La réhabilitation de la décharge de Mbeubeuss est sur toutes les lèvres à Keur Massar, dans la banlieue dakaroise. Après d’intenses heurts la semaine dernière, les forces de l’ordre semblent maîtriser la situation pour le moment. Ce qui laisse présager les débuts du projet de résorption de la décharge de Mbeubeuss. Ainsi, chez les habitants du quartier Diamalaye 2, non loin de la décharge, on salue cette initiative.
KEUR-MASSAR – La décharge de Mbeubeuss, coincée entre Keur Massar et Malika, est en phase de connaître une transformation avec la réhabilitation dans les prochains jours, portée par le Projet de promotion de la gestion intégrée et de l’économie des déchets solides au Sénégal (Promoged). Déjà, le lundi 23 février dernier, l’opération de déguerpissement des travailleurs de Mbeubeuss s’est tenue, sous la houlette du préfet de Keur Massar, malgré quelques heurts.
Une semaine après, l’accalmie semble revenir aux alentours de la décharge. Au quartier Diamalaye 2, où les résidents sont exposés aux effets nocifs de la « poubelle géante », les habitants ont dit leur approbation envers ce projet de modernisation de Mbeubeuss. Elles se réjouissent d’une telle initiative qui, pour elles, vise à changer complètement le visage de cette gigantesque poubelle à ciel ouvert, qui reçoit des centaines de tonnes de déchets solides par jour.
« Je suis vraiment contente de cette initiative que nous attendons depuis un bon bout de temps. Ce projet est venu à son heure. Nous qui habitons à côté de Mbeubeuss, vivons un calvaire au quotidien. La situation était devenue invivable, et pas mal d’entre nous ont des maladies respiratoires surtout les enfants », renseigne Coumba Sarr, habitante du quartier. Toutefois, la soixantaine sonnée, la dame appelle les autorités à venir à la rescousse des gens qui gagnent leurs vies dans la décharge. « Ce sont des pères de familles qui travaillaient ici. Bien vrai que la décharge est nocive et menace notre bien-être commun, mais il faut une alternative afin de leur permettre de continuer à travailler et subvenir aux besoins de leurs familles » lance-t-elle.
Ismaïla Sow, président du mouvement « And défar Diamalaye 2 » est aux anges. La mine joviale, il attendait ce projet depuis longtemps. Dans des discussions animées avec ses amis, la question de la réhabilitation de Mbeubeuss reste au centre des propos. Pendant de longues minutes, le débat n’a porté que sur cette question.
L’analphabétisation des enfants prend l’ascenseur
Les visages affichent bonne mine et les ranches de rigolades fusent de partout. Dans leur quasi-totalité, ils approuvent cette décision, et se montrent impatients quant au démarrage du projet. Ismaïla Sow, jeune au teint clair se souvient de ce combat qu’ils ont porté depuis des années, et qui n’avait pas porté ses fruits. Il rappelle que la volonté de moderniser la décharge a débuté sous le magistère de l’ancien président Abdoulaye Wade.
En juin 2008, se souvient-il, les autorités gouvernementales avaient décidé de fermer définitivement la décharge à cause de ses conséquences sanitaires. « Aujourd’hui, nous saluons cette décision, avec ce projet de modernisation qui est d’une grande importance, car il permettra de lutter contre beaucoup de fléaux, mais aussi la décharge sera moderne », fait-il savoir.
Aux alentours de Mbeubeuss, une odeur pestilentielle titille les narines. À perte de vue, on aperçoit cette bombe écologique. La fumée et les particules poussiéreuses de sable envahissent l’espace et rendent le décor incommode. Dans les coins et recoins du quartier Diamalaye 2, dont certains bâtiments jouxtent et surplombent la décharge, on cohabite avec toutes sortes d’immondices. Les sachets plastiques dominent peuplent le décor. À l’entrée principale de la décharge, les voitures à l’effigie de la Société nationale de gestion des déchets (Sonaged) vont et viennent. Au niveau de la porte d’entrée de la décharge, les policiers, en effectif renforcé depuis le début des affrontements, veillent au grain et mettent une surveillance accrue sur tout ce qui bouge. Ndeye Fatou Ndiaye, étudiante en droit à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, et native de Diamalaye 2 prend la défense des enfants du quartier. Pour elle, l’espoir des enfants dans l’éducation a été annihilé par la décharge. Ainsi, à l’en croire, le taux d’analphabétisme prend la courbe ascendante dans cette zone.
« La majeure partie des enfants ne va pas à l’école. À l’âge de sept ans, beaucoup d’entre eux cherchent à travailler dans la décharge pour avoir de l’argent, et plus tard ils finissent par sombrer dans le banditisme. Tout ceci, c’est à cause de la décharge de Mbeubeuss. C’est un sérieux problème » souligne-t-elle, Pour ce projet de modernisation poursuit Ndeye Fatou Ndiaye, il faut que les enfants soient bien pris en compte. Embauchant la même trompette, Amdy Ba, agent de sécurité et habitant du quartier, est aussi obnubilé à la fois par l’insécurité qui sévit autour de Mbeubeuss et aussi par les conséquences sanitaires qui en découlent. Le jeune appelle à la raison les personnes qui résistent avec opiniâtreté contre l’exécution de ce projet. Pour lui, une bonne santé n’a pas de prix, raison pour laquelle, précise-t-il, « si certains prennent Mbeubeuss pour de l’or, y en a qui ne dorment pas et sont exposés à des maladies grave ».
Bada MBATHIE (correspondant)