Chercheur et professeur de Machine Learning à l’African Institute for Mathematical Sciences (Aims), Moustapha Cissé était également le directeur du Centre de recherche en Intelligence Artificielle au siège de Google au Ghana jusqu’en septembre 2022. Il est surtout le fondateur et le coordonnateur du Master en Intelligence Artificielle lancé, en octobre 2018, par l’Aims.
Il est vrai que cela peut sembler un peu chauvin, mais on ne peut s’empêcher de ressentir une immense fierté chaque fois qu’un brillant Sénégalais, surtout à l’étranger, se retrouve sous les feux des projecteurs. On est le 15 octobre 2018, à Kigali, tous les regards sont tournés vers Moustapha Cissé, jeune professeur de Machine Learning et fondateur du Master en Intelligence Artificielle à AIMS. Les cordes sensibles de l’appartenance à la terre de la « Teranga » se sont naturellement réveillées. Sur scène, aux côtés des vice-présidents de Facebook, Dr Jérôme Pesenti, et de Google, Pr Yossi Mathias, le natif de Dakar a impressionné l’audience par sa maîtrise du sujet. Ce fut l’occasion de comprendre pourquoi, après ses études, l’ancien étudiant de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis a été recruté par l’entreprise de Mark Zuckerberg, où il a mené des recherches pendant deux ans sur les biais algorithmiques et la sécurité de l’IA, avant d’être récemment recruté par Google, où il dirige le tout premier centre de recherche en intelligence artificielle en Afrique, basé au Ghana. Il a démissionné de ce poste au mois de septembre 2022 pour se consacrer à un projet de start-up dans la santé au Sénégal, son pays natal.
Ancien de Facebook, actuel directeur d’un centre de Google et professeur à Aims, l’expérience et la vision de Moustapha Cissé expliquent bien le partenariat qui a donné naissance à ce Master. Un programme qu’il a conçu à partir de sa propre expérience. En 2008, il se rend en France pour suivre un Master en Machine Learning. Ce parcours est assez classique pour de nombreux étudiants africains, qui, pour poursuivre des études de pointe dans certains domaines, se tournent vers la France, les États-Unis ou le Canada, parfois en rencontrant des difficultés. « Au même moment, d’autres étudiants, tout aussi talentueux et ambitieux, n’ont pas la possibilité de rejoindre l’Occident. Il n’était pas normal que sur le continent, nous ne disposions pas d’une formation de très haute qualité dans un domaine aussi important et révolutionnaire que l’intelligence artificielle », explique-t-il de sa voix calme et posée.
De forte corpulence et à la barbe hirsute, Moustapha Cissé a forgé son expertise en intelligence artificielle grâce à un parcours scolaire et universitaire brillant. Après avoir obtenu son baccalauréat au collège Sacré-Cœur de Dakar en 2004, il s’inscrit en Mathématiques et Physique à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis. Après une maîtrise obtenue quatre ans plus tard, il poursuit son parcours à l’Université Pierre et Marie Curie pour un Master en Intelligence Artificielle, puis effectue une partie de sa formation à l’Université de Montréal, avant de revenir en France pour y soutenir son doctorat.
Très attaché à son pays, Moustapha Cissé nourrit l’ambition de partager ses connaissances et son expérience avec les jeunes du Sénégal. « Les autorités prennent des mesures pour développer l’enseignement des sciences au Sénégal. Le moment venu, j’apporterai ma contribution, c’est une évidence. Ma conviction est que tout ce qui est meilleur au monde doit bénéficier au Sénégal. Ensuite, il faut veiller à ce que les conditions soient réunies pour que cela se fasse. Je n’ai pas encore eu l’opportunité de rencontrer le président de la République, mais aussi le ministre de l’Enseignement supérieur, que je connais bien car il a été mon professeur à l’université. Mais de toute façon, cela arrivera un jour », conclut-il, lui dont les parents sont originaires de Touba.
Elhadji Ibrahima THIAM
(Article paru dans l’édition du Soleil du 16 octobre 2018 et réactualisé par son auteur)