À Carabane, île historique au cœur de la Casamance, l’Église catholique, sous l’impulsion de Mgr Jean-Baptiste Valter Manga, évêque du diocèse de Ziguinchor, a lancé un vaste projet de revalorisation du patrimoine religieux et culturel. Porté par une vision inclusive et mémorielle, ce chantier d’envergure ambitionne de faire de l’île un véritable pôle spirituel et un espace interreligieux, à la croisée des mémoires, des cultures et des croyances.
OUSSOUYE – Carabane, île emblématique de la Casamance, chargée d’histoire et de foi, vient de connaître un moment charnière ce dimanche 29 juin. À l’occasion de la fête patronale de Saint Pierre et Saint Paul, célébrée dans la plus ancienne Église du diocèse, Monseigneur Jean-Baptiste Valter Manga a officiellement lancé un projet d’envergure pour la revalorisation du patrimoine religieux et culturel de l’île. Et c’est au terme d’une messe solennelle, empreinte d’émotion et d’espérance, que l’évêque de Ziguinchor a révélé les contours de cette initiative. Le site choisi : l’actuel hôtel Carabane, appelé à devenir un centre interreligieux et un espace de ressourcement spirituel.
«Ce jour est un jour de grande joie. Nous voulons refaire de ce lieu, un espace de mémoire, de foi, de dialogue. Carabane a été un carrefour de rencontres entre chrétiens, musulmans et adeptes de la religion traditionnelle. Elle doit redevenir ce flambeau pour notre Église, pour la Casamance et pour tout le Sénégal », a affirmé Mgr Manga. Située sur la rive gauche du fleuve Casamance, Carabane occupe une place singulière dans l’expansion du christianisme au Sud du pays. « C’est le point de départ de l’Évangile. Beaucoup de croyants ont rencontré le Christ ici, avant d’essaimer dans tout le diocèse », a rappelé le successeur de Mgr Paul Abel Mamba, insistant sur la nécessité de préserver cette mémoire collective. L’ancien curé de la paroisse Saint Benoît de Néma, a également salué les efforts de l’État, notamment la réhabilitation du quai de pêche et de l’église en 2018, sous la présidence de Macky Sall, qui avait déjà marqué un tournant.
Une renaissance collective attendue
Pour les habitants de Carabane, ce projet sonne comme une promesse tenue. « Après ma nomination, les populations m’ont dit : ‘Mgr, ne nous oubliez pas’. Aujourd’hui, je reviens pour vous dire que je ne vous ai pas oubliés », a souligné Mgr Manga, visiblement ému. Eugène Ndiaye, parrain de l’édition 2025 de la fête patronale, a salué une « renaissance de l’île », à travers ce projet qui vient d’être lancé par l’évêque du diocèse de Ziguinchor.
«Carabane mérite de redevenir Carabane. Elle manque encore d’eau et d’infrastructures sociales de base, mais ce projet est une chance immense pour nous », a-t-il ajouté. Une opinion partagée par Moussa Guèye, chef de village de Carabane. «Nous attendions ce projet depuis longtemps. Nos cimetières eux-mêmes témoignent de cette cohabitation interreligieuse harmonieuse. Nous allons tous porter ce projet », a rassuré le représentant de l’État dans ce patelin. Le caractère fédérateur de cette initiative a également été souligné par Nicolas Diatta, responsable de la communauté catholique locale. Pour lui, la « convivialité ici n’est pas un mot vide. À Carabane, l’humain est au cœur ».
Un projet de mémoire et d’avenir
Pour l’ancien gouverneur de Sédhiou, Habib Léon Ndiaye, ce projet s’inscrit dans une dynamique de « reconquête mémorielle ». Il permettra, selon l’administrateur civil, « de vivre de façon immersive la foi chrétienne et d’ancrer Carabane comme pôle de dialogue interreligieux ». Une thèse corroborée par l’adjoint au préfet du département d’Oussouye. Georges Gabriel Diarra voit dans ce projet un levier pour la sensibilisation et la protection du patrimoine commun. «Carabane est un trésor très riche. Il faut en faire un lieu vivant de mémoire, de culture et de foi », a préconisé le collaborateur du préfet Maurice Latyr Ndione.
Pour sa part, le chercheur et auteur du livre Carabane, île mémoire, Dr Raphaël Lambal n’a pas manqué de saluer l’initiative lancée par Mgr Manga. De plus, il a précisé que ce projet est à la hauteur du potentiel historique et spirituel de l’île. « C’est une aventure passionnante qui commence. Nous avons là, un patrimoine extraordinaire. À nous de le révéler au monde », a poursuivi l’auteur de « Carabane, île mémoire ». Par ce projet fédérateur, spirituel et culturel, Carabane s’ouvre à une nouvelle page de son histoire. Entre passé glorieux, présent porteur d’espoir et futur à construire ensemble, l’île retrouve peu à peu sa vocation première : être un lieu de lumière, de foi partagée et de mémoire vivante.
Gaustin DIATTA (Correspondant)