Productrice et vendeuse de poteries, Fatou Thiam est devenue incontournable à Teug Daara. Cette dame, originaire de Diourbel, a marqué ses empreintes dans son village adoptif qu’elle a intégré depuis 11 ans.
Fatou Thiam fait partie des femmes productrices d’encensoirs, de canaries et de pots de fleurs à Teug Daara où elle s’est distinguée grâce à son courage, sa résilience et sa capacité d’adaptation. La dame a mis en place un mécanisme d’anticipation lui permettant d’éviter une cessation d’activités de production causée par les fortes pluies. Ce système consiste à garder un stock de 12 sacs d’argile et 5 sacs de kaolin qu’elle avait collectés en juin 2025. Elle attend des conditions favorables (séchage du sol) pour continuer son travail. Mais Mme Niasse ne sent pas pour le moment l’impact de l’hivernage puisqu’elle n’est pas au repos. Elle est en activité avec des voyages à Dakar pour vendre le restant de ses encensoirs et pots de fleurs à des commerçants grossistes de la capitale. Elle a pris le soin d’installer un kiosque devant le portail de la grande concession de son mari où elle vit avec ses deux coépouses. Cette cantine contient actuellement 80 articles (encensoirs et pots de fleurs) qu’elle compte écouler pendant le Gamou de Tivaouane. Selon cette femme, les grands évènements religieux et la période de froid (novembre, décembre et janvier) sont les périodes les plus favorables à la vente des encensoirs. « Nous en profitons pour faire le maximum de bénéfices et pallier les difficultés liées aux lenteurs de la vente pendant la saison des pluies », souligne-t-elle. Fatou Thiam a aussi apporté de l’innovation à son métier. Cette stratégie consiste à peindre les encensoirs et les pots de fleurs en y inscrivant des décorations afin de les rendre plus attrayants. Elle vend également de la peinture et des objets d’ornements pour satisfaire les besoins de ses voisines. « Le brillant et la peinture sont devenus des produits incontournables pour nous. C’est pourquoi j’en profite pour les vendre afin de soulager les femmes du village et leur épargner les déplacements à Bambey ou Keur Saër », ajoute-t-elle.
Le mérite de cette dame est d’avoir réussi à imposer son leadership et à marquer de son empreinte un corps de métier qui lui était étranger. Née en 1989, à Diourbel, elle a appris la fabrication des poteries à Teug Daara, après avoir rejoint le domicile de son mari en 2014. Elle a été initiée aux rudiments par sa coépouse, Khady Diop. « Les choses sont compliquées certes, mais on peut s’en sortir si l’on a de la volonté. Il s’y ajoute qu’il est parfois difficile de faire autre chose », a remarqué madame Niasse.
Après 11 ans de pratique, Fatou Thiam a bien assimilé ce métier réservé aux forgeronnes. Aujourd’hui, elle fait partie des femmes les plus influentes du village de Teug Daara. Cette dame, qui se définit comme analphabète, prend toujours des initiatives pour relever des défis et aller encore plus loin. Et elle ne se fixe pas de limites. C’est ce qui explique son recours aux emprunts d’argent dans les services financiers décentralisés. Ces financements lui permettent d’effectuer de longs voyages en Mauritanie, à Saint-Louis, Diaobé, Tambacounda, Ziguinchor pour vendre ses articles à certains commerçants grossistes. « Je loue une voiture pour me déplacer et livrer des commandes importantes allant de 300 à 500 encensoirs », informe-t-elle.
Avant de venir au village de Teug Daara, Fatou Thiam a exercé le métier de bonne (femme de maison) pendant cinq ans, de 2005 à 2011, à Diourbel et à Dakar. Après son retour au Baol, elle a pratiqué la collecte de ferrailles à Diourbel en gagnant au moins 3.000 FCfa par jour. « À l’époque, nous étions un groupe d’une dizaine de femmes recrutées par un commerçant. Il nous finançait avec son argent et notre tâche était de faire le tour de la ville de Diourbel pour ramasser et acheter de la ferraille. Nous bénéficions également d’une prime en cas de collecte d’une quantité importante », rappelle-t-elle. Son expérience en tant que productrice et vendeuse d’encensoirs la pousse à encourager d’autres dames à croire en elles-mêmes. Selon Fatou Thiam, les femmes doivent être autonomes et compter sur leurs propres capacités physiques, intellectuelles et financières pour subvenir à leurs besoins et soutenir leur mari.
Par Oumar Bayo BA (Correspondant)