Évoluant dans un métier dominé par des hommes, Astou Samb se bat avec détermination. Première conductrice de «Taxi Yango», elle s’impose par ses compétences et son intérêt pour son travail.
Astou Samb est la première femme à conduire un taxi « Yango » au Sénégal. Elle brise les barrières d’un milieu largement dominé par les hommes. Un secteur qu’elle a intégré par hasard. « C’était au début de l’année 2024. J’étais à bord d’un taxi Heetch quand j’ai demandé au chauffeur si leur société recrutait des femmes. Il m’a répondu qu’il n’en avait jamais vu, mais m’a conseillé de déposer mon dossier si l’activité m’intéressait. Il m’a donné la liste des documents à fournir et l’adresse de Heetch ».
Motivée, Astou Samb n’a pas tardé à saisir cette opportunité. Dès le lendemain, elle a rassemblé les documents nécessaires et a soumis sa candidature. Quelques jours plus tard, elle est contactée par la société Heetch et passe deux tests : un sur le code de la route et un autre sur la conduite. Elle a réussi ces épreuves sans difficulté. « C’était une simple formalité pour moi, car je savais conduire depuis 2015. Je n’ai donc pas été surprise d’être acceptée », s’enorgueillit-t-elle.
Avant d’ajouter : « On m’a ensuite remis un véhicule, expliqué le fonctionnement du Gps et les modalités de la collaboration, notamment le montant du versement quotidien et le salaire mensuel.
« Le salaire était un peu dérisoire, mais j’ai accepté, considérant cela comme une première expérience ».
Pour s’intégrer dans ce milieu, Astou a adopté une posture d’écoute. Grâce à son humilité et son intérêt profond pour le travail, elle a su gagner la confiance de ses employeurs. Mais cela ne l’empêche pas d’explorer d’autres horizons. Après six mois chez Heetch, Astou Samb a pris la décision de démissionner faute d’augmentation de salaire. Cependant, sans perdre de temps, elle a déposé son dossier chez « Yango ».
Son profil a immédiatement retenu l’attention des recruteurs, et elle a été acceptée. Depuis lors, elle évolue dans cette nouvelle aventure professionnelle. Elle a dû prouver qu’elle était à la hauteur en tant que personne capable de s’imposer par ses compétences.
Elle fait convenablement son travail et assure son versement chaque jour. A la fin du mois, elle perçoit également son salaire. Un bémol : elle n’a pas de contrat de travail. Son objectif : avoir sa propre voiture. Elle bosse dur pour l’atteindre. « Mon ambition, c’est d’avoir mon propre véhicule et de travailler pour mon compte. Même si je ne me plains pas de mon salaire actuel, je pourrais gagner davantage si j’avais mon propre véhicule », souligne-t-elle, optimiste. Mariée et mère de trois enfants, elle reconnaît, toutefois, que le métier n’est pas sans difficultés.
Elle y voit du tout. « On transporte toutes sortes de clients. Certains essayent parfois de dépasser les limites en vous adressant des propos inappropriés mais, il faut savoir se faire respecter et avoir du caractère pour aller de l’avant. Je sais ce que je veux et je suis prête à m’adapter à toutes les circonstances », dit la native de khandane, village situé dans le département de Tivaouane.
C’est d’ailleurs dans cette ville religieuse que Astou Samb a rencontré son époux et a étudié jusqu’en classe de terminale. Après deux échecs au baccalauréat, la quadragénaire s’est installée, en 2014, dans la capitale sénégalaise pour suivre une formation professionnelle de déléguée médicale. Son diplôme en poche, elle a travaillé comme vendeuse dans une pharmacie avant de se lancer dans le secteur du transport.
Aujourd’hui, conductrice de « taxi Yango » n’est pas son unique activité. Elle a d’autres cordes à son arc. Elle est dans la vente en ligne et commercialise des chaussures, des sacs et des crevettes. Femme battante, elle exerce également le métier de la Gratuité partielle (Gp) Dakar-Maroc-Dakar. « Je n’ai pas de temps de repos. Je travaille tous les jours parce que je ne veux pas dépendre des autres pour régler mes problèmes. Je me bats pour le bien-être de ma famille », déclare-t-elle, ajoutant que sa persévérance est due en partie au soutien et la compréhension de son époux.
« Grâce à lui, j’ai trouvé cet équilibre entre travail et famille », confie-t-elle, reconnaissante.
Aliou DIOUF