Gilead a passé en 2024 un accord avec des fabricants pour produire et vendre des génériques à bas coût dans plus de 100 pays en développement et pour fournir de nombreuses doses.
Le Fonds mondial, un partenariat public-privé, a annoncé la semaine dernière avoir signé un contrat avec Gilead pour procurer aux pays à revenus faibles ou intermédiaire le traitement préventif.
AFP