Le « berndé » est une coutume qui consiste à nourrir et à abreuver les fidèles assistant au Grand Magal de Touba, célébration commémorant le départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur du mouridisme. Cette pratique est bien connue des « Thiantacounes », qui mettent en place chaque année de nombreuses cuisines dans les zones environnantes de Touba.
Veille du Magal, il est 13 heures à Dianatoul Mahwa, un secteur regroupant les Thiantacounes, partisans de Cheikh Béthio, disciple de Serigne Saliou Mbacké, cinquième khalife général des mourides. La chaleur intense n’arrête pas les croyants, venus participer à cet événement religieux.
De la même manière que des bâches sont installées un peu partout dans les alentours, des enclos improvisés à l’aide de barricades permettent de rassembler les vaches. À proximité, des fidèles déposent de grandes marmites : ils préparent le repas du jour. Une coutume largement reconnue par les Thiantacounes, selon Cheikh Abdoul Ahad Samb, proche disciple de Cheikh Béthio. D’après lui, la célébration du Grand Magal de Touba remonte à l’époque de Serigne Abdou Lahad Mbacké, quatrième khalife général des mourides. À cette période, les festivités se tenaient au domicile de Serigne Saliou Mbacké, qui fournissait à Cheikh Béthio des bœufs et des condiments pour préparer les repas. Serigne Saliou prenait en charge l’ensemble des besoins pour la restauration et réservait même trois chambres à Cheikh Béthio dans sa demeure. Cette organisation se poursuivit jusqu’à ce que Serigne Saliou installe Cheikh Béthio dans le quartier de Dianatoul Mahwa. C’est là que Cheikh Béthio décida de célébrer le Magal.
Il préparait des repas qu’il offrait ensuite à Serigne Saliou, lequel les distribuait à la famille de Serigne Touba ainsi qu’aux pèlerins présents autour de la grande mosquée. Toujours selon Cheikh Abdoul Ahad Samb, Cheikh Béthio faisait tout pour que la nourriture ne manque pas durant le Magal. Sur instruction de Serigne Saliou, il distribua aussi des repas dans les quartiers périphériques de Touba, ce qui fit naître la tradition consistant à nourrir les pèlerins dans ces zones lors du Magal. Avec le temps, Cheikh Béthio adapta son organisation : désormais, les bœufs et les condiments étaient directement acheminés dans les quartiers périphériques la veille du Magal. Des centaines de cuisines y étaient installées, et les repas préparés étaient distribués aux pèlerins sur place, assurant ainsi une restauration efficace. Dans la continuité de son père, Serigne Saliou Thioune a maintenu cette coutume.
Selon Abdou Lahad Samb, des centaines de bœufs, accompagnés des ingrédients nécessaires, ont été envoyés vers les cuisines des zones périphériques deux jours avant la cérémonie. « Chaque secteur reçoit sa part de bétail et de provisions pour préparer les repas destinés aux fidèles », a-t-il précisé. Il a ajouté que cette organisation est distincte de la distribution de bœufs effectuée au centre-ville. « Les berndés sont notre tradition. Nous sommes les premiers à organiser des Thiantes », a-t-il conclu, soulignant l’importance de cette coutume pour la communauté des Thiantacounes.
Birane DIOP ( Correspondant)